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Entreprises et industrie - Environnement
La Chambre des Métiers perçoit la transposition de la directive "déchets" comme une grande opportunité économique et industrielle pour le Luxembourg
10-11-2011


La Chambre des métiersLe 25 octobre 2011, la Chambre des Métiers a approuvé son avis sur le projet de loi 6288 qui transpose en droit national la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets, sur lequel le Syvicol s’est lui aussi prononcé.

Pour la Chambre des Métiers, "le projet de loi redéfinit les principes de gestion des déchets au Luxembourg, par référence au cadre juridique applicable au traitement des déchets dans l’UE et se place dans le prolongement des principes institués par la loi modifiée du 17 juin 1994 relative à la prévention et à la gestion des déchets. » qui « avait déjà introduit une hiérarchie des déchets".

Avec la transposition de la directive de 2008, constate la Chambre des Métiers, "cette hiérarchie des déchets sera étendue à cinq niveaux", à savoir

  • la prévention,
  • la réutilisation,
  • le recyclage,
  • la valorisation et
  • l'élimination.

La directive poursuit pour la Chambre des Métiers un objectif plus global : la protection de l’environnement et de la santé humaine par la prévention et la réduction des effets nocifs dus aux déchets. Elle va au-delà du simple aspect de la gestion des déchets pour tenir également compte de la réduction des nuisances résultant de l’utilisation rationnelle des ressources et de l’amélioration de l’efficacité de leur utilisation.

La Chambre des Métiers marque son accord aux principes de la directive et conduit sa réflexion sur un plan à la fois national et européen

La Chambre des Métiers "souscrit entièrement » aux principes énoncés dans le projet de loi en ce qui concerne la protection de l’environnement, l’organisation efficiente de la gestion des déchets surtout par la prévention des déchets ainsi que l’utilisation rationnelle des ressources et des matières".

La Chambre des Métiers se place dans son avis sur un plan à la fois national et européen. Elle écrit : "Si l’Europe et le Luxembourg veulent être efficaces dans l'utilisation des ressources, il importera de réaliser des progrès technologiques, de faire évoluer en profondeur les systèmes énergétiques et économiques, au niveau de tous les secteurs, et de modifier les habitudes de production et de consommation." Une meilleure politique de prévention et de recyclage des déchets et l'exploitation plus rationnelle des ressources qu’elle entraîne "offre une possibilité de maîtriser les coûts de production tout en réduisant la consommation d'énergie et de matières premières", ce qui renforce finalement la compétitivité nationale.

Pour la Chambre des Métiers, "l’augmentation des taux de recyclage fera baisser la pression sur la demande de matières premières primaires", "contribuera à la réutilisation de matériaux précieux qui, autrement, seraient perdus" et "réduira la consommation énergétique et les émissions de gaz à effet de serre résultant des opérations d'extraction et de transformation". Cette manière d’aborder les choses s’intègre pour la Chambre des Métiers dans le cadre de la stratégie Europe 2020 qui est ici une "stratégie visant à transformer l'UE en une économie circulaire» fondée sur une culture du recyclage, dans le but de réduire la production de déchets et d'employer ces derniers comme ressource".

Comme le Syvicol dans son avis, la Chambre des Métiers déplore néanmoins que les règlements grand-ducaux d’exécution qui précisent la mise en œuvre de la loi-cadre n’aient pas été communiqués en même temps que le projet de loi. Elle plaide en conséquence "en faveur d’une coopération étroite entre les autorités concernées et les milieux professionnels en vue de la finalisation des règlements grand-ducaux d’exécution".

De l’action "SuperDrecksKëscht" au développement d’une stratégie industrielle européenne partant du Luxembourg dans le domaine des déchets

Les axes de réflexion de la Chambre des Métiers portent par ailleurs sur "le succès que connaît l’action SuperDrecksKëscht au Luxembourg", "le défi lié à la mise en place d’une véritable politique de prévention des déchets", le "positionnement que le Luxembourg veut adopter à l’avenir en tant que pays à taille réduite et ne possédant que des ressources naturelles très limitées".

La Chambre des Métiers réfléchit en fait en termes d’opportunités, quand elle écrit que "le développement d’une politique conséquente de diversification par l’implantation de PME/PMI actives dans le domaine du recyclage et de l’utilisation rationnelle des matières rares pourrait offrir des perspectives économiques nouvelles pour les entreprises luxembourgeoises en Europe et dans le monde entier".

Dans son avis, la Chambre des Métiers met longuement en évidence le fait que la "SuperDrecksKëscht" a permis d’assurer "une cohérence nationale" dans le domaine de la gestion des déchets problématiques en provenance des particuliers et de la gestion des déchets en provenance des PME » du fait « que cette action est organisée de façon uniforme sur l’ensemble du territoire national sous la tutelle d’une entité nationale ». La mise en place du système a rapidement permis de constater qu’il existe un besoin de la part des entreprises de recevoir une assistance dans la mise en œuvre d’une gestion écologique de leurs déchets. C’est ainsi que le concept "SuperDrecksKëscht fir Betriber" a été élaboré et la mise en œuvre au sein des différentes entreprises est promue par l’action. Le nombre d’entreprises qui ont adhéré est en augmentation constante, avec début 2011 3 406 entreprises qui emploient 180152 personnes, soit plus que 50 % de l’emploi total au Luxembourg.  De plus est, en 2010, l’action "SuperDrecksKëscht" a été reconnue "bonne pratique européenne" par la Commission européenne.

La marque "SuperDrecksKëscht" est activement promue à l’étranger et a été adoptée ou est sur la voie d’être adoptée dans d’autres pays ou régions  - Suisse, Hongrie, Suède, Grèce, Chypre - signale la Chambre des Métiers. Elle en déduit que "le fait d’avoir au Luxembourg des actions comme la 'SuperDrecksKëscht' peut être un argument central dans la définition d’une politique plus générale en vue de d’implantation d’entreprises hautement spécialisées dans le domaine du recyclage de matières rares et de la réutilisation de celles-ci dans un processus de production nouveau."

L’implémentation d’une stratégie plus offensive au niveau d’un secteur ou cluster permettant ainsi une diversification du tissu économique national en direction de l’utilisation rationnelle des ressources rares pourrait offrir à terme de nouvelles opportunités économiques au Luxembourg et un potentiel d’emplois nouveaux.

Bref, "la Chambre des Métiers est convaincue que la promotion au niveau international du modèle de 'SuperDrecksKëscht' et des autres partenariats, à savoir ECOTREL, ECOBATTERIEN et VALORLUX, pourraient favoriser la mise en œuvre d’une politique de diversification de PME/PMI du domaine du recyclage des « déchets ». Cela influencerait positivement l’image de marque du Luxembourg dans le monde en tant que pays développant une politique conséquente liant écologie, économie et utilisation rationnelle des ressources. » De surcroît, « une telle initiative pourrait également créer des synergies avec d’autres secteurs à potentiel de développement actuellement promus à l’étranger, tels que la logistique." A cette fin, La Chambre des Métiers préconise la mise en place d’une "task force" rassemblant tous les acteurs qui de près ou de loin pourraient soutenir la création d’un cluster "management des ressources et recyclage de matières".

Quelques problèmes pratiques liés à la mise en œuvre

Cette adhésion ne veut pas dire que la Chambre des Métiers ne mette pas en relief certains problèmes dans la mise en œuvre de la directive.

Ainsi, elle pense que si les établissements privés ou publics ainsi que les immeubles résidentiels doivent être dotés des infrastructures nécessaires permettant la collecte séparée des différentes fractions et qualités de déchets dont ils disposent, il importe de prévoir pour eux des périodes d’adaptation transitoires, leur laissant le temps de prendre les mesures qui s’imposent.

Elle demande par ailleurs que, partant de la situation luxembourgeoise, ou d’autres fractions que les fractions papier, métal, plastiques et verre prévues par la directive sont systématiquement soumises à des collectes séparées et au recyclage, et dans un souci de cohérence dans la gestion des déchets sur le territoire national, un règlement grand-ducal détermine ces autres fractions à collecter de manière séparée.

Elle voudrait aussi un suivi qui permette de vérifier si 50 % des déchets ménagers et assimilés et 70 % des déchets de construction sont d’ici 2020 recyclés ou préparés pour le réemploi, et que ce suivi soit mis en place après une consultation entre les autorités compétentes et les organisations représentatives des intérêts des entreprises de construction. Elle plaide en général que par cette voie, soit définie « une stratégie globale entre tous les acteurs concernés en vue de l’atteinte de l’objectif fixé en terme de taux de recyclage » pour 2020 qui implique aussi un travail en amont dans le cadre de la production des matériaux.

La loi,  qui avance des "principes d’autosuffisance et de proximité", contient des clauses d’interdiction des transferts de déchets interrégionaux et hors du Luxembourg. La Chambre des Métiers plaide pour plus de flexibilité : "Une ouverture plus grande pourrait s’avérer nécessaire plus particulièrement en cas de développement d’un cluster d’entreprises et d’acteurs dans le domaine du recyclage et de l’utilisation rationnelle des matières rares au Luxembourg. Dans ce cas, il s’avérerait éventuellement intéressant de réaliser un prétraitement de certaines catégories de déchets à l’étranger avant de les valoriser ou de les recycler au Luxembourg."

La Chambre des Métiers constate que la loi introduit deux grands principes en matière de coûts de la gestion des déchets : le principe du pollueur-payeur et le principe du coût réel de la gestion des déchets.

En pratique, constate-elle, le secteur privé qui gère les déchets non ménagers applique ses prix selon ces principes.

Les taxes communales relatives à la gestion des déchets doivent, elles aussi, couvrir à l’avenir l’ensemble des frais encourus par les communes. Cela veut dire pour la Chambre des Métiers que "les taxes mises à charge des différents ménages et, le cas échéant, des établissements, doivent tenir compte des quantités de déchets réellement produites". Elles doivent donc "comporter au moins une composante variable calculée en fonction du poids et / ou du volume des déchets ménagers résiduels en mélange effectivement produits ainsi qu’une composante variable calculée en fonction du poids et / ou du volume des déchets encombrants effectivement produits."

La Chambre des Métiers n’est pas contre ces solutions, mais craint que ces prix n’affectent la compétitivité des entreprises luxembourgeoises concernées dans la Grande Région.

Elle croit par contre dans l’effet dissuasif des taxes communales qui incluent la notion de coût réel sur la production de déchets. Et cet effet de dissuasion serait selon elle-même maximisé si en même temps les taxes communales étaient neutralisées au niveau de l’échelle mobile des salaires. Mais elle est pessimiste sur la mise en œuvre de ce principe par les communes, "étant donné l’autonomie communale dans ce domaine".

La Chambre des Métiers approuve de l’autre côté chaudement l’approche "généralement connue sous le nom de 'Green Public Procurement (GPP)'" qui oblige les personnes de droit public à utiliser "dans la mesure du possible" pour leurs propres besoins ou à prescrire dans le cadre de marchés publics des services des produits ou des substances qui contribuent à la réalisation d’objectifs comme l'utilisation rationnelle des ressources et des matières, et la réduction de l'impact des déchets sur ces ressources, en particulier, et sur l'environnement, en général.

Comme à d’autres occasions (cf. de l’avis du 19 juillet 2010 de la Chambre des Métiers concernant le projet de loi portant a) simplification et accélération de la procédure d’autorisation des établissements classés et b) modifiant la loi modifiée du 10 juin 1999 relative aux établissements classés.), et "à titre principal, la Chambre des Métiers réitère ses critiques véhémentes face au choix opéré par les auteurs de ne pas recourir en général au principe du 'silence de l’administration vaut autorisation' ".

La Chambre des Métiers est aussi très critique à l’égard des inspections prévues dans la loi qui peuvent être menées dans le cadre de la recherche et de la constatation d’infractions par des fonctionnaires de l’Administration de l’environnement qui ont la qualité d’officiers de police judiciaire. Elle suit le Conseil d’Etat qui marque "ses réserves les plus nettes face au foisonnement des prérogatives de puissance publique attribuées à toutes sortes de fonctionnaires qui, a priori, n'ont pas les connaissances requises pour procéder dans les formes de la loi à la recherche des infractions et au rassemblement des preuves" et qui entament de ce fait la compétence générale en matière de police judiciaire de la Police grand-ducale.

La Chambre des Métiers plaide aussi pour des sanctions praticables sur une base juridique claire. La Chambre des Métiers "n’est pas en faveur d’un système de sanctions pénales dans le cadre du présent projet de loi et plaide plutôt en vue d’une extension des sanctions administratives et avertissements taxés. L’introduction de cette nouvelle façon de sanctionner par le biais d’avertissements taxés devrait permettre d'intervenir directement en cas de constat d'une infraction à sanctionner par cette voie, et de contribuer ainsi à un meilleur respect des prescriptions de la législation en matière de déchets."

Finalement, la Chambre des Métiers recommande que suite à la transposition de la directive, une campagne d’information soit lancée pour conseiller et informer les établissements,  entreprises ou installations concernés par la gestion des déchets dans le sens large du terme.