A compter du 15 février 2016, les députés luxembourgeois auront accès aux documents de négociation du Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP) dans une salle de lecture mise à disposition au Ministère des Affaires étrangères. C’est ce qu’annonçait Jean Asselborn dans sa réponse à une question parlementaire de Marc Angel (LSAP) à la fin du mois de janvier.
Ce fut aussi la date choisie par la plateforme Stop TTIP, qui milite depuis plusieurs années pour plus de transparence dans les négociations, pour organiser un piquet devant le Ministère et tenir un point de presse. Dans un communiqué diffusé à l’issue de cette manifestation, cette coalition d’organisations de la société civile dénonce "les conditions très restrictives" dans l’accès aux documents et "la muselière" imposées aux députés. A leurs yeux, il s’agit d’une "farce du point de vue démocratique" alors qu’un "débat public transparent reste toujours impossible". "A moins que les députés refusent de s’adonner à ce jeu", précisent-ils en leur lançant un appel à la "désobéissance civile en divulguant les éléments essentiels des textes".
Une séance d’information pour les députés est prévue le 16 février 2016, et la sensibilité politique déi Lénk a demandé à ce qu’elle soit publique.
Dans leur communiqué, les militants de Stop TTIP rappellent que le compromis trouvé entre les négociateurs pour permettre un accès aux documents prévoit de les classer "restreint UE", ce qui soumet leur accès à des règles de sécurité qui ont été fixées par le Conseil le 23 septembre 2013. Les opposants au TTIP expliquent que ces règles spécifient que "ces documents ne peuvent être étudiés que par les responsables politiques et les fonctionnaires de la Commission européenne, des gouvernements ou des parlements nationaux", sans qu’ils n’aient "le droit ni de copier des textes, ni de publier les contenus, ni de communiquer leurs observations". "Une publication entraînerait des poursuites juridiques et disciplinaires", est-il encore détaillé dans le communiqué.
Quant à l’accord trouvé entre l’UE et les Etats-Unis sur l’accès aux documents de négociation du TTIP, il prévoit l’accès aux textes dans une chambre de lecture, en sachant que la mise en œuvre de cette décision est définie par les gouvernements. Au Luxembourg, le Ministère des Affaires étrangères est chargé de l’application de ces conditions, ainsi que l’expliquait Jean Asselborn en réponse au député Marc Angel.
Selon les militants de Stop TTIP, l’utilisation d’appareils électroniques, comme les téléphones mobiles, devrait être interdite et les parlementaires ne pourront pas non plus utiliser des programmes électroniques de traduction. Les députés, qui ne peuvent pas se faire accompagner par leurs attachés ou par des spécialistes du droit du commerce international, se verraient seulement mettre à disposition des feuilles et des crayons, rapportent les membres de la plateforme. D’après leurs informations, les députés luxembourgeois auront la possibilité d’étudier les textes au-delà de deux heures, alors que les membres du Bundestag ne peuvent rester plus longtemps en salle de lecture et y sont surveillés de près par des employés du ministère allemand.
Les représentants de la plateforme Stop TTIP dénoncent par conséquent une "forme de transparence amputée". Et ils se demandent comment les députés pourront travailler sérieusement dans ces conditions, sans même pouvoir se faire accompagner par des spécialistes alors que la matière est complexe. En imposant le secret sur les documents consolidés, toute discussion démocratique est rendue impossible, déplorent-ils enfin.