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Opinion
L’Eurobaromètre de printemps dresse un tableau de l’opinion publique européenne assombri par la crise qui battait son plein au mois de mai 2010
26-08-2010


L'enquête Eurobaromètre du printemps 2010 (EB73), dont les premiers résultats ont été publiés le 26 août 2010, a été réalisée en mai 2010, alors que l’Europe était en pleine crise de la dette souveraine. Ces événements semblent avoir empreint le tableau offert eurobarometerpar cet Eurobaromètre d’un désenchantement certain à l’égard de l’UE, d’une profonde inquiétude quant à la situation économique et d’un pessimisme particulièrement marqué au Luxembourg.

Cependant, l’enquête révèle aussi un désir fort de plus de gouvernance et de coordination, exprimé par des citoyens qui semblent donner leur assentiment aux objectifs de la stratégie Europe 2020. En bref, s’ils sont conscients des défis et s’ils sont prêts à faire des sacrifices, les Européens pensent aussi à une très large majorité que les Etats membres de l’UE devraient travailler davantage ensemble afin de prendre des mesures pour combattre la crise économique.

L’enquête de printemps a été menée au moyen d’entretiens individuels entre le 5 et le 28 mai 2010, lorsque l’Europe était touchée de plein fouet par la crise de la dette souveraine. Au total, 26 641 personnes ont été interrogées dans les vingt-sept États membres de l’Union. Au Luxembourg, l’enquête a été menée entre le 7 et le 25 mai 2010 auprès de 505 résidents.

Un certain désenchantement à l’égard de l’UE semble frapper les esprits tant dans l’UE qu’au Luxembourg qui reste pourtant le pays le plus convaincu des bienfaits de son appartenance à l’Union

Interrogés sur les avantages de faire partie de l’Union européenne, 49 % des Européens déclarent que l’adhésion de leur pays à l’Union est une bonne chose, soit 4 points de moins qu’à l’automne 2009. Le soutien manifesté en faveur de l’adhésion à l’Union reste ainsi supérieur aux 48 % d’opinions favorables exprimées en 2001, au moment où la "bulle Internet" avait éclaté et provoqué une récession. Si les résidents du Luxembourg restent, de loin, les champions de l’europhilie, avec 70 % de répondants jugeant que faire partie de l’UE est une bonne chose, ils sont cependant eux aussi frappés par un certain désenchantement : ils sont 4 % de moins à répondre de la sorte et 5 % de plus, soit 12 %, à trouver que faire partie de l’UE est une "mauvaise chose". C’est en Allemagne et en Grèce que la hausse d’insatisfaction a été la plus grande (+ 9, respectivement + 8 par rapport à l’automne 2009), au cours de cette enquête menée en plein mois de mai.

De même, quand on leur a demandé s’ils estimaient que leur pays avaient bénéficié ou non de leur appartenance à l’UE, si la majorité des Européens (53 %) et des sondés du Luxembourg (68 %) répondent de façon positive, ils sont cependant 4 % de moins à ce faire que lors du précédent Eurobaromètre. Au Luxembourg, les rangs de ceux jugeant au contraire que leur pays n’a pas bénéficié de l’adhésion se sont même gonflés de 6 points, une hausse qui reste cependant loin de celles observées en Allemagne (+11) et au Portugal (+ 13).

La confiance dans l’UE est affaiblie, mais les institutions nationales luxembourgeoises ne sont pas épargnées non plus par cette baisse de confiance

Si, au niveau de l’UE, la confiance dans les institutions de l’Union européenne a tendance à rester plus élevée que celle manifestée à l’égard des gouvernements ou des parlements nationaux (42 % contre respectivement 29 % et 31 %), ce sentiment de confiance envers l’Union a reculé de six points par rapport à l’automne 2009.

Le Luxembourg, qui accorde traditionnellement une très forte confiance à son gouvernement et à son parlement national, est à première vue fidèle à ses tendances. La confiance dans le gouvernement est exprimée par 66 % des répondants, celle à l’égard de la Chambre des députés par 52 % d’entre eux ; de même ils sont 52 % à faire part de leur confiance dans l’UE. Ces chiffres assez élevés témoignent cependant d’une baisse de confiance qui affecte toutes les institutions citées : - 2 points pour le gouvernement, - 7 points pour la Chambre, dont on peut noter que 3 points sont venir nourrir les indécis, et enfin - 10 points pour l’UE ! Les sondés du Luxembourg qui disent ne pas faire trop confiance à l’UE sont donc 40 %, soit 11 % de plus qu’à l’automne 2009.

Compte tenu des négociations d’adhésion entamées avec l’Islande par le Conseil européen le 27 juillet 2010, l’enquête Eurobaromètre de printemps a également inclus pour la première fois des entretiens individuels avec des Islandais (526 personnes), interrogés sur leur opinion générale de l’Union. 35 % d’entre eux ont déclaré qu’ils faisaient confiance à l’Union et 29 % que l’Islande tirerait avantage d’une adhésion à celle-ci.

L’image de l’UE reste positive dans l’ensemble, mais les représentations négatives qu’en ont les résidents du Luxembourg semblent gagner du terrain

L’image de l’UE, qui est marquée surtout par la liberté de circulation (c’est le cas pour 45 % des sondés dans l’UE et pour 59 % d’entre eux au Luxembourg), semble s’être dégradée aux yeux des citoyens. Ainsi, au niveau de l’UE, ils sont moins nombreux à citer, pour exprimer ce que représente l’UE pour eux personnellement, des éléments ayant une connotation positive comme la démocratie (- 7) ou encore la paix et la prospérité économique (- 4). Le Luxembourg, n’échappe pas, loin de là, à cette tendance, le nombre de répondants ayant cité "la démocratie" ayant chuté par exemple de 10 points par rapport à l’automne 2009. De plus, ce sentiment est renforcé par une hausse importante au Luxembourg de personnes évoquant des éléments à connotation nettement plus négative comme "un gaspillage d’argent" (+ 9, soit 20 % des répondants), ou encore "la bureaucratie" (+ 4, soit 14 %).

En termes de citoyenneté, l’enquête montre cependant que des efforts restent à faire pour informer les citoyens européens de leur droit. Seuls 42 % d’entre eux disent en effet "connaître leurs droits", un chiffre qui est nettement plus élevé au Luxembourg où ils sont 62 % dans ce cas. Il semble par conséquent tout naturel que les citoyens soient très nombreux (72 % dans l’UE et 77 % au Luxembourg) à souhaiter en savoir plus sur leurs droits en tant que citoyens de l’UE.

Au cours de l’enquête, les sondés ont été invités à choisir quatre réponses parmi une longue listes d’éléments susceptibles de "renforcer leur sentiment d’être un citoyen européen". Au Luxembourg comme dans le reste de l’UE, c’est l’idée d’un système de protection sociale européen harmonisé entre les Etats membres qui a rencontré le plus de succès (34 % des répondants ont coché cette proposition). Au Luxembourg, la perspective de pouvoir s’installer dans n’importe quel pays de l’UE après la retraite et d’y toucher sa pension atteint le même score. Cette proposition arrive en deuxième position dans toute l’UE avec 27 % de sondés. Suivent, pour les citoyens européens, des services européens d'intervention d'urgence pour lutter contre les catastrophes naturelles internationales et l’introduction d’une carte d'identité européenne en complément de la carte d'identité nationale. Cette dernière proposition a rencontré aussi un grand succès au Luxembourg où elle a été choisie par 29 % des sondés, suivie de près par l’idée d’avoir le droit de voter à toutes les élections organisées dans l’Etat membre de résidence, même sans en avoir la nationalité.

La crise paraît avoir particulièrement assombri les perspectives des résidents du Grand Duché,  plus de la moitié d’entre eux s’attendant à une dégradation de la situation économique européenne dans les douze mois à venir

La situation économique apparaît aux yeux d’une large majorité de citoyens européens comme mauvaise que ce soit au niveau national, pour 77 % d’entre eux (+ 2 par rapport à l’automne 2009), européen, pour 70 % d’entre eux (+ 8) ou au niveau mondial (71 %). Au Luxembourg, la situation de l’économie nationale est perçue comme mauvaise par seulement 33 % des répondants, mais ce chiffre a connu une hausse de 12 % par rapport à l’automne 2009. La tendance au regain de pessimisme est encore plus nette (+ 18) au sujet de la perception de la situation économique en Europe, 67 % des sondés du Grand-Duché jugeant mauvaise la situation.

Les attentes concernant la situation économique nationale ont tendance à se détériorer dans l’UE par rapport à l’automne 2009 : si 24 % des sondés espèrent que la situation va s’améliorer dans les 12 prochains mois (- 4), ils sont 36 % à penser qu’elle va empirer (+ 5) et 35 % à penser qu’elle ne changera pas. Les perspectives semblent particulièrement sombres aux yeux des résidents du Luxembourg puisqu’ils sont 46 %, soit 12 % de plus qu’à l’automne 2009, à penser que la situation va empirer dans l’année à venir.

En ce qui concerne la perception de la situation économique européenne, l’inquiétude s’est nettement accrue : 32 % des répondants (+ 11) s’attendent à une dégradation et cette tendance est encore plus nette au Luxembourg où 55 % des répondants (+ 16) partagent ce sentiment, 12 % (- 19) seulement des répondants du Grand-Duché espérant une amélioration dans l’année à venir.

Sur le plan personnel, cet accès d’inquiétude semble un peu moins marqué et les résidents du Luxembourg restent nettement plus satisfaits que la moyenne européenne de leur situation professionnelle (71 % d’entre eux la jugent bonne alors que la moyenne européenne est de 52 %) ou encore de la situation financière de leur ménage (88 % la jugent bonne au Luxembourg, 64 % dans l’UE), même si on observe une hausse de 3 points des mécontents à ce sujet au Grand Duché. Mais les attentes quant aux douze prochains mois laissent transparaître l’inquiétude au Luxembourg quant à la situation financière des ménages. En effet si 18 % des répondants craignent qu’elle n’empire, un chiffre qui est juste en dessous de la moyenne européenne, cela représente une hausse de 9 points par rapport à la dernière enquête Eurobaromètre.

Si plus de 55 % des sondés estiment que le pire est à venir sur le terrain de l’emploi dans l’UE, ils sont 70 % à partager cette inquiétude au Luxembourg

La situation de l’emploi au Grand Duché est perçue comme bonne par 53 % des sondés, ce qui correspond à un des chiffres les plus élevés dans l’UE alors que dans l’UE, 83 % des sondés jugent mauvaise la situation de l’emploi dans leur pays. Pourtant, par rapport à l’automne 2009, les répondants du Luxembourg se montrent bien moins optimistes, voire résignés, comme le reflètent nettement leurs attentes pour les douze prochains mois en matière d’emploi. 16 % des sondés s’attendent à une amélioration (-13), 49 % craignent une détérioration (+ 3) et 31 % (+ 10) ne s’attendent à aucun changement en la matière.

Cette poussée de pessimisme au Luxembourg transparaît dans les réponses à une autre question invitant les sondés à dire s’ils estiment que l’impact de la crise sur l’emploi a atteint son apogée, ce qui est le cas pour 37 % d’entre eux dans l’UE, ou au contraire s’ils pensent que le pire est à venir en la matière, ce que pensent 55 % des Européens. Au Luxembourg, 70 % des sondés pensent que le pire est encore à venir, et ils sont en cela 9 % de plus qu’à l’automne 2009, alors que ceux qui pensent que le pire est derrière eux ne sont plus que 26 % (- 9).

Dans l’UE comme au Luxembourg, les principaux problèmes identifiés au niveau national par les citoyens sont le chômage (UE : 48 %, LU : 39 %), la situation économique (UE : 40 %, LU : 34 %) ou encore l’inflation (UE : 20 %, LU  28 %). Comme à l’accoutumée, le problème du logement apparaît comme particulièrement prégnant au Luxembourg où il est cité par 18 % des répondants. A noter, la question des impôts, citées par 13 % des sondés au Luxembourg, a fait un bond de 9 points dans les préoccupations par rapport à l’automne 2009.

Sur le plan personnel, l’inflation et la situation économique arrivent en tête des problèmes auxquels font face les sondés tant dans l’UE qu’au Luxembourg. Si c’est le chômage qui suit dans l’UE, c’est le système éducatif qui arrive en troisième position au Luxembourg, suivi de près par le logement. Deux thématiques qui n’ont de cesse de resurgir dans les préoccupations luxembourgeoises au fil des Eurobaromètres.

Pour une proportion croissante d’Européens, l’UE est la mieux placée pour agir contre la crise

Les résultats de l’enquête révèlent les attentes croissantes des citoyens vis-à-vis de l’Union européenne : pour une proportion croissante d’Européens (26 %, + 4 points par rapport à l’automne 2009), ce ne sont ni les États-Unis ni le G20 mais bien l’Union européenne qui est la mieux placée pour agir efficacement contre la crise. Au Luxembourg, si les sondés sont plus nombreux (33 %) à partager ce point de vue, la seule institution à avoir gagné en crédibilité (+ 5 points) pour résoudre la crise est cependant le FMI qui est cité par le même nombre de sondés que le gouvernement luxembourgeois, à savoir 14 % d’entre eux.

S’ils sont prêts à faire des sacrifices, les Européens pensent aussi à une large très majorité que les Etats membres de l’UE devraient travailler davantage ensemble afin de prendre des mesures pour combattre la crise économique

La plupart des Européens sont conscients des défis cruciaux auxquels la totalité des États membres sont confrontés : 74 % d’entre eux reconnaissent que des réformes sont nécessaires pour que leur pays puisse affronter l’avenir, et le nombre de sondés s’en étant convaincus a connu une hausse de 8 points au Luxembourg pour atteindre 71 %. 71 % des sondés - 75 % au Luxembourg - sont d’ailleurs  prêts à accepter ces réformes dans l’intérêt des générations futures. L’idée de réduire son niveau de vie actuel pour garantir l’avenir des générations futures partage plus l’opinion puisque 46 % des Européens sont plutôt pour et 46 % sont plutôt contre ; cette idée est cependant nettement plus populaire au Luxembourg où elle est partagée par 63 % des sondés.

Par ailleurs, ils sont 86 % dans l’UE et même 91 % au Luxembourg à penser que les Etats membres de l’UE devraient travailler davantage ensemble afin de prendre des mesures pour combattre la crise économique.

75 % des citoyens veulent une gouvernance économique européenne plus forte

Les Européens hésitent quant à la meilleure façon de relancer l’économie : 74 % d’entre eux (71 % au Luxembourg) jugent que les mesures de réduction de la dette et des déficits publics nationaux ne peuvent attendre. Parallèlement, 46 % de l’ensemble de la population de l’Union approuvent aussi une relance de l’économie par l’endettement (36 % sont contre et 18 % sans opinion). Dans les seize pays de la zone euro, le résultat est différent : 42 % s’opposent à une politique de déficit public, tandis que 41 % y sont favorables. Cette idée rencontre cependant l’approbation de 59 % des sondés au Luxembourg.

Par ailleurs, la population aspire de plus en plus à une coordination accrue des politiques économiques et financières à l’échelle de l’Union : 75 % des citoyens veulent une gouvernance économique européenne plus forte (+ 2 points par rapport à l’automne 2009, + 4 points par rapport au mois de février 2009). Ce renforcement de la gouvernance économique européenne est surtout souhaité en Slovaquie (89 %), en Belgique (87 %) et à Chypre (87 %). Une modification majeure de l’opinion en faveur d’une plus forte gouvernance européenne est observée dans plusieurs pays, en particulier en Finlande et en Irlande (+ 13 points par rapport à l’automne 2009), en Belgique et en Allemagne (+ 7 points), en Autriche, au Luxembourg (où cette idée rencontre l’assentiment de 81 % des sondés) et en Slovaquie (+ 6 points), et enfin aux Pays-Bas (+ 5 points).

La surveillance et la supervision par l’UE des activités des groupes financiers internationaux les plus importants apparaît aussi comme une mesure efficace aux yeux de 72 % des sondés dans l’UE et de 78 % d’entre eux au Luxembourg.

Les objectifs d’Europe 2020 semblent rencontrer l’assentiment des citoyens

Une majorité d’Européens confirme la pertinence des priorités définies par l’Union dans sa stratégie Europe 2020 de relance économique : 92 % des citoyens pensent ainsi qu’une modernisation des marchés du travail s’impose pour relever les niveaux d’emploi et que l’aide en faveur des plus démunis et des exclus doit être une priorité. 90 % des citoyens sont en faveur d’une économie moins dispendieuse des ressources naturelles et moins génératrice d’émissions de gaz à effet de serre. L’ensemble de ces objectifs sont jugés importants par une très large majorité de citoyens, et le Luxembourg ne fait là pas exception, et, dans l’ensemble les objectifs chiffrés fixés semblent raisonnables à leurs yeux.

On peut noter cependant qu’au Luxembourg, la tendance à penser qu’augmenter la part de l’énergie renouvelable dans l’UE d’au moins 20 % serait "trop ambitieux" s’est réduite de 5 points, même si elle reste nettement plus marquée que dans l’UE. De même, les sondés du Luxembourg ont plus tendance qu’à l’automne 2009 à juger que réduire d’ici 2020 les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 20 % par rapport à 1990 est un objectif qui convient (42 %, + 7) voire trop modeste (24 %, + 10). En ce qui concerne l’objectif selon lequel au moins 40 % de la jeune génération devrait avoir un diplôme ou une qualification, le Luxembourg se montre assez exigeant, 45 % des sondés jugeant l’objectif trop modeste.