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Audition des commissaires désignés au Parlement européen – Candidat aux Affaires économiques, Pierre Moscovici se voit reprocher de ne pas avoir réussi à réduire le déficit public de la France en tant que ministre des Finances
02-10-2014


Pierre Moscovici, candidat au poste de commissaire en charge des Affaires économiques, lors de son audition au Parlement européen (Source: PE)Désigné pour le poste de commissaire aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, ancien ministre des Finances, a eu une audition difficile devant la commission des affaires économiques le 2 octobre 2014 et doit répondre "par écrit" à de nouvelles questions. Les députés lui ont reproché le fait qu’il n’a pas réussi à réduire le déficit public de la France qui est resté au-dessus de la limite européenne de 3 %.

Né le 16 septembre 1957 à Paris, Pierre Moscovici rejoint le Parti socialiste en 1984 quand il sort de l’Ecole nationale de l’Administration (ENA) et commence à travailler à la Cour des comptes. Diplômé d’une maîtrise en économie et en sciences politiques, Pierre Moscovici est conseiller général du Doubs entre 1994 et 2002 où il est également élu député en 1997. La même année, Lionel Jospin le nomme ministre chargé des Affaires européennes – poste qu’il occupe jusqu’en 2002. Entre 1994 et 1997 et entre 2004 et 2007, il est député européen, ainsi que vice-président du Parlement européen durant son deuxième mandat. Il devient ensuite député à l’Assemblée nationale. Entre 2012 et avril 2014, il est ministre de l’Economie et des Finances. Il a écrit de nombreux ouvrages sur la France, comme "Combats – Pour que la France s’en sorte" (2013).

Pierre Moscovici s’engage à appliquer les règles du pacte de stabilité

Durant son audition, Pierre Moscovici a tenté de convaincre les députés de sa volonté d’appliquer les règles du pacte de stabilité et de protéger la crédibilité et l'intégrité du pacte, comme il l’a détaillé dans ses réponses écrites désignées aux députés. "Je le redis, je le redirai encore, je suis là pour faire respecter les règles, assurer la crédibilité des règles, pas là pour les modifier de façon créative, pour défendre je ne sais quelle dérogation, quelle exception, quelle suspension", a-t-il martelé. Il a rappelé qu’il a "réduit les déficits en France", passés de plus de 5 % quand il a pris ses fonctions à 4,1 % fin 2013, et a assuré que la France n'avait pas bénéficié de traitement de faveur en obtenant deux ans de plus pour réduire son déficit. Il a promis qu'il ne serait ni "l'avocat, ni le procureur de la France". S'il est confirmé à son poste, Pierre Moscovici devra présenter les nouvelles prévisions économiques de la Commission début novembre et délivrer son tout premier diagnostic sur l'économie française.

Interrogé sur sa conception de la flexibilité du pacte, Pierre Moscovici a refusé toute modification : La flexibilité, ce n'est "pas une interprétation ébouriffée des règles", a-t-il dit. Néanmoins, selon lui, "le système n'est pas rigide", car il prend en compte la situation spécifique des États et, surtout, il focalise son analyse sur l'"effort structurel", estime-t-il, selon l’Agence Europe.

Reprenant une formule chère à son prédécesseur Olli Rehn, il a affirmé que les "règles ne sont pas stupides, elles prennent en compte la situation économique" et les circonstances exceptionnelles. "Un pays, fût-ce la France, doit respecter les règles, et mon rôle c'est de faire respecter ces règles et c'est ce que je ferai", a-t-il affirmé, rappelant que "l’Allemagne a mis dix ans pour se réformer". Il a également annoncé sa volonté d’œuvrer en faveur de la taxe sur les transactions financières (TTF), qui peut, selon lui, contribuer à réduire le risque systémique et, partant, à prévenir les nouvelles crises.

Il a estimé que le travail de la troïka est "nécessaire", mais qu’il faudra accroître la "légitimité démocratique" de ces représentants de la Commission européenne, de la BCE et du FMI.

Quant aux recommandations économiques que la Commission européenne adresse aux Etats membres, Pierre Moscovici a affirmé que sa mission est "d’accroître leur respect". Il estime que la mise en œuvre insuffisante des recommandations est l’une des faiblesses du cadre de coordination des politiques économiques au niveau européen.

Pierre Moscovici a par ailleurs déclaré que les eurobonds ne sont pas d'actualité pendant ce mandat alors que la France avait longtemps plaidé pour cette idée de mutualiser une part des dettes des Etats membres de la zone euro.

Les députés demandent des éclaircissements

Ses promesses n'ont pas suffi à convaincre les députés. "Comment être certains que vous serez le braconnier devenu garde-chasse ?", lui a lancé la députée néerlandaise Sophie In't Veld (libérale). Nous voulons des "éclaircissements" sur "sa crédibilité pour la mise en œuvre du pacte de stabilité, et sur la répartition des compétences" avec les vice-présidents en charge des questions économiques, a expliqué la députée libérale française Sylvie Goulard. Pour le député français UMP Alain Lamassoure, la nomination de Pierre Moscovici suscite un "malaise" après son "échec" en tant que ministre des Finances.

Dans la soirée suivant l’audition, la commission des affaires économiques du Parlement a demandé au candidat français de répondre "par écrit" en quelques jours à de nouvelles questions. L’audition de l’ancien ministre de l’Economie et des Finances est tombée à un moment critique, au lendemain de la présentation du projet de budget français pour 2015 qui prévoit un déficit public à 4,3 % du PIB après 4,4 % cette année. Ce qui est loin des 3 % auxquels la France s'était engagée pour 2015.

"Moscovici est difficilement crédible", a réagi le PPE sur son site, demandant un "Monsieur Stabilité, pas un Monsieur Flexibilité". Le groupe reproche au Français qu’il n’a pas réussi à convaincre son propre gouvernement d’appliquer les règles du pacte de stabilité et se demande "comment il sera capable de convaincre 28 Etats membres ?"

Pour le groupe S&D, dont fait partie le candidat, Pierre Moscovici sera un "excellent commissaire" qui a donné "la meilleure performance que nous avons vue", selon les propos de la députée Elisa Ferreira.

L’eurodéputée luxembourgeoise Mady Delvaux (S&D) a regretté pour sa part "qu’un thème récurrent ait dominé, pour ne pas dire envenimé, l’audition, celui de sa nationalité française et de son passé de ministre des finances en France, alors que la France présente un budget à déficit élevé", ajoutant "qu’au moins par dix fois différents députés lui ont donné à comprendre qu’il n’avait aucune crédibilité en tant que commissaire vis-à-vis de la France, mais aussi par rapport aux ministres des finances d’autres pays".

Pour le Vert Sven Giegold, Pierre Moscovici n’a pas réussi à faire avancer la taxe sur les transactions financières, mais l’a plutôt "affaiblie". Tout de même, il estime que le Français est "un Européen convaincu et engagé" qui sera un "contre-pouvoir" vis-à-vis des deux vice-présidents PPE avec lesquels il devra se concerter : Valdis Dombrovskis, vice-président en charge de l’euro et du dialogue social et Jyrki Katainen, vice-président chargé de l'emploi, de la croissance, de l'investissement et de la compétitivité.