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Santé
Dans son rapport adopté par la commission parlementaire de l'industrie, de la recherche et de l'énergie, l'eurodéputé socialiste, Robert Goebbels, doute de l'efficacité de la proposition de directive sur les produits du tabac
27-06-2013


L'eurodéputé socialiste Robert GoebbelsLe 27 juin 2013, l'eurodéputé socialiste, Robert Goebbels, a tenu une conférence de presse pour rendre compte de la position de la commission de l'Industrie, de la recherche et l'énergie (ITRE) du Parlement européen au sujet de la directive sur les produits du tabac. La commission ITRE est une des cinq commissions parlementaires qui doivent se positionner, la commission Environnement, santé publique et sécurité alimentaire étant chargé de l'avis définitif. Robert Goebbels en a été désigné rapporteur pour avis. Son rapport fut adopté le 20 juin 2013, avec une majorité de 37 voix pour, 10 contre et 3 abstentions. L'avis adopté "reflète clairement l'approche critique de Robert Goebbels face à cette bureaucratisation des mesures proposées", comme on le lit dans le document que l'eurodéputé remis à la presse.

Robert Goebbels a rappelé que la proposition de directive, présentée en décembre 2012 par la Commission européenne, a pour principal objectif de rendre le tabac moins attractif, notamment auprès des jeunes, principalement par le biais de la standardisation des paquets et en réservant 75 % de leur surface à des textes et images chocs devant illustrer les effets nocifs du tabac. Le Conseil EPSCO a pour sa part déterminé son approche générale le 21 juin 2013.

Il a fait remarquer que, lors de la première initiative du genre, en 1999, la Commission européenne avait évoqué la possibilité d'éviter 500 000 morts par an dans l'UE. Quatorze ans plus tard, elle parle de 700 000 morts évitables. Robert Goebbels voit dans cette différence de chiffres la preuve qu' "on ne peut pas compter sur une attitude absolument scientifique sur le sujet". Il n'y a pas de doute que le tabagisme, actif et passif, est dangereux. Néanmoins, 576 milliards de cigarettes furent fumées en 2012. "C'est cent milliards de moins que cinq plus tôt mais cela reste un chiffre énorme", dit-il. Il ne serait ainsi pas possible d'interdire la cigarette sans se retrouver dans la situation des Etats-Unis à l'époque de la prohibition de l'alcool, qui vit la criminalité organisée prendre le relais. Cette criminalité organisée est d'ailleurs déjà à l'origine, selon Interpol, de 10 à 12 % des cigarettes fumées actuellement en Europe. 

Pour Robert Goebbels, il n'y a "pas de stratégie évidente", en matière de lutte contre le tabagisme, dit-il, constatant que la moitié des 15-35 ans et 37 % des 11 – 15 ans fument. De plus, il émet des doutes sur les fondements de cette volonté de lutter contre le tabagisme. "Alors que tout homme est mortel, la philosophie dominante est celle du moindre risque. Ainsi se multiplient les avertissements contre la consommation d'alcool, le sucré, le salé, l'alimentation carnée, les produits industriels et la malbouffe. En même temps, l'espérance de vie progresse dans toute l'UE où l'ambition sociétale ultime semble être de mourir un jour en bonne santé !", a-t-il dit dans "la justification succincte" de son projet d'avis, transmis à la presse. En fin de conférence de presse, l'eurodéputé a tenu à souligner qu'il avait refusé de rencontrer tout lobbyiste, que ce soit de la Chambre de commerce du Luxembourg, de la Fédération des industriels luxembourgeois ou du syndicat chrétien LCGB.

Des informations relatives au sevrage tabagique seraient plus pertinentes que des phrases et images chocs

Concernant les mesures envisagées par la Commission européenne, l'eurodéputé doute du caractère effrayant des avertissements sous formes d'images chocs et de textes et juge cette mesure insuffisante. Il lui semble "beaucoup plus important" de donner des informations sur le sevrage tabagique. Ainsi, le rapport adopté par la commission ITRE propose de ne réserver que 50 % de la surface des paquets à ces messages mais également de contraindre à ce que la moitié de ces derniers constituent des informations relatives au sevrage tabagique. Selon lui, "il est impératif de fournir aux fumeurs et des voies et des moyens de se libérer du tabagisme".

Robert Goebbels rappelle par ailleurs que l'industrie du tabac est "un fait économique". Selon une étude du Parlement européen, son chiffre d'affaires en Europe atteint 136,5 milliards d'euros, et elle rapporte à la main publique, sous forme de revenus en accises et en taxes, 79 milliards d'euros, rapporte-t-il. De même, il faut être prudent dans la lutte contre le cigarette dans le mesure où elle génère 50 000 emplois dans la production, plus de 200 000 dans la distribution et procure des revenus à 50000 agriculteurs.

Il  met également en garde contre les conséquences que pourraient avoir l'uniformisation des paquets pour les petits producteurs, qui y perdraient une marge de manœuvre pour se différencier des quatre grands producteurs  qui contrôlent 90 % du marché. D'autant plus que "ce n'est pas la forme de l'emballage qui crée la dépendance", dit-il. Il est prévu qu'un paquet ait pour dimension une hauteur de 64 mm, une largeur de 55 mm et de limiter le contenu à un minimum de 20 cigarettes.

La proposition de la Commission d'interdire toutes sortes d'"arômes caractérisants", dans les cigarettes, le tabac à rouler et le tabac sans combustion, lui semble aller trop loin. Il confie que l'interdiction du menthol a suscité une vive opposition dans les commissions parlementaires du Parlement européen. Robert Goebbels juge cette interdiction comme "une atteinte aux choix des consommateurs adultes, avertis et pleinement informés des risques qu'ils encourent en continuant à fumer". Il faudrait prouver la nocivité d'un arôme pour pouvoir l'interdire.

L'eurodéputé socialiste s'emporte, comme les cinq commissions qui doivent donner leur avis sur la proposition, rapporte-t-il, contre le fait que la Commission européenne s'est arrogé le droit de changer des éléments essentiels de la législation en seize endroits, en recourant aux actes délégués. Les deux mois de délai dont disposent le Conseil et le Parlement européen pour s'opposer à une modification dans le cadre de cette procédure sont en général trop courts pour réagir, signifie-t-il. La commission ITRE a en conséquence retiré 14 des 16 pouvoirs délégués.

Enfin, la proposition de directive veut inclure les cigarettes électroniques, en proposant qu'au-delà d'un certain seuil, englobant la majorité des cigarettes électroniques sur le marché, elles soient obligatoirement autorisées comme médicaments. Les autres devraient être commercialisées avec des messages sanitaires. Pour Robert Goebbels et la commission ITRE, la cigarette électronique n'est ni un produit du tabac, ni un médicament. Il y aurait donc lieu de l'exclure du champ de la directive. Il faudrait attendre les résultats des recherches conduites sur l'éventuelle nocivité du produit. Robert Goebbels cite un premier rapport d'experts publié en France en mai 2013 qui souligne que "contrairement à la cigarette, l'e cigarette ne libère ni monoxyde de carbone, ni particules solides, ni quantité significative de cancérogènes" et que "les effets irritants et/ou toxiques des composants de l'e-cigarette sont bien moindres que ceux liés à la fumée du tabac".