La croissance économique du Luxembourg tend à se renforcer mais elle demeure volatile, constate le Statec dans son dernier flash sur la conjoncture luxembourgeoise publié le 28 janvier 2015.
Dans ce bulletin mensuel consacré à l’état de la conjoncture luxembourgeoise, l’institut national de statistiques du Grand-Duché relève ainsi que la croissance du PIB en volume s'est révélée particulièrement soutenue au 3e trimestre 2014, cela "sous l'influence notable de la contribution des activités financières". La révision à la baisse de la performance des services non financiers au cours de la même période vient cependant "ternir cette bonne nouvelle" note le Statec, qui retient qu’une trajectoire de croissance proche de 3 % se confirme pour 2014.
Dans le détail, le PIB en volume a enregistré une progression de 2,3 % au 3e trimestre 2014 par rapport au trimestre précédent, tandis qu’il a cru de 3,8 % sur un an. Si le Statec juge ce résultat, "très satisfaisant de prime abord", l’institut note qu’il est "tempéré" par une révision à la baisse nette de la croissance pour les deux trimestres précédents, soit +1 % au 1er trimestre 2014 (contre +1,7 % dans la version précédente) et +0,5 % au deuxième trimestre (contre +0,7 % auparavant).
Selon le Statec, le "point marquant" des résultats du 3e trimestre 2014 est constitué par la nette remontée de la valeur ajoutée du secteur financier, avec presque 7 % de hausse par rapport au 2e trimestre. Cela grâce à l’élan positif dont ont bénéficié, "une fois n'est pas coutume", les trois principales composantes du secteur – intermédiation financière (essentiellement les banques), activités d'assurance et auxiliaires du secteur financier. L’institut luxembourgeois juge toutefois "prématuré" de conclure à un véritable retournement à la hausse de la tendance qui est orientée à la baisse depuis le début de 2010, et ce d'autant plus que les premières estimations des résultats bancaires du 4e trimestre 2014 "envoient plutôt un signal négatif".
Cette "bonne surprise", selon le Statec, est d’ailleurs contrebalancée par la révision à la baisse – sur base d'informations statistiques nouvellement disponibles – de la valeur ajoutée des activités de services aux entreprises. "Cette dernière montre cependant encore un profil relativement favorable sur l'ensemble des 9 premiers mois de l'année écoulée", écrit le Statec, bien que "bien moins dynamique que dans la précédente version des comptes". Les exportations de services non financiers ont en conséquence également été revues à la baisse.
Pour ce qui est de l’investissement, qui avait "largement dévissé au 2e trimestre", le Statec note qu’il "rebondit nettement, mais seulement en réaction avec la hausse des dépenses concernant les avions et les satellites". Or, "si l'on excepte cette catégorie spécifique, très volatile, l'investissement se replie au 3e trimestre", note l’institut, qui précise que ce recul n’est pas assez important pour remettre en cause la tendance de reprise engagée depuis 2013.
La consommation des ménages a pour sa part augmenté relativement modestement (+0,2 % sur un trimestre, contre +1 % au trimestre précédent), relève l’institut statistique. Elle reste soutenue par les achats de véhicules particuliers et les dépenses de location immobilière.
L'acquis de croissance pour 2014, c'est-à-dire la variation annuelle du PIB en volume que l'on obtiendra pour l'ensemble de l'année si le PIB du 4e reste identique à celui du 3e trimestre (et si aucune révision n'affecte les trimestres déjà comptabilisés), s'élève à 2,9 %, souligne ainsi le Statec. Pour le 4e trimestre justement, l’institut relève que les indicateurs de confiance tirés des enquêtes de conjoncture (dans l'industrie, la construction et les services) montrent globalement des niveaux proches de ceux du 3e trimestre, "ce qui n'indiquerait aucun ralentissement ni aucune accélération significatifs de la dynamique économique". La volatilité élevée du PIB au cours des derniers trimestres et la très forte croissance du 3e trimestre en particulier "suggèrent néanmoins la possibilité d'un contrecoup à la baisse", note le Statec. Dès lors, "l'éventualité d'une croissance légèrement inférieure à 3 % sur l'ensemble de 2014 reste de mise".
Les prix de vente des logements au Luxembourg ont affiché au 3e trimestre 2014 une hausse de quelque 5 % sur un an. "Après une certaine modération au croisement de 2013 et 2014, les hausses de prix ont renoué avec un rythme plus soutenu et plus en ligne avec la moyenne relevée de 2010 à 2013", analyse le Statec. Ce redressement concerne d’ailleurs tant les prix du neuf et de l'ancien, signe que "la demande en logements est bien là". La construction résidentielle devrait profiter de la remontée des autorisations de bâtir délivrées en 2014 (+6,6 % sur un an au cours des 9 premiers mois, en termes de volume à bâtir), estime encore l’institut.
Les ventes au détail ont montré peu de dynamisme sur la première partie de 2014, mais la fin d'année pourrait s'avérer meilleure, selon le Statec. Le chiffre d'affaires en volume du commerce de détail (hors vente par correspondance et donc e-commerce) affiche en effet une progression de 2,4 % sur un an en octobre (après +0,8 % en septembre). Si aucune remontée significative de la confiance des consommateurs n'est à relever sur la fin de 2014, les professionnels du commerce de détail tendent en revanche à être plus optimistes depuis septembre, relève l’institut.
Le Statec souligne par ailleurs la possibilité, dans le contexte de la hausse de la TVA en janvier 2015, d’une tendance chez les consommateurs à avancer certaines dépenses. La publication des immatriculations de décembre (+42 % sur un an pour les voitures neuves) semble notamment mettre en évidence un phénomène de cette nature concernant les ventes de voitures.
Pour ce qui est du secteur financier, le Statec relève que, selon l'évaluation de la CSSF, le résultat avant provisions des établissements de crédits note un recul de 2 % sur un an sur l'ensemble de l'année 2014. Par rapport aux données diffusées à l'issue de septembre 2014, le 4e trimestre est marqué par un très net repli de la marge d'intérêt ainsi que des revenus non-récurrents sur un an, tandis que les revenus de commissions affichent une remontée sensible. "Dans l'ensemble, c'est plutôt un signal négatif qui ressort de ces données préliminaires".
Les OPC ont quant à eux enregistré moins d'émissions nettes au cours du 4e trimestre (par rapport au 3e trimestre) et ont moins bénéficié d'effets de valorisation liés aux évolutions de marchés. L'année 2014 restera néanmoins comme une année très satisfaisante pour l'industrie des fonds, avec une progression des actifs nets de plus de 13 % (après déjà +12 % en 2013), analyse le Statec.
En décembre 2014, le chômage poursuit sa lente décrue entamée depuis l'été et atteint 7 % de la population active, lit-on dans le bulletin du Statec. Si la baisse du chômage enregistrée durant l’été a été soutenue par une hausse des emplois aidés, celle plus récente "est généralisée", note l’institut, qui relève que la part de l'ensemble des demandeurs d'emploi dans la population active – y compris les personnes bénéficiaires de mesures pour l’emploi – baisse sur les 3 derniers mois pour s'établir à 9 % en décembre 2014.
Selon le Statec, cette baisse peut être mise en lien avec une activité plus soutenue dans la construction depuis l'été et la reprise de l'emploi intérimaire, qui est très répandu dans la construction (plus d'un tiers des intérimaires travaille dans ce secteur). Celle-ci s'observe ainsi surtout pour les hommes, avec une formation de niveau inférieur, âgés de 30 à 39 ans, de nationalité portugaise, ayant travaillé en tant qu'intérimaire et ayant été indemnisé par l’ADEM.
Pour ce qui est de l’inflation, l’institut statistique note une évolution négative de -0,6 % sur un an, une première depuis 2009. Une baisse largement influencée par la dégringolade du cours du baril de Brent, comme lors de la crise financière, ce qui allège la facture énergétique de 11% par rapport à décembre 2013. Le Statec relève cependant qu’à la différence de l’été 2009, où l’inflation sous-jacente se maintenait autour des 2 % sur un an, ce taux ne s’élève plus qu’à 0,5 % en décembre 2014. "Ceci confirme le constat de la désinflation généralisée fait sur l’ensemble de l’année" qui cite l’exemple des prix alimentaires qui restent en dessous de leur niveau de fin 2013 et contribuent à raison de 0,1 point de % à la baisse sur l’indice général en décembre.
Sur l’ensemble de l’année 2014, l’inflation se chiffre à seulement 0,6 %, contre 1,7 % en 2013. Si en 2015, la hausse du taux normal de TVA de 2 points de pourcentage depuis le 1er janvier renforcera l’inflation, le Statec souligne qu’il reste à voir dans quelle mesure, sachant que cette hausse pourrait être retardée ou partiellement absorbée par les producteurs.
Selon les chiffres disponibles à la fin de l’année, les recettes fiscales se sont accrues de 5,5 % en 2014 par rapport à l’année précédente, soit un gain de 700 millions d’euros pour les caisses de l’Etat, indique le Statec. À cette croissance concourent notamment les impôts sur le revenu des personnes physiques (contribution de 47 %) et les impôts sur les produits (43 %) alors que les impôts sur le revenu ou le bénéfice des sociétés affichent une légère contribution négative (-2 %). En 2013, les recettes avaient progressé de 7 % par rapport à l’année précédente.
Dans ce contexte, l’institut estime que la hausse de la TVA au 1er janvier 2015 a probablement généré des recettes anticipées sur la fin de 2014. Ainsi, l’accélération de la vente de biens immobiliers en décembre fait augmenter les recettes provenant des droits d’enregistrement de 89 % par rapport à décembre 2013 (+34 % sur l’ensemble de l’année). Les accises liées au tabac se sont également accrues de façon significative en décembre avec un plus de 140 % par rapport à décembre 2013 (+15 % sur l’ensemble de l’année). À l’inverse, les impôts provenant des droits d’accises sur les huiles minérales ont diminué de 3 % en 2014.
Dans son bulletin, le Statec revient enfin sur le programme d’assouplissement quantitatif annoncé par la Banque centrale européenne (BCE) qui implique des rachats massifs de dettes publiques et privées à hauteur de plus de 1 100 milliards d’euros. Dans ce contexte, le Statec rappelle que les rachats de dettes publiques (obligatoirement sur les marchés secondaires), seront principalement exécutés par les banques centrales nationales qui porteront également la majorité du risque (80 % contre 20 % mutualisé par la BCE) lié à leurs propres obligations d’État.
"Ainsi, la Banque centrale luxembourgeoise est appelée à devenir active sur les marchés secondaires pour racheter la dette publique luxembourgeoise", indique l’institut, qui précise que "comme cette dernière est limitée et que le programme de la BCE stipule notamment que les banques centrales ne peuvent acquérir plus que 33 % de la dette souveraine, la BCL rachètera probablement des dettes d’institutions européennes pour remplir son quota mensuel".