A l’occasion de la journée européenne de la lutte contre la traite des êtres humains, a Commission européenne a publié le 17 octobre 2014 un rapport d’Eurostat rassemblant des données sur les victimes et les trafiquants. Entre 2010 et 2012, près de 30 000 personnes ont été victimes de la traite des êtres humains, dont 80 % de femmes et plus de 1000 enfants victimes d’exploitation sexuelle. Cette publication s’accompagne d’un rapport à mi-parcours sur la stratégie de l’UE en vue de l’éradication de la traite des êtres humains pour la période 2012-2016, qui résume les efforts de l’Union de mieux coordonner les actions des Etats membres. La traite des êtres humains "implique des pratiques cruelles, telles que l’exploitation et la tromperie de personnes vulnérables, ainsi que l’usage de la violence, de menaces, de la servitude pour dettes et de la contrainte", elon la directive 2011/36/UE concernant la prévention et la lutte contre le trafic des êtres humains.
La commissaire Cecilia Malmström a souligné lors d’une conférence de presse l’importance de la directive mentionnée ci-dessus. Elle a exhorté l’Allemagne et la Belgique, les deux Etats qui n’ont pas encore notifié la transposition de la directive, de le faire, tout en rappelant que le délai de notification avait été en avril 2013.
Dans son communiqué, la Commission déplore le fait que "la possibilité de délivrer des titres de séjour provisoires aux victimes non ressortissantes de l’UE est actuellement sous-utilisée", en référence à la directive 2004/81/CE qui réglemente l'octroi d'un permis de séjour aux victimes de la traite des êtres humains non ressortissantes de l'UE coopérant avec les autorités dans le cadre d'enquêtes ou de procédures judiciaires contre des trafiquants. En 2012, seuls 1 124 premiers titres de séjour ont été accordés dans l'UE à des victimes coopérant avec les autorités, alors que la même année, 2 171 ressortissants de pays tiers ont été enregistrés dans 23 États membres comme victimes de la traite des êtres humains, note la Commission. La pratique des Etats membres à protéger les victimes en délivrant des titres des séjours a été analysée dans une communication distincte.
Selon Eurostat, près de 30 000 personnes ont été victimes de la traite des êtres humains entre 2010 et 2012, dont 80 % de femmes et plus de 1000 enfants victimes d’exploitation sexuelle. Le rapport rassemble des statistiques de 22 Etats membres qui ont fourni des données sur trois ans. Selon la Commission, il s'agit de la seule collecte à l'échelle de l'UE de données statistiques sur la traite des êtres humains. Deux tiers des victimes étaient issus de l’Union européenne. Plus de deux tiers (69 %) étaient victimes d’exploitation sexuelle et la grande majorité (95 %) de ces victimes étaient des femmes. 19 % étaient des victimes à des fins d’exploitation du travail, dont 71 % d’hommes. 12 % étaient victimes d’activités criminelles, du don forcé d’organes ou de la vente d’enfants.
Quant au nombre absolu, les cinq nationalités européennes les plus importantes étaient la Roumanie (6 101 personnes), la Bulgarie (3 043), les Pays-Bas (1 080), la Hongrie (1 046) et la Pologne (976). A noter que le nombre d’habitants en Roumanie est le double de celui en Bulgarie. Par rapport à la population du pays d’origine, les Bulgares, les Roumains et les Lettons étaient le plus susceptibles de devenir victimes. Tandis que toutes les victimes néerlandaises étaient enregistrées aux Pays-Bas, la probabilité d’être enregistrées hors du pays d’origine était beaucoup plus élevée pour les victimes roumaines, bulgares, hongroises, lituaniennes et slovaques et tchèques, souligne le rapport.
A titre d’exemple, presque la moitié des victimes roumaines étaient enregistrées en dehors de la Roumanie, notamment en France, en Allemagne, en Italie, au Royaume-Uni et en Espagne où leur nombre dépassait 400. Le Royaume-Uni est d’ailleurs le pays où la plupart des victimes polonaises, slovaques, lettones et lituaniennes sont enregistrées. Avec 2 138 victimes enregistrées sur son territoire, le Royaume-Uni se situe à la troisième position derrière la Roumanie (3 233) et les Pays-Bas (2 476) et devant la Bulgarie (1 700), l’Allemagne (1 626) et la France (1 153). En France, les Français représentaient la nationalité la plus importante (476), suivie des Roumains (427) et des Bulgares (167). En Allemagne, c’étaient les Roumains (434), suivis des Allemands (389) et des Bulgares (370). En Italie, les victimes sont avant tout roumaines (472) et bulgares (50), sur un total de 522.
Quant au tiers de victimes de nationalité non européenne, les cinq pays d’origine les plus importants sont le Nigéria (1 322), le Brésil (537), la Chine (504), le Vietnam (316) et la Russie (245). Les victimes nigérianes étaient le plus souvent enregistrées aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en France, tandis que les victimes brésiliennes l’étaient en Espagne. Les victimes chinoises étaient surtout enregistrées en Espagne et en France.
Sur les 8 551 trafiquants, deux tiers étaient des hommes et issus de l’Union européenne. Le rapport note que ces données sont à traiter avec précaution, faute de données de tous les Etats membres. Les cinq pays européens les plus importants dont étaient issus les trafiquants sont la Bulgarie, la Roumanie, la Belgique, l’Allemagne et l’Espagne. En Italie, seulement 15% des trafiquants étaient de nationalité italienne. Entre 2010 et 2012, il y a eu 3 786 condamnations, dont la moitié en France et en Roumanie où le nombre a doublé, selon Eurostat.