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Parlement européen - Budget de l'Union européenne
Cadre financier pluriannuel 2014-2020 – Herman Van Rompuy est venu présenter au Parlement européen l’accord trouvé au Conseil européen, qui est jugé "inacceptable" tel quel par les quatre principaux groupes politiques
18-02-2013


Dix jours après avoir arraché un compromis sur le cadre financier pluriannuel 2014-2020, le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, est venu au Parlement européen pour présenter l’accord trouvé le 8 février dernier  à l’occasion d’une conférence des présidents qui s'est tenue le 18 février 2013 et qui était ouverte à tous les membres du Parlement européen. Le président de la Commission, José Manuel Barroso, était lui aussi présent pour cette discussion qui laisse présager des négociations ardues entre Parlement et Conseil sur le futur budget de l’UE.  

"Le compromis obtenu lors du dernier sommet européen n'est pas à la hauteur des défis à venir. Le Parlement a demandé - et continuera à demander- un budget moderne et ambitieux pour l'UE afin de contribuer à stimuler la reprise et de laisser la crise économique et financière derrière nous", a déclaré Gianni Pittella (S&D), qui présidait la séance, en ouvrant le débat. Il donnait ainsi la couleur, annonçant d’emblée que le Parlement européen ne pourrait accepter tel quel l’accord trouvé au Conseil européen.

Herman Van Rompuy appelle Parlement et Conseil à trouver un accord rapide

Herman Van Rompuy est venu défendre un accord qui concilie selon lui deux grands principes, à savoir adapter le budget aux restrictions budgétaires qui sont pratiquées partout en Europe tout en investissant dans l’avenir.               

"Dans les circonstances économiques actuelles, la seule option était un budget de modération", a rappelé le président du Conseil européen pour qui l‘enjeu est de "faire plus avec moins d’argent". Car selon lui "plus d’Europe ne veut pas dire nécessairement plus d’argent". Herman Van Rompuy devant les eurodéputés lors de la conférence des présidents du 13 février 2013  © European Union 2013 - European Parliament

Appelant à regarder plus attentivement le contenu des dépenses, il a mis en avant l’accent qui a été mis sur la recherche et l’innovation, la cohésion et la lutte contre le chômage des jeunes. L’agriculture représentera à l’issue de la période 27 % des dépenses, contre 75 % dans les années 70, s’est félicité Herman Van Rompuy en saluant la réforme de la PAC qui est prévue. Les relations extérieures "n’ont pas été négligées", a-t-il encore assuré, tandis que les dépenses administratives vont un peu augmenter, ce qui, a-t-il admis, "masque un effort considérable pour notre personnel".

Sur les ressources propres, Herman Van Rompuy a rappelé que les Etats membres avaient pu s’entendre pour réduire la compensation que les Etats membres récupèrent sur la collecte des droits et taxes, ce qui augmente d’autant les ressources propres traditionnelles. "Nous avons ouvert les perspectives pour d’éventuelles nouvelles ressources propres liées à un nouveau système de TVA et à la future TTF", a ajouté le président du Conseil européen en ajoutant qu’un "compromis avait pu être trouvé sur la difficile question des rabais".

Revenant sur l’écart entre engagements et paiements, qui fait l’objet de vives critiques, Herman Van Rompuy n’a pas manqué de constater que cet écart est proche de celui qui était prévu lors du dernier cadre financier pluriannuel, mais que les chefs d’Etat et de gouvernement s’étaient cette fois-ci entendus sur une "plus grande flexibilité, et même la flexibilité maximale possible, afin qu’il y ait les crédits de paiement nécessaires pour faire face aux engagements légaux". Cette question, mise en avant par le Parlement européen, a été l’occasion pour le président du Conseil européen d’assurer aux eurodéputés que les préoccupations du Parlement européen avaient joué un grand rôle tout au long des négociations, que ce soit sur la question des ressources propres, que peu d’Etats membres souhaitaient considérer, sur une clause de flexibilité ou encore sur une clause de révision, deux points mentionnés explicitement dans les conclusions.

Herman Van Rompuy a fait écho au "sens de responsabilité collective" dont ont fait preuve les chefs d’Etat et de gouvernement en trouvant un accord qu’il considère comme "un mandat très fort" pour négocier avec le Parlement européen. "De grands projets dépendent de ces perspectives financières à long terme", a souligné Herman Van Rompuy avant d’appeler Conseil et Parlement à trouver "un accord rapide".

José Manuel Barroso appelle à "reconnaître que certaines avancées positives" ont été faites, et plaide pour une flexibilité maximale afin de compenser l’écart entre engagements et paiements

José Manuel Barroso a souligné les efforts consentis par les chefs d’Etat et de gouvernement pour trouver un accord qui reflète en fin de compte "la réalité d’un processus de négociation impliquant 27 Etats membres lorsque l’unanimité est requise".

"La Commission aurait préféré un résultat plus ambitieux pour l’Europe", a-t-il rappelé. Mais, à l’heure où vont s’ouvrir les négociations, José Manuel Barroso a souligné, "malgré des coupes décevantes", la nécessité de "reconnaître que certaines avancées positives" ont été faites, et ce notamment en soutien à la croissance et à l’emploi. La structure de la proposition de la Commission a été préservée, ainsi que certains instruments comme le mécanisme pour l’interconnexion en Europe, se félicite-t-il ainsi, même si les budgets proposés ont été nettement réduits. De même le président de la Commission voit-il d’un bon œil l’augmentation des budgets pour la recherche et l’innovation, ainsi que pour le programme Erasmus pour tous. Il salue aussi l’initiative pour l’emploi des jeunes créée par le Conseil et dotée de 6 milliards d’euros, qui va "renforcer la dimension sociale de l’UE". Autre source de satisfaction de José Manuel Barroso, le fait que le programme pour les plus démunis ait pu être préservé malgré les oppositions de certains. Les ressources allouées à la cohésion et à l’agriculture sont importantes et seront mieux ciblées, tandis que la dimension de solidarité sera renforcée par l’adaptation des règles de cofinancement et de préfinancement en fonction de la situation spécifique des régions les plus vulnérables, se félicite encore José Manuel Barroso.

Le président de la Commission a mis l’accent lui aussi sur la question de la flexibilité : "vous avez eu raison de la demander, car sans un niveau adéquat de flexibilité, le CFP sur lequel se sont entendus les chefs d’Etat et de gouvernement ne peut tout simplement pas fonctionner", a-t-il expliqué. La Commission considère en effet que l’écart de 51,5 milliards entre engagements et paiements ne peut être accepté qu’à condition qu’il y ait une flexibilité spécifique et maximale afin que l’UE puisse remplir les obligations qui lui incombent en vertu de l’article 323 du traité. Il faut donc pouvoir notamment reporter d’une année sur l’autre les crédits de paiements non utilisés, plaide José Manuel Barroso qui attache la plus grande importance à la flexibilité entre années et entre rubriques afin de pouvoir gérer l’écart entre engagements et paiements, ce qui est à ses yeux bien plus qu’une question technique.

Sur la réforme des ressources propres, il est d’avis que le travail doit se poursuivre sur la base des propositions de la Commission.

Quant à la volonté du Parlement de prévoir une révision à mi-parcours du CFP, il dit partager l’idée qu’une réelle clause de révision sera nécessaire.

Joseph Daul (PPE) : "Ce budget n'est pas acceptable"

"On se retrouve avec le budget le plus bas de l'histoire de l'Union européenne", a constaté le président du groupe PPE, Joseph Daul qui a lui aussi annoncé la couleur sans tarder : "ce budget n'est pas acceptable".

Joseph Daul le 18 février 2013  © European Union 2013 - European Parliament"Le dernier Sommet européen n'avait d'Européen que le nom", a commenté Joseph Daul qui y a plutôt vu "une réunion de marchands de tapis".

Le cadre financier qui nous est proposé va à l'encontre des traités, accuse-t-il. D’abord, parce que le Conseil européen a outrepassé ses compétences en contournant les commissions parlementaires responsables. Ce qui est pour Joseph Daul "une violation des pouvoirs législatifs du Parlement européen". Ensuite, parce que prévoir des crédits de paiement qui sont 52 milliards d'euros plus bas que les crédits d'engagement revient selon lui à "faire du déficit", un déficit qui est contraire à la règle inscrite dans le traité.

Le Parlement européen prend ses responsabilités très au sérieux et il est prêt à négocier pour un budget européen à long terme réaliste, capable de promouvoir la croissance, les investissements et les emplois, a assuré le président du PPE.

"Les États membres nous ont fait une proposition de négociation. Alors négocions! Et pour commencer, soyez transparents. Donnez-nous les chiffres détaillés de l'arrangement du dernier Conseil", a lancé Joseph Daul qui souhaite faire la lumière les politiques européennes à mener pour la croissance et pour l'emploi.

Joseph Daul a rappelé les priorités du groupe PPE pour les négociations à venir : "Nous n'exigeons pas un budget énorme. Nous demandons un budget réaliste et qui prépare l'avenir. Ce que nous voulons, c'est un engagement ferme sur une clause de révision, dans deux-trois ans, pour permettre au nouveau Parlement de revoir ce budget. Ce que nous demandons c'est l'introduction d'une réelle flexibilité. Entre les lignes budgétaires et entre les années. Il en va de l'efficacité du cadre financier. Ce que nous attendons, enfin, c'est la mise en place de ressources propres pour que le budget européen ne soit plus jamais soumis à des caprices politiciens."

Hannes Swoboda (S&D) : "Un budget a minima pour une période de sept ans, c’est inacceptable"

Hannes Swoboda, président du groupe S&D, lui a emboîté le pas, affirmant d’emblée lui aussi que ce budget ne saurait être approuvé tel quel. C’est un budget anticyclique qu’il conviendrait d’adopter, et non procyclique, estimeHannes Swoboda le 18 février 2013  © European Union 2013 - European Parliament. en effet l’eurodéputé socialiste qui s’est montré particulièrement critique devant les faibles montants prévus pour lutter contre le chômage des jeunes, pour aider à faire face à la mondialisation, pour doter l’UE des infrastructures nécessaires ou encore pour lutter contre la pauvreté qui gagne scandaleusement du terrain en Europe.

"Un budget a minima pour une période de sept ans, c’est inacceptable", estime Hannes Swoboda. Une clause de révision est donc une condition sine qua non pour que son groupe accepte ce budget, sans compter que la flexibilité prévue dans l’accord trouvé est insuffisante à ses yeux. Pour que son groupe donne son aval au CFP, il faudra donc des modifications de fond, a prévenu le leader socialiste.

Guy Verhofstadt (ADLE) : "La seule solution est de tout renégocier, de tenter de trouver d’ici deux ans un accord sur un nouveau cadre financier pour l’UE qui soit réellement axé sur l’avenir"

Guy Verhofstadt, qui préside le groupe de l’ADLE, a déploré que l’accord trouvé au Conseil européen porte sur "un budget pour le passé", et non sur "un budget pour l’avenir". C’est un budget pour moins d’Europe, et non pour plus d’Europe, dénonce-t-il encore, voyant dans l’accord trouvé un "copier-coller des perspectives financières Guy Verhofstadt le 18 février 2013  © European Union 2013 - European Parliament.2007-2013" dans lequel il y a "certes un peu moins d’argent pour l’agriculture et un peu plus pour l’innovation". L’eurodéputé s’insurge contre les plus de "50 exceptions, exemptions, remises, rabais, remises sur les rabais et autres traitements spéciaux".

Guy Verhofstadt dénonce aussi "un accord qui va creuser le déficit budgétaire", et il a évoqué à ce sujet les engagements restant à liquider qui représentaient 130 milliards en 2006, qui vont atteindre 230 milliards en 2013 et qui pourraient dépasser 300 milliards avec ce CFP.

Autre critique du leader des démocrates et libéraux, ce budget n’a pas de ressources propres malgré les bonnes propositions faites par la Commission.

Sa conclusion : "la seule solution est de tout renégocier, de tenter de trouver d’ici deux ans un accord sur un nouveau cadre financier pour l’UE qui soit réellement axé sur l’avenir". Guy Verhofstadt propose de renégocier ce CFP après les élections européennes de 2014. Car il est de son point de vue inacceptable que le Parlement démocratiquement élu puisse ne rien avoir à dire sur un budget qui va couvrir l’entière durée de la prochaine législature. Il appelle donc de ses vœux une "véritable clause de révision à mi-parcours avec le Parlement européen nouvellement élu et un vote à la majorité qualifiée au Conseil, comme prévu dans le traité de Lisbonne".

Isabelle Durant (Verts/ALE) : il conviendrait de "renégocier un budget pour cinq ans après les élections européennes de 2014"

Isabelle Durant, qui s’exprimait au nom du groupe Verts/ALE, a dénoncé “l’épure du Conseil européen, pleine d’exceptions, de coupes et de rabais” et qui est à ses yeux “tout sauf un budget. Elle considère en effet un budget comme un outil pour la relance, ce qui est loin d’être le cas de l’accord trouvé. Elle s’insurge du manque de transparence du Conseil, soulignant elle aussi, comme Joseph Daul, que le Parlement n’ait pas accès aux chiffres détaillés du compromis trouvé.Isabelle Durant le 18 février 2013  © European Union 2013 - European Parliament

Effarée devant 90 milliards d’euros de coupes pour sept ans, elle appelle à renégocier un budget pour cinq ans après les élections européennes de 2014. Isabelle Durant a aussi dénoncé l’écart entre paiements et engagements, s’inquiétant de l’effet boule de neige de ce choix qui va empêcher le budget de l’UE de soutenir les Etats membres.

"Il y a zéro accord sur les ressources propres !", a encore dénoncé Isabelle Durant qui déplore que les chèques qui existaient déjà aient été entérinés, et qu’on en ait même créé un nouveau pour le Danemark.

Certes, l’accord prévoit quelques éléments de flexibilité et une clause de révision, nécessaire, mais Isabelle Durant estime que cela ne suffira pas pour obtenir le vote de son groupe. Elle se demande en effet comment le Conseil européen sera capable de s’entendre à l’unanimité sur une révision…

"Nous ne sommes pas déraisonnables", a-t-elle conclu, convaincue que ce budget doit servir à investir. Mais son groupe n’est pas "en capacité d’accepter l’’accord tel qu’il est", il sera en "capacité de négocier, peut-être, car les fenêtres de négociation ouvertes sont étroites". Aussi, elle plaide pour reporter la négociation à 2014 d’un cadre financier pluriannuel d’une durée de cinq ans.