Le Premier ministre Jean-Claude Juncker a commenté dans une interview accordée au journal "Münchener Merkur" et publiée le 14 mai 2011 la décision du gouvernement danois de rétablir des contrôles douaniers permanents à ses frontières nationales.
"Nous courons le risque d’abandonner avec légèreté et sans aucune raison de grands acquis", a ainsi déclaré Jean-Claude Juncker ajoutant que, si quelqu’un lui avait dit il y a deux ans que surviendrait subitement un débat sur Schengen, il aurait douté de la santé mentale de cette personne.
"Celui qui restreint de nouveau la libre circulation des personnes en Europe s’en prend à ce qui a conquis le cœur des Européens", estime en effet le Premier ministre luxembourgeois pour qui "il n’est pas admissible que certains Etats réintroduisent le contrôle des personnes et que la Commission européenne soit exclue de ce processus". "Les frontières sont la plus terrible des inventions jamais faites par les politiciens", selon Jean-Claude Juncker qui a rappelé que nombre de "malheurs sont arrivés aux frontières européennes du 20e siècle".
"Je n’ai pas encore très bien compris ce que les Danois veulent vraiment, mais s’il devait s’avérer que ce n’est pas compatible avec le droit en vigueur, alors la Commission doit intenter un procès", a conclu Jean-Claude Juncker qui a rappelé qu'il est "permis de faire des contrôles sporadiques."
Le 11 mai 2011, le gouvernement danois avait décidé de rétablir "au plus vite" des contrôles douaniers permanents à ses frontières nationales avec l'Allemagne et la Suède pour lutter contre l'immigration illégale et la criminalité organisée.
La mesure a été prise sous la pression du Parti du Peuple danois (PPD, extrême droite) opposé à l'immigration, et elle a été annoncée sans aucune concertation préalable avec les autres pays concernés à la veille du Conseil JAI extraordinaire du 12 mai 2011.
La mesure danoise doit entrer en application à la fin du mois de mai 2011 et se traduira surtout par des contrôles à la frontière avec l'Allemagne, dans les ports et au bout du pont géant de l'Oeresund qui relie la Suède au Danemark.
Les ministres danois de l'Intégration, Soeren Pind, et de la Justice, Lars Barfoed, ont ensuite assuré le lendemain qu'il n'était pas question de rétablir des contrôles des passeports et des personnes.
Mais il se trouve que les frontières intérieures ont été abolies entre les Etats membres de l'Union européenne pour les marchandises, les services et les capitaux. Elles l'ont également été pour les personnes dans 22 des 27 pays de l'UE membres de l'espace Schengen, dont ne font pas partie la Grande-Bretagne, l'Irlande, Chypre, la Bulgarie et la Roumanie.
Dès le 13 mai 2011, la Commission européenne a averti les autorités danoises que les règles européennes n'autorisent pas les Etats membres à rétablir des contrôles douaniers permanents à leurs frontières nationales. Seuls des contrôles douaniers aléatoires sont autorisés. Elle a menacé d’entamer une procédure contre le Danemark devant la justice européenne si le gouvernement passe aux actes.
Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso s'est entretenu par téléphone avec le Premier ministre danois Lars Loekke Rasmussen pour l'informer de ce risque et lui a confirmé par écrit les préoccupations de la Commission.
"Une première évaluation juridique fait apparaître des doutes importants sur le respect par le Danemark de ses obligations et des dispositions des traités européens relatives à la liberté de circulation des biens, des personnes, des services et des capitaux s'il met en œuvre de manière permanente les mesures annoncées", a déclaré José Manuel Barroso.
La procédure d'infraction puis la saisine de la Cour européenne de Justice sont les deux armes utilisables par la Commission.