L’Université de Luxembourg organise le 8 octobre prochain une conférence sur le thème des gaz de schiste. Cette source d’énergie controversée est présentée dans le titre comme une éventuelle "solution aux problèmes énergétiques de l’UE".
L’eurodéputé écologiste Claude Turmes s’est étonné dans une lettre ouverte adressée au recteur de l’Université du choix très partial des intervenants et de la problématique tendancieuse choisie pour cette conférence. Claude Turmes juge en effet important qu’il y ait un débat critique équilibré sur la question des gaz de schiste. Or, il s’inquiète de voir qu’aucun des conférenciers n’a les compétences requises pour apporter dans le débat une évaluation sérieuse des effets environnementaux de l’exploitation des gaz de schiste.
Les intervenants invités sont l’ambassadeur polonais au Luxembourg, dont Claude Turmes souligne dans sa lettre au recteur "le rôle important dans les grands groupes énergétiques polonais", le vice-président d’une entreprise énergétique polonaise et l’eurodéputé et ancien ministre de l’énergie Robert Goebbels, les deux derniers étant, observe Claude Turmes, "deux partisans de cette forme d’énergie controversée".
Dans sa lettre au recteur, Claude Turmes évoque pourtant les risques que fait peser sur l’environnement l’exploitation de gaz de schiste. Des risques liés d’une part à l’utilisation de produits chimiques dangereux ajoutés à l’eau qui sert à la fracturation des roches schisteuses et qui se retrouvent ensuite dans les nappes phréatiques. Mais il parle aussi des risques liés aux fuites de méthane, gaz à effet de serre qui est libéré par la fracturation de certains schistes. Plusieurs études scientifiques relèvent que ces émissions de méthane pourraient empêcher d’atteindre les objectifs de réduction de gaz à effet de serre.
L’eurodéputé dénonce aussi les limites des gaz schisteux : dire que leur extraction pourrait réduire la dépendance énergétique de l’UE est une fable, dit Claude Turmes qui souligne que la Commission a calculé que l’UE devrait continuer d’importer 60 % du gaz naturel qu’elle consomme, même en cas d’une exploitation maximale des gaz de schiste.
Et Claude Turmes rappelle que nombre de voix s’élèvent contre l’exploitation des gaz schisteux en Europe, et que certains pays l’ont même interdite.
Dans ce contexte, la conférence organisée par l’Université lui apparaît comme "une farce", a-t-il écrit au recteur. A ses yeux, l’Université a pour tâche d’éclairer de façon critique et contradictoire les débats portant sur les orientations technologiques futures de l’UE. En aucun cas elle ne peut se fermer aux débats de sociétés, mais au contraire les accompagner de façon active et pluraliste, poursuit le parlementaire.
Or, en organisant cette conférence, l’Université de Luxembourg se fait le jouet des intérêts du lobby européen, et surtout polonais, des gaz de schiste, dénonce Claude Turmes. Il s’inquiète de voir l’Université devenir l’objet des manigances de lobbyistes dont le seul objectif n’est selon lui que course au profit et avidité à court terme sur le dos des générations à venir. Les discussions sur la politique énergétique montrent que le lobby du gaz utilise depuis longtemps les débats sur les gaz schisteux pour laminer les objectifs de l’UE en matière de lutte contre le changement climatique et d’énergies renouvelables, explique Claude Turmes à Rolf Tarrach avant de lui demander, pour finir, si l’Université entend vraiment devenir le porte-voix d’un tel mouvement.