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Selon les juges de la CJUE un Etat membre peut autoriser les bibliothèques publiques à numériser leurs livres pour les proposer sur des postes de lecture électronique sans l’accord des titulaires de droits
11-09-2014


Dans un arrêt rendu le 11 septembre 2014, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé qu’un Etat membre peut autoriser les bibliothèques à numériser leurs livres pour les proposer sur des postes de lecture électronique bien que les titulaires de droits ne soient pas d’accords. Toutefois, précise la Cour, les utilisateurs ne sont autorisés à imprimer ou à stocker sur une clé USB les livres numérisés par la bibliothèque que dans le cas où la bibliothèque payerait une compensation équitable aux titulaires de droits.books-bibliotheque-source-pixabay-free

Dans la présente affaire la maison d’édition allemande, Eugen Ulmer KG, a mis en accusation l’université technique de Darmstadt (Technische Universität Darmstadt) parce que la bibliothèque de l’université a numérisé un livre édité par Eugen Ulmer (intitulé : "Einführung in die neuere Geschichte", en français : introduction à l’histoire contemporaine) avant de le proposer sur ses postes de lecture électronique. L’offre de la maison d’édition, d’acquérir et d’utiliser ce livre sous forme électronique ("E-book"), a été refusée par l’université auparavant. Par conséquent, Eugen Ulmer cherche à empêcher l’université de numériser le livre en question pour que les usagers de la bibliothèque ne puissent pas l’imprimer ou le stocker sur une clé USB et qu’ensuite ils ne puissent pas emporter ces reproductions hors de la bibliothèque.

Pour mémoire, la directive sur le droit d’auteur prévoit que les auteurs ont le droit exclusif d’autoriser la reproduction et la communication au public de leurs œuvres mais les Etats membres ont toutefois la possibilité de prévoir certaines exceptions ou limitations à ce droit quand il s’agit par exemple des bibliothèques accessibles au public, qui mettent quelques œuvres de leur collection à la disposition des utilisateurs au moyen de terminaux spécialisés.

Saisi du litige en appel, le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice d’Allemagne) a demandé à la Cour de Justice de préciser la portée de cette faculté concernant  la directive sur le droit d’auteur dont l’université allemande a fait usage.

La Cour déclare notamment que la directive sur le droit d’auteur ne s’oppose pas à ce que les États membres accordent aux bibliothèques le droit de numériser les œuvres de leur collection et de mettre ces œuvres à la disposition des membres au moyen de terminaux spécialisés, lorsqu’il s’avère nécessaire, à des fins de recherches ou d’études privées, de mettre ces œuvres à la disposition. Le droit des bibliothèques de communiquer leurs œuvres au moyen de tels terminaux spécialisés, risquerait d’être vidé d’une grande partie de sa substance et de son efficacité si les bibliothèques ne disposaient pas du droit de les numériser, poursuit la Cour.

Néanmoins, la Cour ajoute que ce droit de communication accordé aux bibliothèques publiques ne saurait permettre aux particuliers d’imprimer les œuvres mises à leur disposition sur papier ni de les stocker sur une clé USB parce qu’il s’agit d’un acte de reproduction. Vu que de telles reproductions ne sont pas nécessaires à la communication de l’œuvre aux usagers au moyen de terminaux spécialisés, ils ne sont donc pas couverts par le droit de communication au moyen de terminaux spécialisés. La Cour conclut que les États membres peuvent quand-même prévoir une exception ou une limitation au droit exclusif de la reproduction des titulaires de droits et permettre ainsi aux utilisateurs d’une bibliothèque d’imprimer les œuvres sur papier ou de les stocker sur une clé USB, à condition toutefois que les limites et les conditions fixées par la directive soient respectées et que la bibliothèque garantisse une compensation au titulaire de droits.