Principaux portails publics  |     | 

Elections européennes
Le président de l’OGBL, Jean-Claude Reding, exige dans une interview au Quotidien un changement fondamental de la politique européenne et s’en prend à Viviane Reding, qui réagit vivement à ses propos
29-04-2014


Le QuotidienDans une interview donnée le 28 avril 2014 au journal Le Quotidien, le président de l’OGBL, Jean-Claude Reding, a revendiqué un changement fondamental de la politique européenne.

Interrogé par le journaliste Claude Damiani, il a évoqué le questionnaire que son syndicat avait adressé aux différents partis luxembourgeois, afin qu'ils définissent avant les élections européennes leurs positions vis-à-vis des questions posées. Seuls trois partis, le LSAP, Déi Lénk et les Verts  ont selon Jean-Claude Reding approuvé l'intégralité des propositions que 1'OGBL a mises sur la table. Conséquence : l’OGBL va "suivre de près si ces trois formations auront des élus au Parlement européen" pour voir s’ils "appliquent effectivement leurs promesses faites dans le cadre de ce questionnaire". "Mais", précise-t-il, "je ne donne pas de consigne de vote pour l'un de ces trois partis!" Quant aux programmes du DP, du CSV et du KPL, Jean-Claude Reding constate beaucoup de points communs, mais aussi des points de divergence. Ce qui le surprend par contre, c’est qu’il n’y a "pas de parti qui soit ouvertement et clairement pour la politique libérale actuelle". Pour lui, "il s'agit peut-être d'un signe de changement dans la réflexion".

Le président de l’OGBL pense qu’un "changement fondamental de la politique actuellement menée en Europe" est nécessaire, mais craint que les élections européennes "débouchent sur un vote sanction" contre la politique actuelle. Ce vote sanction pourrait être "un vote favorable aux positions nationalistes rétrogrades", ce qu’il regretterait, car lui-même ne croit pas "qu'un retour vers des Etats nationaux avec le rétablissement des frontières nous aidera beaucoup dans le contexte de mondialisation dans lequel nous nous trouvons". Son syndicat soutiendra aux élections européennes "les candidats qui souhaitent une autre politique sociale et économique", mais met en garde contre la tentation d’un vote nationaliste, que ce soit en France ou au Luxembourg.

Reste que l’abstention aux élections européennes, qui touchera davantage d’autres Etats membres que le Luxembourg, où aller voter est obligatoire, et qui est le fruit du "scepticisme envers le monde politique traditionnel", risque de "renforcer la position des partis de droite et d'extrême droite". L’abstention aura par ricochet pour effet majeur d’entraîner les partis de centre-droit à opérer un virage à droite. Jean-Claude Reding cite l’exemple de l’UMP française qui "n'a plus grand-chose à voir avec la politique pro-européenne qui était traditionnellement menée par les partis français. Leur position se "droitise" et cela est également dû à l'échec du Parti socialiste en vue d'inverser la politique sociale et économique au niveau européen."

Jean-Claude Reding s’en prend ensuite à "la politique d'austérité de la Commission européenne Barroso" qui se caractérise depuis 10 ans "par une stagnation, voire une inversion de la politique sociale au niveau de l’UE". Selon lui, "la Commission Barroso n’a pris aucune initiative en vue d’améliorer les dispositions sociales dans les traités européens." De ce bilan, il estime que la vice-présidente de la Commission, Viviane Reding, "par ailleurs candidate aux élections", est "coresponsable et chaque électeur luxembourgeois devra prendre en considération, outre le programme électoral de Mme Reding, son action politique". Il cite les pressions exercées par la Commission européenne sur le Luxembourg "dans les domaines du droit du travail et du social" et les "exigences de Bruxelles quant à l'abolition de l'indexation des salaires et des pensions". Pour lui, "cela porte aussi la signature de Mme Reding!" Et de rappeler dans la même foulée que Jean-Claude Juncker est "le candidat d'un parti européen de droite et de centre droit qui détient actuellement la majorité et qui est donc responsable de la politique qui est menée". Pour lui, Jean-Claude Juncker ne disposerait que de peu de marge de manœuvre politique "par rapport à son propre camp politique s'il était président" et "qu'il serait forcé, par son propre camp, de mener une politique dont il aurait peut-être la conviction personnelle qu'elle n'est pas la bonne".

Le président de l’OGBL estime que "le programme du Parti socialiste européen (PSE) est plus proche des positions syndicales", mais qu’il "reste toujours de grandes divergences", notamment sur le TTIP. La Gauche unitaire européenne et ses députés ont par contre "toujours soutenu, sans ambiguïté, les positions de la Confédération européenne des syndicats (CES)" à laquelle l’OGBL est affilié.

La réaction de Viviane Reding aux propos de Jean-Claude Reding

Les remarques la concernant ont suscité l’ire de Viviane Reding, qui a, comme le rapporte Le Quotidien du 29 avril 2014, "tenu à exercer son droit de réponse en réaction aux affirmations du président de l'OGBL, Jean-Claude Reding."

Elle réagit notamment au reproche que la Commission aurait demandé l'abolition de l'indexation des salaires et des pensions et que "cela porte aussi la signature de Madame Reding!" Pour Viviane Reding, "la Commission n'a pas compétence pour l'abolition de l'indexation", mais a par contre le devoir de faire des ‘recommandations’ au gouvernement pour qu'il réforme son économie dans l'intérêt de la croissance et de l'emploi. Elle se cite elle-même lors de la conférence de presse du 28 mai 2013 uau cours de laquelle elle a présenté ces recommandations : "Nous savons que l'indexation des salaires est la bête noire du Luxembourg. Il importe donc que d'éventuels changements soient discutés et décidés par les partenaires sociaux. La Commission n'a aucune intention de présenter des propositions y afférentes." La balle est donc selon elle dans le camp de Jean-Claude Reding, qui est "un des partenaires sociaux" qu’elle a évoqués.

Viviane Reding réagit également au reproche d’avoir été coresponsable de la politique de la Commission Barroso. Elle revendique pour son bilan, "à part le roaming qui a fait épargner 70 % des frais antérieurs aux consommateurs", la réduction des coûts liés au paiement par carte de crédit, la protection des consommateurs dans le commerce en ligne, les  droits transfrontaliers des citoyens (succession, divorce, circulation des documents), les droits paneuropéens pour les victimes de crime, les droits paneuropéens pour les prévenus et les accusés (droit à la présence d'un avocat, droit à l'information et à la traduction), l‘action pour stopper les gouvernements qui tentaient de limiter la libre circulation des citoyens (France, Grande-Bretagne, Pays-Bas), l’action pour stopper le démantèlement d'un système judiciaire indépendant (Hongrie, Roumanie) et la réforme de la protection des données, qui est pour l’instant bloquée au Conseil.

Viviane Reding pense également que le reproche d’ultralibéralisme adressé par Jean-Claude Reding aux deux Commissions Barroso "est un slogan souvent répété et pourtant archifaux". Viviane Reding écrit : "La Commission est composée de démocrates-chrétiens (dont je suis), de socialistes (!) et de libéraux (minoritaires). Les décisions sont prises collégialement, aucune tendance ne pouvant s'imposer. En matière de politique sociale, les bonnes propositions faites par le commissaire socialiste et acceptées par le collège, sont en règle général entérinées par le Parlement européen et diluées par le Conseil des ministres des affaires sociales. Un autre exemple: ma proposition "roaming' était opposée (sic) par une commissaire libérale et un commissaire socialiste. Finalement, c'est la position de la démocrate-chrétienne luxembourgeoise qui a été suivie, au profit des citoyens!"