Dans la nuit du 18 au 19 octobre 2011, Parlement et le Conseil sont parvenus à un accord sur le règlement renforçant les normes et les exigences des pratiques relatives à la vente à découvert et aux contrats d'échanges sur risque de crédit (CDS), un produit financier qui protège contre le défaut de paiement. Les règles renforceront la transparence et les pouvoirs de l'autorité européenne de surveillance financière, et interdiront pratiquement les échanges CDS, compliquant ainsi la spéculation sur le défaut de paiement d'un pays.
Il s'agit de l'une des réglementations principales proposées en septembre 2010 par la Commission européenne en vue de lutter contre la crise financière. Elle renforcera les règles en matière de vente à découvert et de transactions CDS, deux pratiques accusées d'accroître la volatilité du marché. Les transactions CDS ont souvent été tenues pour responsables de l'aggravation potentielle des problèmes de la Grèce.
En juillet 2011, le Parlement européen réuni en plénière avait reporté son vote au sujet de ce texte de façon à laisser la porte ouverte aux négociations avec le Conseil.
L’eurodéputé luxembourgeois Robert Goebbels, négociateur pour le groupe S&D, a expliqué avoir donné son aval au compromis trouvé dans la mesure où celui-ci constitue "un pas de plus dans la lutte contre la spéculation financière". Mais Robert Goebbels a aussi exprimé ses regrets quant à la réticence dont ont témoigné les Etats membres dans ces négociations. "On aurait pu trouver un accord plus rapidement, et un accord plus contraignant si le Conseil et notamment si certains Etats n'avaient pas essayé de donner encore plus de satisfaction aux lobbyistes financiers", estime en effet l’eurodéputé luxembourgeois qui trouve que "le comportement du Conseil est en contradiction flagrante avec les déclarations pompeuses des Chefs d'Etat et de Gouvernement lors de leurs sommets".
Robert Goebbels s’est associé à ses confrères Pascal Canfin (Verts/ALE), rapporteur, et Markus Ferber (PPE) pour saluer dans un communiqué commun le compromis trouvé comme "un grand pas en avant vers une meilleure réglementation financière en Europe". Le Parlement européen s’est montré dur dans la bataille pour mettre fin à la spéculation sur la dette souveraine en Europe, indiquent les trois eurodéputés qui estiment que ce texte "démontre aux citoyens européens que l'Europe peut agir contre la spéculation quand elle en a la volonté politique".
Les négociateurs du Parlement européen sont parvenus à obtenir une interdiction sur les ventes à nu de CDS (acheter les contrats d'assurance contre les défauts de paiement sans posséder les obligations qui s'y rapportent), à une exception près : une autorité nationale aura la possibilité de lever temporairement l'interdiction si le marché de la dette souveraine ne fonctionne plus correctement. Toutefois cette possibilité serait intimement restreinte, car le texte mentionne un nombre limité d'indicateurs qui pourraient justifier l'action des autorités de régulation. En outre, dans un délai de 24 heures, l'Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) pourra publier un avis sur son site Internet dans le but de suspendre l'interdiction. Un avis négatif de l'AEMF aurait un poids politique.
Avec le compromis trouvé, il ne sera plus possible pour un hedge fund d'acheter des CDS grecs ou italiens sans détenir des obligations de ces États et donc ainsi spéculer sur la faillite du pays, s’est félicité Pascal Canfin.
Un autre élément clé pour renforcer la proposition de la Commission était, aux yeux des parlementaires, d'accroître les exigences en matière de déclaration. Le manque d'information était l'un des principaux problèmes rencontrés par les autorités de surveillance avant la crise. L'information supplémentaire à fournir aux autorités de surveillances nationales et européennes leur permettra d'effectuer un meilleur travail préventif en alertant plus tôt des risques potentiels.
Dans leur communiqué conjoint, les trois eurodéputés de la commission des Affaires économiques et monétaires saluent ainsi un règlement qui va permettre d’offrir un meilleur cadre, mieux harmonisé, aux ventes à découvert dans l’UE. Avant de vendre une action à découvert, les traders devront au moins de localiser les actions et assurer leur livraison d’ici la fin de la journée de bourse. Ce qui permettra d’assurer la transparence. "Il ne sera plus possible de construire des positions courtes importantes sans en notifier les régulateurs", se félicitent ainsi Pascal Canfin, Markus Ferber et Robert Goebbels.
Toutefois, la demande des députés qui souhaitaient que les ventes à découvert à nu ne soient plus possibles pendant plus d'une journée a été vidée d'une bonne partie de sa substance. La règle stricte appelée "locate and reserve rule" selon laquelle un trader doit non seulement donner une notification lorsqu'il a l'intention d'emprunter les titres en question mais également obtenir la garantie qu'il sera en effet capable de les emprunter, a été affaiblie et impose maintenant au trader une obligation de localisation et l'oblige à avoir des "motifs raisonnables" de penser qu'il est capable d'emprunter les titres de la source localisée.
Les députés appartenant aux groupes politiques qui appuient l'accord sont également parvenus à préserver les pouvoirs de l'Autorité européenne des marchés financiers, l'AEMF, en particulier en vue de réduire la vente à découvert, jouant le rôle d'arbitre dans le cas où une autorité nationale souhaiterait introduire des mesures pour s'attaquer à une situation exceptionnelle, ainsi qu'en vue d'obliger les autres autorités à introduire des mesures exceptionnelles pour lutter contre des situations difficiles.
Le texte va également permettre une meilleure coordination au niveau européen dans les situations de crise, se félicitent ainsi les trois eurodéputés : l'AEMF aura ainsi le pouvoir d'imposer ses décisions sur les marchés actions aux régulateurs nationaux. Le Parlement aurait souhaité que l'AEMF ait les mêmes prérogatives en matière de dette souveraine, ce que les États ont cependant refusé.
Le Conseil et le Parlement dans son ensemble doivent maintenant ratifier l'accord. Un vote en plénière au Parlement devrait avoir lieu la troisième semaine de novembre. Ce règlement devrait entrer en vigueur en novembre 2012.