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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Selon le ministre du Travail Nicolas Schmit, l’emploi en soi ne semble pas être le premier souci de la stratégie Europe 2020, après une stratégie de Lisbonne "peu concluante"
Comme ministre du Travail, Nicolas Schmit se dit "frustré, car on a l’impression que tout se décide chez les ministres de l’Economie et des Finances."
09-12-2010


Nicolas Schmit, le ministre luxembourgeois du Travail et de l’Immigration, a pris la parole le 9 décembre 2010 lors du colloque "Luxembourg 2020", le 4e colloque luxembourgeois consacré à l'économie de la connaissance dans une perspective européenne dans le cadre de la stratégie Europe 2020.

Faisant le bilan de la stratégie de Lisbonne après sa réforme en 2005, une stratégie à laquelle la stratégie Europe 2020 a succédé, il a déclaré que malgré la réforme, cette stratégie de Lisbonne n’avait "pas été très concluante". Pour lui, l’approche de l’UE qui a surtout misé sur les TIC, a été "une approche naïve". De même, l’objectif de devenir l’économie fondée sur la connaissance la plus importante et la plus compétitive a été bien péremptoire, « une approche technocratique ». « Personne n’a compris, même pas les acteurs économiques », a conclu le ministre sur la stratégie de Lisbonne.

Abordant la question des nouveaux indicateurs mis en avant par la stratégie 2020, il a souligné que "Europe 2020 a été conçu avant que toute la dimension de la crise financière n’ait été perçue". Des questions ne manqueront donc pas de se poser. Comment par exemple lier la stratégie Europe 2020 aux obligations des pays en crise de la zone euro qui doivent réajuster leurs politiques budgétaires ? La zone euro s’est selon lui révélée plus fragile qu’on ne l’imaginait. Le pouvoir des marchés financiers n’a pas été compris, ou compris trop tard.

Comme ministre du Travail, Nicolas Schmit a dit être "frustré, car on a l’impression que tout se décide chez les ministres de l’Economie et des Finances." L’emploi en soi ne semble pas être le premier souci d’Europe 2020. L’emploi apparaît pour Schmit dans des contextes plus économiques que sociaux, de sorte que lui-même nourrit la crainte que les volets emploi, éducation ou inclusion d’Europe 2020 "ne soient pas pris au sérieux dans l’urgence".

Comment alors faire entrer la question de l’emploi dans le discours européen et dans Europe 2020 ? Schmit a admis que la stratégie Europe 2020 est une meilleure opération de relations publiques pour l’UE que la stratégie de Lisbonne. Reste que la réalité et la recherche économique montrent que plus de croissance ne conduit pas à la réduction de la pauvreté. Les "working poor" deviennent de plus en plus nombreux.

L’UE devrait avoir, comme les Européens, le souci de son modèle social, c’est-à-dire de son financement dans un contexte où la population vieillit, où l’augmentation du taux d’emploi s’avère de plus en plus difficile et où la productivité des économies dépend du degré de qualification des travailleurs. De ce fait l’éducation, la formation deviennent des dossiers cruciaux. D’autant plus que les pays émergents qualifient à tour de bras et forment, bon an mal an, un nombre infiniment plus important d’ingénieurs que les universités européennes. "La course à l’innovation a commencé, et la Chine offre entretemps plus que de la basse valeur ajoutée."

Nicolas Schmit a ensuite mis en garde contre le fait que "le projet UE n’est plus si populaire". De grands problèmes d’instabilité politique et sociale finiront selon lui par se poser dans les pays en voie de réajustement économique, comme la Grèce et l’Irlande, mais aussi dans d’autres pays qui ont pris des mesures de réformes draconiennes, si cette période de réajustement devait durer trop longtemps. Les réflexes nationalistes sont déjà nettement perceptibles à travers l’UE. "J’espère néanmoins que la solidarité communautaire prévaudra", a conclu Nicolas Schmit.