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Agriculture, Viticulture et Développement rural
Réforme du secteur vitivinicole européen – La Commission européenne a fait connaître ses mesures à Luxembourg
04-07-2007


Rudolf Moegele, Ernst Moutschen, Markus KlingerLe 4 juillet 2007, la Commission a adopté des propositions pour la réforme du secteur vitivinicole européen. Un an après la publication des mesures qui ont suscité de fortes critiques dans les milieux professionnels, Rudolf Moegele, directeur à la Direction Agriculture et développement rural, et Markus Klinger, fonctionnaire expert de l’Unité vin, alcool, tabac, semences et houblon de la Direction Agriculture et développement rural étaient en déplacement au Luxembourg afin de présenter les grandes lignes d’une réforme contestée et d’en expliquer les motivations.

Consommation en baisse, percée significative des vins en provenance du Nouveau monde, excédents de vins qui pèsent fortement sur le budget de l’Union européenne : la viticulture européenne traverse une crise importante. Pour affronter la concurrence des vins "design" du Nouveau monde, augmenter la compétitivité des producteurs de l’Union européenne, équilibrer l’offre et la demande et du vin européen, la Commission a lancé en juin 2006 une vaste réforme de l’organisation commune du marché (OCM) du vin.

Les premières propositions ont été dévoilées en 2006 par la commissaire européenne de l’Agriculture Mariann Fischer Boel. S’ensuivirent 12 mois de débats intensifs avec tous les acteurs concernés. Dans le collimateur de la critique au Luxembourg figuraient notamment l’interdiction de la chaptalisation (ajout de sucre) pour augmenter la teneur en alcool des vins et l’arrachage volontaire de 400 000 hectares contre d’importantes compensations financières (2,4 millions d’euros).

La situation particulière du Luxembourg

Pour Rudolf Moegele, une réforme globale du secteur vitivinicole "s’avère indispensable". Il s’est exprimé en faveur d’une restructuration du marché du vin tout en soulignant "qu’il en va de la survie du secteur". Il a reconnu la situation particulière du Luxembourg en estimant que "le pays, en comparaison avec d’autres Etats membres est un petit producteur de vin. Il est doté d’un marché du vin bien établi, de structures qui fonctionnent et produit essentiellement des vins de qualité". Ces caractéristiques illustrent selon Rudolf Moegele "que les problèmes que nous devons affronter au niveau européen ne concernent pas le Luxembourg". "Pourtant", a-t-il tenu à préciser, "le Luxembourg fait partie de l’Union européenne et la réforme doit aussi prendre en compte la situation luxembourgeoise".

L’interdiction d’utiliser le saccharose

La principale pomme de discorde entre le Luxembourg et la Commission européenne concerne l’interdiction d’utiliser le saccharose. Le ministre de l'agriculture Fernand Boden est d’avis que cette interdiction aura des répercussions importantes sur le secteur vitivinicole luxembourgeois. Dans une interview "l'enrichissement reste le problème principal" accordée au Wort du 02.07.07, il a souligné la nécessité d’utiliser le saccharose "afin d’atténuer, par exemple, les effets engendrés par des conditions climatiques défavorables". "Il s’agit d’une méthode traditionnelle qui permet de renforcer la compétitivité du secteur. Et renforcer la compétitivité du secteur devrait être l’objectif de la réforme du vin", a-t-il estimé.

Rudolf Moegele, de son côté, était d’avis que les répercussions de cette interdiction ont été exagérées par les Etats membres. D’après l’expert de la Commission, 85 % du budget accordé au Luxembourg concernait l’aide à l’enrichissement du vin par le concentré de moût. Cette aide que la Commission s’apprête à supprimer, de sorte que cette méthode serait entièrement appliquée aux frais des vignerons.

Pour Moegele, ces données illustrent par contre que "cette méthode d’enrichissement est aussi acceptée dans les pays du nord". Il s’est également référé à une évaluation globale de la Commission européenne dont les résultats montrent que les coûts supplémentaires engendrés par la nouvelle méthode sont pour les vins de moindre qualité de 10 % par bouteille. "Au Luxembourg, où on produit essentiellement des vins de qualité, le coût est nettement inférieur, et est estimé à 10 cents par bouteille. Des chiffres qui se situent dans le cadre de l’acceptable", a estimé l’expert de la Commission européenne, chose qui est contestée au Luxembourg par les professionnels du secteur.

Concernant la limite d’enrichissement par le moût de vin établie à 2 %, Rudolf Moegele a dit que "l’expérience nous a montré que 2 % suffisent largement". Dans des conditions climatiques particulières, la Commission prévoit toutefois la possibilité pour les Etats membres de dépasser la limite des 2 % (3% voire 3,5 %).

L’arrachage volontaire de 200 000 hectares de vignes

Confrontée à une production largement excédentaire, la Commission avait envisagé l’arrachage volontaire de 400 000 hectares de vignes. Dans une interview "un moment opportun" au Luxembourger Wort du 31 mai 2007, le ministre Boden a estimé que "si l’on prend la qualité comme critère de sélection, alors aucun hectare ne peut être arraché dans la région mosellane". En revanche, le ministre de l’Agriculture a jugé que la mesure fait du sens "là où la qualité n’est pas garantie et là où les vignobles sont essentiellement destinés au processus de distillation onéreux".

La Commission maintient son plan d’arrachage du vignoble, mais en réduisant de moitié les surfaces initialement proposées. Elle estime que la décision d’arracher les vignes doit appartenir aux producteurs de vin. Ainsi, le producteur qui souhaite se retirer du secteur recevra une prime à l’arrachage dont le montant sera, durant les premières années, supérieure de 30 % aux niveaux actuels. Le producteur doit décider en fonction de critères tels que la qualité du vin, du sol et en fonction de la situation s’il envisage d’arrêter son exploitation. "Dans certains Etats membres comme, par exemple l’Espagne nous savons qu’il y a pas mal de producteurs pour lesquels une telle initiative serait intéressante", a expliqué Rudolf Moegele. "D’où notre proposition qui leur permet de quitter le secteur tout en bénéficiant d’aides généreuses qui leur permettent, par la suite, de diversifier leurs actions vers d’autres secteurs de l’agriculture".