L'échec à ce jour du système d'asile européen face au nombre croissant d'arrivées de migrants demande une réforme radicale des règles dites de Dublin, ont affirmé les députés de la commission des libertés civiles (LIBE) le 16 mars 2016. Ils proposent de créer un système central pour rassembler et répartir les demandes d'asile. Le système, qui pourrait inclure un quota pour chaque pays de l'UE, fonctionnerait sur base de points d'accès (hotspots) à partir desquels les réfugiés seraient répartis.
Le rapport d'initiative, donc non législatif, présenté en commission parlementaire, expose la proposition de révision du règlement de Dublin III qui détermine quel État membre est responsable du traitement d'une demande d'asile. Le texte, rédigé par Roberta Metsola (PPE, MT) et Kashetu Kyenge( S&D, IT), a été adopté par 44 voix pour, 11 voix contre et une abstention.
"La situation est extrêmement grave. En 2015, 3771 personnes se sont noyées dans nos mers. Cette année, plus de 450 autres, dont 77 enfants, y ont déjà perdu la vie. En tant que responsables politiques, nous avons le devoir de garantir que ces victimes ne soient pas seulement des statistiques anonymes. Il s'agit de véritables êtres humains. Nous devons tous faire mieux, l'indifférence n'est pas une option. Il est temps d'agir sur tous les fronts et c'est ce que demande ce rapport", a déclaré Roberta Metsola.
"L'Europe a besoin d'une approche migratoire globale, basée sur le principe de la solidarité entre les États. Une gestion globale est nécessaire pour mettre en œuvre le principe de solidarité entre les pays, partager de façon équitable les responsabilités et placer les valeurs de vie et de droits fondamentaux au cœur du processus", a ajouté Kashetu Kyenge.
Le texte souligne que le système d'asile actuel ne tient pas correctement compte des pressions migratoires particulières auxquelles sont confrontés les États membres aux frontières extérieures de l'UE. Les députés demandent des changements pour garantir l'équité, la responsabilité partagée, la solidarité et le traitement rapide des demandes.
En 2015, selon le texte, 1,83 million de personnes ont été appréhendées alors qu'elles tentaient de franchir clandestinement les frontières extérieures de l'Union (contre 282 500 en 2014) et 1,4 million de demandes de protection internationale ont été introduites dans l'UE, en Norvège et en Suisse, avec des chiffres en constante augmentation depuis avril.
Le texte invite les États membres à respecter leurs obligations concernant les mesures de relocalisation d'urgence. Ils soulignant qu'à la date du 3 mars 2016, seuls 660 demandeurs d'asile sur 106 000 qui attendaient d'être relocalisés depuis l'Italie et la Grèce vers d'autres pays de l'UE l'ont réellement été.
En matière de réinstallation, les députés précisent que l'UE a besoin d'"un dispositif législatif contraignant et obligatoire", ajoutant que pour avoir un impact, cette approche doit prévoir la réinstallation d'un nombre "significatif" de réfugiés par rapport au nombre total de demandeurs d'asile dans l'Union.
Sur le fonctionnement des points d'accès ("hotspots"), la commission LIBE demande qu'une aide technique et financière soit octroyée aux États membres de première arrivée, comme l'Italie et la Grèce, afin de leur permettre d'enregistrer tous les migrants. Elle appelle par ailleurs les pays concernés à accepter cette aide.
De plus, les députés attirent l'attention sur la position vulnérable des mineurs, en particulier ceux voyageant seuls, et souhaitent un système de protection en faveur des enfants afin d'empêcher abus et exploitation.
Dans le rapport, les députés s'inquiètent de la décision de certains États membres de fermer leurs frontières intérieures ou d'introduire des contrôles temporaires, étant donné que ces mesures mettent en question le bon fonctionnement de l'espace Schengen.
Les députés préconisent des accords de "réadmission" à l'échelle européenne qui, selon eux, devraient passer avant les accords bilatéraux entre États membres et pays tiers. Ils insistent sur le fait que le retour de migrants devrait uniquement être effectué si le pays dans lequel ils sont renvoyés est sûr pour eux.
Le vote en plénière sur ce rapport d’initiative est prévu le 13 avril lors de la prochaine session à Strasbourg.