De retour de la XXXVIIIe réunion de la COSAC qui s’est tenue du 14 au 16 octobre 2007 à Estoril au Portugal, les députés Laurent Mosar (CSV) et Ben Fayot (LSAP) ont fait état de l’optimisme de la Présidence portugaise du Conseil qu’un accord puisse être trouvé le 18 octobre à Lisbonne sur le nouveau traité européen, désormais appelé "traité réformateur".
Les deux députés ont réitéré leur déception (cf. notre article du 18 septembre 2007) que les représentants des parlements nationaux n’aient pas pu participer à la Conférence intergouvernementale et ont renvoyé à un papier adopté par la COSAC qui exprime le souhait que désormais, « les parlements nationaux soient associés aux Conférences intergouvernementales. »
Une des préoccupations de Laurent Mosar est l’impact sur l’acquis communautaire des opt-in et des opt-out pour les Britanniques qui sont contenus dans le traité réformateur. Ainsi, l’opt-out des Britanniques en matière de coopération judiciaire et pénale pourrait conduire à un opt-out dans le cadre de la directive sur l’entraide judiciaire et pénale avec la Suisse. Pour le Luxembourg, qui est en concurrence avec la place financière de Londres, cela pourrait constituer un problème. Le 26 juin dernier, juste après le Conseil européen, le Premier ministre Juncker avait qualifié ce danger de "théorique"..
Le 17 octobre, le ministre des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a déclaré devant la Commission des Affaires étrangères et européennes de la Chambre des députés que le Luxembourg insistera pour qu’une déclaration soit malgré tout annexée au traité que les opt-out et les opt-in britanniques ne pourraient pas conduire à des "distorsions de concurrence". Laurent Mosar s’est réjoui de cette initiative "rassurante".
"La procédure de ratification du traité devrait commencer le plus rapidement possible", a déclaré Laurent Mosar, pour qui tout sera fait pour qu’il en soit ainsi. Des initiatives sont en cours entre les parlements des six Etats fondateurs pour qu’ils ratifient plus ou moins ensemble le traité au cours de la première moitié de 2008. "Cela devrait servir de signal aux autres Etats."
Ben Fayot a regretté que l’influence des parlements nationaux ait reculé au cours de la dernière CIG. Il n’en reste pas moins que le traité qui est issu de cette CIG récupère plus de 90 pour cent du contenu du traité constitutionnel, "dont on ne peut donc pas dire qu’il soit mort".
Le chef de la fraction socialiste n’a pas de doutes que la Chambre des députés ratifiera le traité réformateur, mais elle "se donnera aussi une stratégie pour expliquer à l’opinion publique ce que le traité signifie", a déclaré Ben Fayot, qui a annoncé une heure d’actualités pour le mardi 23 octobre 2007 et une audition publique qui se tiendra le 9 novembre à la Chambre des députés, conformément à la promesse émise après le référendum de 2005 qu’il y aurait un grand débat public à chaque fois que le processus d’intégration européenne l’imposera.
Ben Fayot a ensuite abordé les conséquences que la clause du renforcement du pouvoir des parlements nationaux dans le processus législatif européen aura pour le travail de la Chambre des députés. En effet, une majorité de parlements nationaux pourront, avec le nouveau traité, bloquer une procédure législative européenne s’ils jugent que les principes de subsidiarité et de proportionnalité ne sont pas respectés dans une proposition de directive. Il est donc nécessaire que les parlements nationaux créent entre eux des réseaux de travail pour les affaires européennes et pour coordonner le cas échéant leurs positions. Au niveau luxembourgeois, Ben Fayot et Laurent Mosar voudraient que chaque commission de travail parlementaire ait une dimension européenne. Déjà, un accord avec le gouvernement permettra à la Chambre d’être mieux alimentée en documents pour pouvoir être en mesure d’assumer pleinement ses nouvelles compétences.
Ben Fayot a beaucoup insisté sur la nécessité que les députés soient des députés professionnels à plein temps, vu la masse de travail qu’ils ont à maîtriser, avec l’appui de seulement 60 à 65 fonctionnaires de la Chambre, alors que l’Etat a déjà du mal à suivre. Mais pour Fayot, c’est le prix à payer, car selon lui, "l’acceptation de l’Union européenne par les citoyens exige que les élus du suffrage universel contribuent au façonnement de l’impact de l’Union européenne dans les Etats membres." Et il a ajouté : "Après l’Union européenne des diplomates décidée d’en haut, il y a maintenant un réel besoin de discussion sur l’Europe d’en bas avec les représentants du peuple démocratiquement élus. Sinon, l’opinion publique risque de ne plus accepter l’Union européenne."
Pour conclure, Ben Fayot a fait état d’une proposition d’un député allemand, Kurt Bodewig. Partant du fait que le traité réformateur ne prévoit plus de clause sur les symboles européens - drapeau et hymne - il a suggéré que les parlements nationaux adoptent une loi parallèlement à la ratification du nouveau traité qui restaure chez eux les symboles qui n’ont pu être inclus dans le traité. "Le président Sarkozy n’a-t-il pas mis en valeur le drapeau et l’hymne européens lors du défilé du 14-Juillet aux Champs-Elysées ?", a ajouté non sans malice Ben Fayot.