Dans le cadre de son initiative visant à moderniser la politique européenne en matière d'aides d'État afin de promouvoir la croissance et la compétitivité dans l’UE, la Commission européenne a adopté, le 13 juin 2014, une communication relative aux projets importants d’intérêt européen commun ou PIEEC.
Prévue pour entrer en vigueur le 1er juillet 2014, cette communication définit les critères qui permettront aux Etats membres, dans le respect des règles de l’UE en matière d’aides d’Etat, de soutenir financièrement des projets transnationaux présentant un intérêt stratégique pour l’UE et pour la réalisation de ses objectifs dans le cadre de la stratégie Europe 2020.
La Commission rappelle en effet qu’en vertu de l’article 107 (paragraphe 3, point b) du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), les aides des États membres destinées à promouvoir la réalisation d’un projet important d’intérêt européen commun sont compatibles avec le marché intérieur. La communication définit donc tout d'abord le champ d'application relatif à ce type d’aides et fournit une liste de critères que la Commission utilisera pour apprécier la nature et l'importance de tels projets aux fins de l'application de l’article précité.
L’objectif de ces nouvelles règles est ainsi "d'encourager les États membres à orienter leurs dépenses publiques vers de grands projets qui apportent une contribution notable à la croissance économique, à l’emploi et à la compétitivité de l’Europe", précise la Commission européenne dans un communiqué de presse. Celle-ci estime que lorsque de telles initiatives ne peuvent être concrétisées au niveau privé "en raison des risques importants et de la coopération transnationale qu'impliquent de tels projets", les États membres peuvent dès lors "combler le déficit de financement pour surmonter ces défaillances du marché et stimuler la réalisation de projets qui, autrement, n'auraient pas pu démarrer", lit-on encore dans le même communiqué.
Les règles régissant le soutien aux projets importants d’intérêt commun fournissent ainsi aux États membres "un outil pour remédier aux défaillances du marché en finançant de grands projets transnationaux d’importance stratégique" a estimé Joaquín Almunia, commissaire européen chargé de la concurrence.
Parmi les principales nouveautés introduites par la communication de la Commission, le champ d’application des dispositions actuelles encadrant les PIEEC sera étendu à tous les secteurs de l’économie alors qu’elles étaient jusqu’à présent limitées aux domaines de la recherche et de l’environnement.
"Les nouvelles dispositions sont neutres quant aux secteurs dans lesquels les PIEEC sont réalisés, ce qui permettra de soutenir beaucoup plus facilement des projets intersectoriels importants qui, dans des domaines tels que la R&D, le transport transfrontaliers et l'énergie, autrement, devraient être appréciés sur la base de plusieurs ensembles de règles disparates", justifie la Commission.
Elles introduisent également une diversification des formes de soutien. Les États membres pourront octroyer aux PIEEC une gamme plus large d’aides publiques qui pourront prendre la forme d’avances remboursables, de prêts, de garanties ou de subventions.
Pour être admissible, l’aide envisagée devra concerner "un projet unique dont les objectifs et les modalités d’exécution, y compris ses participants et son financement, sont clairement définis", précise la communication. Un "projet intégré" – c'est-à-dire un groupe de projets uniques insérés dans une structure, une feuille de route ou un programme commun qui vise le même objectif et se fonde sur une approche systémique cohérente –, pourra néanmoins aussi être jugé admissible par la Commission. Le cas échéant, "toutes les composantes du projet intégré peuvent se rapporter à des niveaux distincts de la chaîne d'approvisionnement, mais doivent être complémentaires et nécessaires à la réalisation d'un objectif européen important", souligne la communication.
Pour ce qui est des critères à l’aune desquels la Commission jugera du caractère d’intérêt européen commun d’un projet, la Commission met en avant plusieurs critères.
Le premier est l’importance du projet. Pour être qualifié de PIIEC, un projet doit avoir une importance quantitative ou qualitative. "Il doit être d'une taille ou d'une ampleur très importante et/ou comporter un niveau de risque technologique ou financier très élevé".
Le projet doit tout d’abord "contribuer d'une manière concrète, claire et identifiable" à un ou plusieurs objectifs de l'Union et "avoir une incidence notable" sur la compétitivité de l'UE et la croissance durable, en relevant des défis sociétaux ou en créant de la valeur dans l'Union.
Il doit ensuite associer plus d'un État membre et comporter un cofinancement du bénéficiaire. Ses bénéfices doivent s'étendre à une partie significative de l'Union et non se limiter aux États membres pourvoyeurs d'un financement, ni aux entreprises ou au secteur concernés. Ils doivent ainsi "trouver une pertinence et une application plus larges dans l'économie ou la société européenne, sous la forme de retombées positives" et ils doivent par ailleurs "être clairement définis d'une manière concrète et identifiable", détaille la communication.
A ces critères généraux s’ajoutent certains "indicateurs positifs généraux", comme par exemple l’existence d’un cofinancement par un fonds de l’UE, en fonction desquels la Commission adoptera une "approche plus favorable".
Pour ce qui est des critères au regard desquels la Commission examinera la compatibilité de ces projets avec les règles en matière d’aides d’Etats, la Commission met d’abord en avant les caractères "nécessaires" et "proportionnels" de l’aide accordée.
La communication précise notamment que l’aide ne peut pas servir à subventionner les coûts d’un projet que l'entreprise aurait de toute façon supportés ni à compenser le risque commercial normal inhérent à une activité économique. "L’aide sera jugée proportionnée uniquement si le même résultat ne peut être obtenu avec une aide moins importante", lit-on dans le texte.
L'État membre doit par ailleurs fournir à la Commission des renseignements utiles concernant le projet financé, ainsi qu'une description complète du scénario contrefactuel, dans lequel aucun État membre n'octroie une aide. "En l'absence de projet alternatif, la Commission vérifiera que le montant de l'aide n'excède pas le minimum nécessaire pour que le projet bénéficiant de l'aide soit suffisamment rentable", détaille la communication.
Par ailleurs, les nouvelles règles prévoient une augmentation de l’intensité de l’aide. Le soutien public pourra ainsi couvrir jusqu’à 100 % du déficit de financement, sur la base d’un large éventail de coûts admissibles, "lorsque cela est justifié" par l’analyse du déficit de financement
La prévention des distorsions indues de la concurrence et le critère de mise en balance formeront un autre critère d’analyse de la Commission. "Pour que l’aide soit compatible avec le marché intérieur, ses effets négatifs en termes de distorsion de la concurrence et d’incidence sur les échanges entre États membres doivent être limités et inférieurs aux effets positifs en matière de contribution à l’objectif d’intérêt européen commun", souligne la communication.
Enfin le dernier critère sera la transparence, les États membres devant veiller à ce qu’une série d’informations soient publiées sur un site internet exhaustif consacré aux aides d'État, au niveau national ou régional.