"Par un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 21 janvier, la Belgique et la Grèce ont été condamnées dans une affaire dans laquelle un demandeur d'asile a été transféré, en vertu du règlement Dublin II, de la Belgique vers la Grèce", rappelle la députée socialiste Lydie Err dans une question parlementaire adressée le 28 janvier 2011 à Nicolas Schmit, ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration.
"Dans le cas de la Grèce, la Cour a dénoncé les conditions de détention et d'existence du demandeur d'asile concerné et des défaillances de la procédure d'asile. La Cour a par ailleurs affirmé que ces défaillances auraient dû être connues des autorités belges au moment où l'ordre d'expulsion a été délivré", poursuit la députée.
La députée cite plus avant un communiqué de presse de la Cour selon lequel les "autorités belges ne devaient pas se contenter de présumer que le requérant serait traité conformément aux garanties consacrées par la Convention; elles devaient vérifier comment, en pratique, les autorités grecques appliquaient leur législation en matière d'asile".
"Alors que le bulletin Agence Europe en conclut que la Cour remet en cause le fondement du règlement Dublin II, d'autres sources indiquent que certains pays membres de l'UE, notamment le Royaume-Uni, la Suède, la Belgique, les Pays-Bas et l'Allemagne, auraient déjà décidé de suspendre tout transfert Dublin vers la Grèce", explique Lydie Err avant de poser au ministre un certain nombre de questions auxquelles il a répondu point par point.
Quelles conséquences l'arrêt de la Cour peut-il avoir sur le fonctionnement du règlement Dublin II ?
La conséquence immédiate de l'arrêt de la Cour européenne des Droits de l'Homme du 21 janvier 2011 est la non applicabilité actuelle du règlement Dublin Il à la Grèce. Un plan d'action est actuellement mis en œuvre afin d'aider les autorités grecques à se conformer à l'acquis communautaire en matière de protection internationale. En effet, l'arrêt de la Cour ne saurait dispenser les autorités grecques de se conformer aux standards européens
Le gouvernement luxembourgeois entend-il réagir face à cet arrêt ? Comment ? S’il ne l'a pas encore fait, le Luxembourg a-t-il l’intention de suivre les pays membres de l'UE précités et de suspendre tout transfert au titre du règlement de Dublin vers la Grèce ? Combien de demandeurs d'asile ont-ils été transférés par les autorités luxembourgeoises vers la Grèce selon le dispositif Dublin au cours des trois dernières années ?
Depuis 2008, 33 demandes (41 personnes) de reprise conformément au règlement Dublin II ont été adressées par le Luxembourg à la Grèce. Le gouvernement, conscient du traitement réservé aux demandeurs de protection internationale en Grèce, a cependant décidé de ne pas faire des transferts vers la Grèce. En 2010, deux personnes sont néanmoins retournées de plein gré en Grèce, alors qu'elles insistaient à pouvoir y retourner.
Qu'en est-il de la situation des demandeurs d'asile dans d'autres pays de l'UE ? Existe-t-il, à l’instar de la Grèce, d'autres pays dans lesquels les conditions d'accueil des demandeurs d'asile sont insuffisantes, de sorte que le pays qui y renvoie un demandeur d'asile au titre du règlement Dublin II risque une condamnation ?
Le gouvernement n'a pas connaissance d'autres Etats membres de l'Union européenne qui se trouveraient dans une situation identique ou analogue à celle de la Grèce.
L'arrêt de la Cour aura-t-il des conséquences sur les discussions actuelles en vue de la refonte du règlement Dublin II ? Les débats récents au sein du Conseil de l'UE sur la refonte du règlement Dublin II ont fait ressortir des divergences au sujet de l'instauration d'un mécanisme dérogatoire qui permettrait de suspendre temporairement le renvoi de demandeurs d'asile dans le premier pays d'accueil au cas où ce pays est confronté à un afflux massif et soudain de migrants. Quelle position le Gouvernement luxembourgeois défend-il à ce sujet ? D’autres sujets à discussion empêchent-ils le Conseil de trouver une position commune dans ce dossier ?
A l'heure actuelle, le problème principal posé dans le cadre de la refonte du règlement Dublin II est celui d'un éventuel mécanisme de suspension. En effet, les Etats membres n'arrivent pas à se mettre d'accord sur l'existence et la finalité d'un tel mécanisme, certains Etats membres étant d'avis que le système Dublin Il ne saurait constituer un système de "burden-sharing", d'autres estimant cependant qu'un tel mécanisme de solidarité est nécessaire, notamment au vu de l'arrêt de la Cour européenne des Droits de l'Homme.
Le Luxembourg est d'avis que Dublin Il n'est pas un système de "burden-sharing", et que d'autres mécanismes de solidarité devraient jouer à l'égard de pays d'accueil confrontés à des afflux massifs de demandeurs d'asile. Néanmoins, au vu de l'arrêt de la Cour européenne des Droits de l'Homme, et étant donné que d'autres mécanismes de solidarité n'auront pas le résultat escompté dans de très brefs délais, le gouvernement est d'avis qu'un mécanisme d'urgence permettant une suspension du règlement Dublin II devrait pouvoir être discuté.