Le ministre des Affaires étrangères et européennes du Luxembourg, Jean Asselborn, a participé à la réunion informelle du Conseil "Affaires étrangères" - Commerce informel de l’Union européenne à Bratislava des 22 et 23 septembre 2016. Les accords CETA et TTIP étaient au centre des discussions.
À l’occasion d’un tour de table, les ministres en charge de la politique commerciale des différents États membres ont exposé leurs positions respectives sur la signature ainsi que sur l’application provisoire du CETA ou AECG, l'accord économique et commercial global entre l’UE et le Canada.
Dans son intervention, Jean Asselborn s’est félicité de la volonté commune du Canada et de l’UE d’améliorer davantage encore le CETA en y apportant des clarifications sous forme de déclaration conjointe. Le ministre a insisté sur l’importance de conférer une valeur juridiquement contraignante à cette déclaration, afin qu’elle fasse partie intégrante de l’accord.
S’agissant des points spécifiques que le Luxembourg souhaite voir clarifiés, le ministre Asselborn a notamment demandé que
"Si nous terminons cet exercice avec succès, l’UE aura réussi à conclure un accord de libre-échange de nouvelle génération: un accord qui ne poursuit pas seulement des objectifs purement économiques, mais qui permet également d’associer les effets bénéfiques du libre-échange à la sauvegarde des valeurs de nos sociétés européennes", a souligné le ministre Asselborn à Bratislava.
En ce qui concerne l’application provisoire éventuelle du CETA, Jean Asselborn a partagé l’avis des autres délégations qui sont en faveur d’une application provisoire aussi large que possible dans le respect de la répartition des compétences. "En clair, les dispositions sur le tribunal permanent des investissements devraient être exclues d’une telle application provisoire. En outre, il est très important que le chapitre sur le développement durable soit inclus dans l’application provisoire. Je termine en soulignant que l’application provisoire ne pourra se réaliser qu’après le consentement du Parlement européen", a précisé le ministre.
Lors d’une conférence de presse qu’il a donnée le 24 septembre à Luxembourg à la sortie d’une réunion avec la commission parlementaire affaires étrangères et européennes de la Chambre des députés , Jean Asselborn a estimé que "la discussion sur le CETA est entrée dans sa phase finale". Il a ajouté que "si tout marche bien avec le protocole additionnel, nous disposerons le 12 octobre par le biais de la Commission du texte de référence qui devrait être signé". Le Conseil s’en saisira pour décision le 18 octobre lors d’une réunion extraordinaire du Conseil Affaires étrangères – Commerce à Luxembourg. Une décision devra être prise à l’unanimité. La signature de CETA devrait suivre rapidement. Le processus de ratification par le Parlement européen et dans les Etats membres en revanche prendra du temps, estime le ministre. Le Parlement européen, par exemple, a annoncé qu’il consultera avant son vote la société civile afin de lui expliquer le contenu du traité, et il voudrait que l’application provisoire du traité CETA ne se fasse pas avant qu’il n’ait voté.
Jean Asselborn a loué le Canada et le gouvernement de Justin Trudeau pour avoir rouvert les négociations afin de permettre la création de l’ICS venant remplacer l’ancien ISDS et ses cours d’arbitrage confidentielles, et dont le champ d’application se limitera aux cas de discrimination et d’expropriation. Il a salué que le Canada ait ratifié déjà 7 sur 8 conventions de base du Bureau international du travail (OIT), la dernière concernant les conventions collectives allant l’être en automne. Pour lui, le Canada est une démocratie exemplaire et dispose d’un système de protection qui se recoupe largement avec les meilleures pratiques en Europe.
Le résultat des négociations sur le CETA des derniers mois est selon Jean Asselborn en conformité avec les critères fixés par la Chambre des députés dans sa motion de juin 2016. L’accord sera un accord mixte. Le volet "protection de l’investissement" avec la création de l’ICS sera soumis au vote des parlements nationaux. Les juges de cette juridiction seront impartiaux et nommés par l’UE et le Canada. Le CETA sera compatible avec les traités européens et ne pourra pas dans le cadre de son application mener à des changements de la législation européenne, voire la supplanter.
Les travaux des ministres ont ensuite été consacrés à l’état des lieux des négociations avec les États-Unis concernant le partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (PTCI/TTIP).
Constatant que les offres du partenaire américain ne correspondent actuellement toujours pas aux demandes de l’UE, y compris sur les points où l’UE a des intérêts offensifs comme notamment l’accès au marché, le ministre Asselborn a expliqué qu’"il faut être réaliste, nous ne devons pas céder à la pression des États-Unis qui semblent préférer de conclure les négociations sous l’administration du président Obama. L’Union européenne ne saurait réduire ses ambitions, la qualité doit primer sur le calendrier". Pour le ministre, le fait de disposer bientôt avec le CETA d’un mécanisme de protection de l’investissement d’un type nouveau aura par ailleurs pour effet que l’UE ne pourra pas négocier avec les USA sur base d’un système qui n’atteigne pas ce niveau de transparence et d’impartialité. "Le CETA est tout ce que le TTIP n’est pas", a-t-il conclu.
Enfin, les ministres réunis à Bratislava ont passé en revue les autres dossiers d’actualité en matière de politique commerciale, dont notamment la modernisation des instruments de défense commerciale de l’UE ainsi que les questions liées à l’expiration de certaines dispositions du protocole d'adhésion de la Chine à l'OMC.