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Agriculture, Viticulture et Développement rural - Environnement
Glyphosate – Le Parlement européen vote pour son autorisation pour sept ans et à des fins uniquement professionnelles
13-04-2016


Lglyphosate-epandage-herbicides-creative commonse glyphosate est un herbicide utilisé dans de nombreux outils agricoles et de jardinage. Des inquiétudes  subsistent quant à son caractère cancérigène et de perturbateur endocrinien. C'est pour cette raison que le Parlement a demandé dans une résolution non contraignante votée en plénière le 13 avril 2016 avec 374 voix pour, 225 voix contre et 102 abstentions, à la Commission de ne renouveler son autorisation sur le marché que pour une période de sept ans uniquement, au lieu des quinze proposés, et ce seulement à des fins professionnelles.

Les députés demandent une étude indépendante et la publication de toutes les preuves scientifiques utilisées par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) pour évaluer le glyphosate.

De plus, la Commission ne devrait pas autoriser les usages non professionnels de la substance.

Elle devrait par ailleurs réévaluer son approbation au vu de la classification en cours du glyphosate par l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA), dans le cadre d'une législation distincte, ajoutent les députés.

La résolution invite l'exécutif européen à présenter un nouveau projet qui soit plus attentif à l'utilisation durable d'herbicides contenant du glyphosate et à lancer une étude indépendante de la toxicité globale et de la classification du glyphosate sur base de toutes les données scientifiques disponibles quant à sa cancérogénicité et à ses éventuels effets perturbateurs du système endocrinien.

Publier les preuves scientifiques

Les députés souhaitent que la Commission européenne et l'Autorité européenne de sécurité des aliments divulguent "sans délai toutes les données scientifiques qui ont servi à motiver la classification positive du glyphosate et le renouvellement de son approbation, car cette divulgation répond à un intérêt public supérieur".

La pratique du "green burndown" inacceptable

Les députés condamnent l'utilisation inacceptable du glyphosate dans une pratique agricole connue sous le nom de "green burndown", c'est-à-dire l'action de tuer la plante cultivée préalablement à la récolte afin d'accélérer la maturation et de faciliter la récolte. Cette pratique entraîne notamment une exposition accrue pour l'homme.

Le glyphosate ne devrait pas être approuvé dans les parcs publics, les plaines de jeux et les jardins publics, ou à proximité de ceux-ci, précisent les députés.

Une défaite pour les partisans de l’interdiction du glyphosate

Il faut savoir que le texte initial de la résolution demandait à la Commission de ne pas renouveler du tout l'approbation du glyphosate.  Mais les députés ont finalement adopté un amendement qui propose de limiter l’autorisation du glyphosate à 7 ans. L’amendement a été présenté par le Parti populaire européen (PPE), et plus particulièrement par la députée française Angélique Delahaye, ancienne présidente du syndicat national agricole et ancienne présidente de la fédération nationale des producteurs de légumes de France, pour qui "il y a une attente des citoyens mais à ce jour, il n'y a pas d'alternative économiquement viable et garantissant la santé humaine à proposer aux agriculteurs en terme de désherbage".

La Commission est, de son côté, pour un renouvellement de l’autorisation pour 15 ans, ce suite à l'avis donné en novembre 2015 par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), qui a jugé "improbable" le risque cancérogène du glyphosate, alors que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a à l'inverse déclaré la substance cancérogène "probable".

Le 8 mars 2016, un comité d'experts représentant les Etats membres devait se prononcer sur le renouvellement de l'autorisation du glyphosate mais le vote n'a finalement pas eu lieu, alors que plusieurs pays européens avaient annoncé leur intention de voter "non" et qu’aucune majorité ne se profilait. Le comité doit à nouveau se réunir les 18 et 19 mai.

Le vote des eurodéputés luxembourgeois

L’eurodéputé vert luxembourgeois Claude Turmes, qui a voté contre la résolution, contrairement à la majorité des Verts, a admis que son groupe n’a pas réussi à faire passer sa proposition qu’il n’y ait plus de renouvellement de l’autorisation du glyphosate. Il reproche au PPE de l’avoir fait capoter et de ne pas avoir en ligne de mire la santé des citoyens, mais "les intérêts de l’industrie agraire et du producteur d’herbicides Monsanto". Il estime néanmoins que "le Parlement européen a envoyé un message clair" à la Commission et aux gouvernements des Etats membres, et qui signifie qu’il rejette une autorisation pour 15 ans et une utilisation de l’herbicide sur les surfaces vertes publiques et dans les jardins privés. Pour lui, "la résistance au glyphosate est en train de grandir" et "un vote comme celui que nous venons d’avoir n’aurait pas été possible il y a quelques semaines".

Viviane Reding et Georges Bach (PPE), ce dernier malgré les fortes réticences qu’il a exprimées à l’égard du glyphosate avant le vote et sa préoccupation pour la santé des personnes, des animaux et l’environnement, ont voté en faveur de la résolution, tout comme la socialiste Mady Delvaux. Le député PPE Frank Engel et le libéral Charles Goerens se sont abstenus, contrairement à la majorité de leur groupe. Charles Goerens, cité par Guy Kemp du Tageblatt, a regretté qu’il n’y ait pas assez d’alternatives au glyphosate, ce qui rend difficile son abandon pur et simple. D’où selon lui la nécessité de faire pression sur l’industrie afin qu’elle mette d’ici deux ans sur le marché un substitut à l’herbicide.

Pour rappel : Le glyphosate est une substance active largement utilisée dans les herbicides. La molécule a été brevetée au début des années 1970 et introduite sur le marché des consommateurs en 1974 comme herbicide à large spectre. Elle est rapidement devenue le numéro 1 des ventes. Depuis l'expiration du brevet en l'an 2000, le glyphosate a été commercialisé par diverses entreprises et plusieurs centaines de produits de protection des plantes contenant du glyphosate sont actuellement enregistrés en Europe pour une utilisation sur les cultures.

Prochaines étapes

Les experts nationaux qui siègent au comité permanent des végétaux, des animaux, des denrées alimentaires et des aliments pour animaux (section produits phytopharmaceutiques), le PAFF, se prononceront en mai pour adopter ou rejeter la proposition de la Commission européenne à une majorité qualifiée. Si une telle majorité n'est pas atteinte, la décision reviendra à la Commission européenne.