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Elections européennes
Hans-Gert Pöttering a répondu aux questions de jeunes étudiants sur les politiques européennes
13-03-2009


Hans-Gert PötteringA l’occasion de sa visite à Luxembourg, Hans-Gert Pöttering, président du Parlement européen, a été invité, à l’initiative du Bureau d’information du Parlement Européen et de la Chambre des Députés, à rencontrer des jeunes étudiants de l’Université de Luxembourg afin de répondre à leurs questions. La rencontre, qui s’est tenue le 13 mars 2009 dans la salle plénière de la Chambre des Députés, a réuni une vingtaine d’étudiants, le président de la Chambre, Lucien Weiler, Ben Fayot, président de la Commission des Affaires étrangères et européennes de la Chambre, ainsi que d’autres députés et eurodéputés.

Si le sujet de la rencontre était "l’Europe dans la crise mondiale", les débats se sont rapidement orientés, suite aux questions soulevées par les étudiants, sur les droits de l’homme, la politique d’immigration de l’Union européenne ou encore sur la politique d’aide au développement.

"Expliquer et plaider"

Lucien Weiler a, dans son introduction, évoqué l’histoire du Parlement européen et le long chemin qu’il a entrepris pour devenir aujourd’hui un acteur incontournable dans l’UE, et ce notamment grâce à ses fonctions de colégislateur. Faisant référence à la conférence donnée la veille par Hans-Gert Pöttering, le président de la Chambre a rappelé la réponse suggérée par le président du Parlement européen à la question d’un manque éventuel de sensibilisation de l’opinion publique, à savoir qu’il faut "expliquer et plaider" inlassablement pour défendre le projet européen. Pour faire face aux accusations de déficit démocratique, il faut par ailleurs une représentation parlementaire forte et légitime, laquelle ne peut trouver son fondement que dans une forte participation des électeurs. Et il a conclu en citant les nombreux efforts menés par le parlement luxembourgeois pour aller à la rencontre des électeurs et des jeunes citoyens.

Comme il l’avait fait la veille, Hans-Gert Pöttering a commencé par rappeler que l’Union européenne est "une communauté de valeurs". Ayant visité la Cour européenne de Justice la veille, le président du Parlement européen a signifié son enthousiasme pour le symbole qu’elle incarne, à savoir celui de la primauté du droit. Abordant le thème du débat, à savoir celui l’Europe dans la crise, Hans-Gert Pöttering a rappelé que l’Union européenne était adepte d’une économie sociale de marché, et non pas seulement libérale, comme c’est le cas aux Etats-Unis. Face à la crise, il s’agit donc pour l’Union européenne de défendre le marché intérieur, la monnaie unique tout en veillant à la mise en place d’une autorité de contrôle bancaire et de plus transparence sur les marchés financiers. Mais pour le président du Parlement européen, il convient aussi de ne pas oublier l’importance du dialogue entre les cultures. S’il importe en effet selon lui "d’éviter le choc des cultures", il est aussi essentiel de défendre par là-même les valeurs européennes.

De l’universalité des droits de l’homme

Nicolas, étudiant, a évoqué la critique faite à Singapour il y a encore quelques années, à l’égard des droits de Nicolas, étudiant à l'Université de Luxembourgl’homme, considérés par certains comme un concept occidental basé sur des valeurs chrétiennes qui seraient contraires aux valeurs asiatiques, lesquelles verraient, selon les tenants de cette analyse, le collectif primer sur l’individu.

Hans-Gert Pöttering, invité à se prononcer sur cette question, a tenu à distinguer tolérance – qui signifie avoir un avis, le défendre, tout en respectant l’avis de l’autre – et indifférence. Le président du Parlement européen, qui ne partage cette lecture des droits de l’homme, a en effet expliqué que, pour lui, toute personne humaine était responsable tant pour soi-même, - et il a parlé alors d’individualisme, - que devant la communauté – et il a choisi là le terme de solidarité. Faisant référence à un récent entretien avec des étudiants d’une université biélorusse en exil à Vilnius, la European Humanities University, Hans-Gert Pöttering s’est appuyé sur leur témoignage pour souligner qu’il n’est pas question de les oublier, et qu’il est de notre devoir de nous engager.

De l’esprit des directives européennes

Trois étudiants de l'Université de LuxembourgUn autre étudiant, de double nationalité portugaise et capverdienne, a fait part de ses interrogations au sujet du processus de transposition des directives européennes par les Etats membres et s’est demandé s’il ne serait pas possible de créer un comité de surveillance pour aider les députés nationaux à mieux comprendre l’esprit des directives.

Hans-Gert Pöttering expliquant très rapidement le processus de transposition, en n’oubliant pas le rôle de la Cour de Justice en cas de non respect des délais de transposition par un Etat-membre, a insisté pour dire que le système fonctionnait assez bien, même si, bien entendu, il faut toujours veiller à une bonne application du droit par tous.

Ben Fayot a alors précisé qu’en cas de litige sur l’interprétation d’une directive, la Cour de Justice proposait une interprétation correcte et cohérente du texte. Quant aux problèmes des parlements nationaux, comparés par d’aucuns à des "caisses enregistreuses" de ce qui se fait au niveau européen, Ben Fayot a expliqué que, s’ils n’ont que très peu de latitude au moment de la transposition d’une directive, c’est-à-dire à la fin du processus législatif, ils peuvent être impliqués dans les discussions qui ont lieu dès début du processus. Ainsi ils reçoivent par exemple depuis 2006 tous les textes publiés par la Commission et ils peuvent de la sorte participer à l’élaboration de la législation européenne, mieux comprendre ce que se passe et connaître aussi l’intention de la législation en vue de sa transposition.

De la politique d’immigration européenne

C’est ensuite la question du "drame qui se tient aux frontières extérieures de l’Union européenne" qui a été abordée par une étudiante. Evoquant FRONTEX, l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures, cette jeune fille a souhaité savoir s’il était envisagé d’organiser un contrôle des activités de cette agence, afin que soit respectée la Convention de Genève. Elle s’est aussi demandé plus largement si d’autres (de gauche à droite, de bas en haut) Lydie Polfer, Roger Negri, Hans-Gert Pöttering et Ben Fayotidées que celle de "construire une forteresse" étaient discutées pour répondre au défi de l’immigration.

Hans-Gert Pöttering, soulignant la difficulté de la question et l’ampleur du problème, a commencé par expliquer qu’il ne saurait y avoir de réponse rapide. Faisant un parallèle avec le rideau de fer qui a séparé l’Europe pendant une grande partie du 20e siècle, il a parlé d’une "sorte de mur" que de nombreuses personnes venant du Sud de la Méditerranée essayaient de franchir, au risque d’y perdre la vie. Pour le président du Parlement européen, il importe de regarder les activités de FRONTEX de façon plus positive, même s’il est pour l’idée d’un contrôle parlementaire de ses activités. Par ailleurs, il a tenu à insister sur la nécessité de coopérer avec les pays du Sud de la Méditerranée, ainsi qu’avec ceux qui sont encore plus au Sud. Pour lui l’aide économique est essentielle, mais ne prend sons sens que dans un cadre démocratique.

Ben Fayot a pour sa part souligné que les deux récentes lois luxembourgeoises concernant l’asile et l’immigration étaient en fait des transpositions de directives européennes. Comme il l’a rappelé, l’Union européenne élabore peu à peu, "non sans difficultés, un corpus législatif relativement complet et cohérent en matière d’immigration".

Marcel, étudiant sénégalais, a dans un premier temps tenu à saluer la politique européenne qui a su considérer une vision sociale, et non seulement libérale. Pour lui, la question de l’immigration est cruciale. Il est personnellement opposé tant à l’idée d’une immigration choisie qu’à l’immigration illégale. Et pour combattre cette dernière il faut, selon ce jeune étudiant, aller à la source, c’est-à-dire veiller à une meilleure gestion de l’économie en Afrique. Pour lui enfin, le principe de l’immigration choisie doit être revu car, selon ses termes "il pille l’Afrique".

D’une meilleure cohérence des politiques européennes

Deux étudiants de l'Université de LuxembourgLa question a surgi alors de la part d’une étudiante d’un manque de cohérence entre les différentes politiques de l’Union européenne, et elle a alors illustré son propos en opposant les objectifs de la politique de développement et la récente décision de réintroduire le régime des restitutions à l'exportation pour les produits laitiers.

Charles Goerens, qui s’est appuyé sur une étude réalisée au sujet des pays du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, a confirmé la fuite des cerveaux et il a donc suggéré la promotion de visas à entrées multiples qui permettraient à des jeunes diplômés de faire des séjours réguliers en Europe tant pour se perfectionner que pour améliorer leurs revenus, mais sans pour autant quitter définitivement leur pays. L’idée d’octroyer des bourses d’études à des jeunes de pays tiers, qui seraient conditionnées par un engagement à mettre les compétences acquises au service de leur pays pendant un temps donné a aussi été évoqué par le député. Il s’est dit enfin choqué par la décision concernant les quotas laitiers et a appelé à une nécessaire cohérence des politiques européennes.

Claude Turmes a expliqué que la majorité des partis, par ailleurs très divisés par la question de l’immigration, étaient pour une politique "de la légalité des entrées". Il a cependant regretté que la première directive sur l’immigration "jette les gens dehors" plutôt que "d’organiser l’immigration légale". Il a insisté lui aussi sur la nécessité de faire de la cohérence des politiques européennes un thème fort et important, tout en faisant de la crise financière et économique une opportunité de se mettre à penser sur la durée et de privilégier la coopération à la concurrence.

Pour Astrid Lulling la politique que l’UE met en place pour gérer l’immigration légale ne consiste pas à construire une "forteresse Europe". L’idée est pour elle de garantir un accueil décent à ceux qui viennent et elle a rappelé à cet égard la générosité du Luxembourg. Evoquant la question de l’aide au développement, Astrid Lulling, qui a souligné, comme l’avait fait auparavant Nancy Arendt, l’exemplarité du Luxembourg en la matière, a tenu à insister sur la responsabilité de certains Etats africains. Au sujet de la Politique agricole commune (PAC), Astrid Lulling a fait part de son exaspération face à certains délégués des pays ACP "qui veulent faire croire que la PAC est responsable de tous leurs maux". Pour Astrid Lulling, l’Europe est dans son bon droit en ayant une politique qui assure sa sécurité alimentaire et la qualité de ses produits agricoles.

Conclusions

Après un rappel sur les modalités d’inscription sur les listes électorales européennes et quelques remarques sur la crise économique et financière, qui n’a tout compte fait pas été abordée par les étudiants présents, Hans-Gert Pöttering a conclu en expliquant le rôle de leader que l’Union européenne avait pour répondre aux problèmes mondiaux, auxquels elle ne saurait faire face seule, mais lesquels ne sauraient être résolus sans elle. Il entendait par là la lutte contre le changement climatique mais aussi l’introduction d’une réglementation en vue d’une plus grande transparence des marchés financiers. Dans ce contexte, l’Europe doit être forte et capable d’agir et les institutions communautaires ont là, selon le président du Parlement européen, un grand rôle à jouer.