Un peu plus d’une semaine après avoir rendu visite à son homologue américain, Mike Froman, pour faire le point sur les négociations sur l’accord de libre-échange entre l’UE et les USA (TTIP), et en amont du 4e round de négociations qui doit se tenir du 10 au 14 mars 2014, le commissaire européen en charge du Commerce s’est entretenu de l’état d’avancement de ce projet avec les ministres européens du Commerce, lors d’une réunion informelle à Athènes le 28 février 2014.
L’Agence Europe a rapporté que les ministres et chefs d'entreprise ont prévenu de "la grogne croissante au sein de l'opinion publique" contre le TTIP en cours de négociation. Ils ont souligné que le risque d'abaissement des normes sociales et environnementales européennes ainsi que la clause de protection des investissements étaient à l’origine de ces craintes et ces résistances. "L'opinion publique et la société civile sont de plus en plus méfiantes et craignent les effets négatifs d'un accord TTIP", a notamment déclaré le président de la Chambre de commerce américaine auprès de l'UE, Hendrik Bourgeois.
Ainsi que le rapporte également l’Agence Europe, le ministre finlandais, Alexander Stubb a estimé que le Conseil et la Commission sont ainsi confrontés "à des gens qui sont anti-européens, qui sont anti-américains, qui sont anti-libre-échange, qui sont anti-mondialisation et qui sont anti-sociétés multinationales". "Nous avons une bataille difficile pour faire valoir que cet accord de libre-échange est une bonne chose", a-t-il souligné.
Le commissaire européen en charge du Commerce, Karel De Gucht, a estimé que la situation nécessitait le "plein engagement" des Etats membres afin qu’ils expliquent à leurs citoyens "l’importance et les bénéfices de ce futur accord". En conférence de presse, il s’est ainsi félicité du soutien apporté par les ministres eu Commerce à ce sujet, comme on le lit dans un communiqué de la Commission.
Pour le commissaire européen Karel de Gucht, il y a des contre-vérités à dénoncer. "Le débat devrait être fondé sur les faits, et pas seulement sur des spéculations et l’éveil de peurs", clame-t-il. "Nous avons besoin d’expliquer ensemble ce que le TTIP peut signifier pour la personne travaillant dans une petite entreprise comme pour celle travaillant dans une société d’assurances comme pour les nombreux Européens travaillant dans le secteur agricole. Personne n’est mieux qualifié que nos propres gouvernements pour expliquer aux citoyens ce que le TTIP est, ainsi que, et c’est également important, ce que le TTIP n’est pas", a-t-il également déclaré.
Lors de sa rencontre du 18 février 2014, Karel de Gucht s’était d’ailleurs voulu rassurant en déclarant que l’accord de libre-échange entre l'Union européenne et les Etats-Unis (TTIP) ne "doit en aucun cas diminuer nos critères de protection des consommateurs, de l'environnement, des données personnelles et des aliments".
Le 28 février 2014, il a souligné "le besoin de passer à la vitesse supérieure sur tous les points" en négociations dans le TTIP, alors que les estimations les plus optimistes excluent toute conclusion des négociations avant l’année 2015. De même, face aux reproches, il a souligné qu’"il n’y a pas de défaut de transparence du côté européen", a-t-il déclaré.
Le 21 janvier 2014, la Commission européenne avait décidé de lancer une consultation publique sur l’aspect controversé du mécanisme de protection des investissements.
Durant la réunion informelle d’Athènes auquel il était invité, le directeur général de la fédération patronale européenne BUSINESSEUROPE, Markus J. Beyrer, a rappelé que la protection des investissements devait être une priorité en vue de conclure un TTIP "ambitieux", comme l’organisation l’explique dans un communiqué de presse.
"L’investissement joue un rôle stratégique dans les relations économiques entre les USA et l’UE. L’UE a déjà investi plus de 1,42 milliards d’euros aux Etats-Unis. Pour les entreprises européennes, la protection de l’investissement est donc un point critique et c’est pourquoi nous plaidons pour l’introduction d’un mécanisme de règlement des différends entre Etat et investisseurs dans cet accord", a-t-il dit.
Le 28 février 2014, la Confédération européenne des syndicats (CES) a pour sa part publié un communiqué de presse à quelques jours du lancement de la consultation publique au sujet de la protection des investissements. Elle rapporte que des syndicats et organisations américains ont écrit à leur gouvernement afin qu’il suive la voie empruntée par la Commission européenne et qu’ils aient eux aussi l’occasion d’être consultés. Dans ce courrier, ils revendiquent un "processus de consultation ouvert, public et approfondi pour examiner les coûts et bénéfices des politiques de protection des investissement", en vue de "corriger les erreurs du passé".
Les syndicats et ONG américains estiment qu’une consultation publique "sera un pas important vers la création de politiques d’investissement équilibrées qui reflètent les différents besoins et intérêts des vrais gens et de leurs communautés et pas seulement, ceux des grand entreprises".
"La voix disproportionnée accordée aux grandes entreprises dans l’ébauche d’accords commerciaux et d’investissements américains a mené à négocier des accords qui sont devenus un instrument d’adoption par la petite porte d’un programme économique national provoquant le déclin de la demande des consommateurs et la stagnation des salaires", écrivent-ils dans leur courrier.