A l’issue des élections législatives et sénatoriales, tenues les 24 et 25 février 2013, l’Italie est dans une situation politique délicate. Le Partito Democratico, menant une coalition de centre gauche avec le parti écologiste SEL, arrive en tête dans les deux élections. Aux législatives, la coalition de gauche a recueilli 29,5 % des voix. En vertu de la loi électorale, le PD, en tant que parti arrivé en première place, obtient une majorité automatique à la Chambre des députés, soit 340 des 630 sièges. L’alliance de centre droit autour de Silvio Berlusconi, avec 29,1 % des voix, obtient 124 sièges. Le comique Beppe Grillo et son "Mouvement Cinq Etoiles", grande surprise de cette élection, arrivent en troisième position (25,5% des voix) et obtiennent 108 mandats. Par contre, le Premier ministre sortant, placé à la tête d’un gouvernement dit technique en novembre 2011, Mario Monti, ne recueille que 10,5 % des suffrages.
Si la coalition de centre gauche dispose ainsi automatiquement d’une majorité à la Chambre des députés, la situation au Sénat est tout autre. Pour les élections sénatoriales, la prime à la majorité est accordée par région. Certes, le PD arrive là aussi en tête, avec 31,6 % des voix et obtient 121 sièges, mais le parti de Berlusconi arrive en seconde position et reçoit 117 mandats. Avec 23,8 % des voix, le Mouvement Cinq étoiles, arrive là aussi en troisième position et obtient 58 sièges de sénateurs. Le parti de Mario Monti, qui n’a recueilli que 9,1 % des voix et 16 mandats, ne peut pas faire l’appoint pour atteindre la majorité absolue de 158 sièges, comme cela l'avait été envisagé avant les élections, avec le leader du Partito Democratico, Pier Luigi Bersani. Ce dernier avait les faveurs des gouvernements européens car il s’était engagé à poursuivre la politique de rigueur de Mario Monti, afin de réduire le déficit public et la dette de 2200 milliards d’euros.
En l’absence de majorités du même bord politique à la Chambre des députés et au Sénat, la formation d’un gouvernement ne serait pas possible.
Interrogé par le Tageblatt, le Luxemburger Wort et la radio RTL, le ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a tenu des propos similaires à chacun de ces interlocuteurs. Il a exprimé sa crainte d’une Italie qui, devenue ingouvernable, ne parviendrait pas à rétablir ses comptes financiers puis emmènerait avec elle la zone euro dans les abîmes. "Ce n’est pas grave seulement pour l’Italie. Cette situation constitue aussi une menace pour l’Europe", a-t-il déclaré au Luxemburger Wort, tandis qu’il faisait remarquer au micro de RTL que "c’est le scénario que personne ne voulait, ni la moitié de l’Italie ni le monde entier".
Le ministre socialiste était favorable à Pier Luigi Bersani. "Sérieux, il avait réellement un plan pour Italie", a-t-il dit. Par contre, Jean Asselborn juge "extrêmement dangereux" que des hommes politiques comme Silvio Berlusconi, puissent, avec leurs médias et leur argent, "manipuler l’opinion". Jean Asselborn voit dans le vote en faveur de Silvio Berlusconi et de Beppe Grillo, lesquels rassemblent pour eux deux plus de la moitié des suffrages, une incongruité. Alors que de nouvelles élections pourraient avoir lieu avant l’été si aucune majorité ne peut être dégagée dans les prochaines semaines, Jean Asselborn espère que les Italiens "reconnaissent eux-mêmes le sérieux de la situation" et que le moment venu, ils se détourneront des votes pour Berlusconi et Grillo.
"Une 'ingouvernabilité' de l’Italie serait catastrophique", juge Jean Asselborn qui rappelle qu’elle est la quatrième économie de l’UE et la troisième de la zone euro.
L’Europe perdrait en crédibilité et les marchés exerceraient une pression sur l’euro. "Je ne suis pas un ami des marchés. Mais, quand ils réagissent, c’est une réalité. Le résultat c’est que l’économie puis la situation sociale sont affaiblies", a déclaré le ministre. Jean Asselborn souligne par ailleurs que le Mécanisme européen de stabilité ne suffit pas pour garantir la stabilité de l’euro, si l’Italie, accumulant une dette de 2200 milliards d’euros, venait à faillir.