Principaux portails publics  |     | 

Economie, finances et monnaie - Traités et Affaires institutionnelles
Pour le président du LSAP, Alex Bodry, la règle d'or constitutionnelle sur l’équilibre budgétaire est une "règle de dupes" et le Luxembourg ferait mieux de réviser sa loi budgétaire ordinaire
12-12-2011


Dans un article publié dans le tageblatt du 9 décembre 2011, - rédigé donc avant la décision du Conseil européen des 8 et 9 décembre 2011 sur la mise en place d’une "nouvelle règle LSAPbudgétaire" qui devrait être introduite dans les systèmes juridiques nationaux des États membres au niveau constitutionnel ou équivalent et dont la transposition pourrait être vérifiée par la CJUE, - le député socialiste Alex Bodry, président du LSAP, le deuxième parti gouvernemental luxembourgeois, s’en prend "à la fameuse règle d'or, celle de l'équilibre budgétaire", dont il attribue la paternité au président français Nicolas Sarkozy. Il se demande "en quoi une révision constitutionnelle peut apporter une plus-value" et regrette que "les autres Etats européens se soient laissés entraîner dans cette voie sans issue".

Pour Alex Bodry, l'intégration d'une règle d'or dans le texte de la Constitution luxembourgeoise se heurte à quatre "objections majeures" qu’Alex Bodry décline comme suit : 

"1. Une telle règle de fond est étrangère à l'orientation générale de notre constitution qui définit les institutions et détermine les rapports entre elles. Elle édicte des règles de compétence et non des règles de fond, abstraction faite du chapitre relatif aux droits et libertés."

"2. La politique budgétaire ne peut se réduire à la recherche d'un équilibre entre recettes et dépenses. Le budget doit assurer le financement de services publics, permettre des investissements à long terme et promouvoir une politique de redistribution des revenus. Il en est de même de la dette publique qu'il serait faux de diaboliser, si elle reste modérée et limitée au financement partiel des grandes infrastructures au bénéfice de plusieurs générations."

"3. Notre système de contrôle de la constitutionnalité des lois ne permet pas de veiller au respect d'une telle règle constitutionnelle. Il n'est guère concevable que la loi sur le budget de l'Etat fasse l'objet d'une question préjudicielle dans le cadre d'un litige judiciaire. La Cour constitutionnelle luxembourgeoise n'effectue pas de contrôle direct de la constitutionnalité d'une loi. Un tel texte risquerait donc de rester lettre morte. Il est intéressant de noter qu'en Allemagne l'ancienne règle budgétaire constitutionnelle a été violée à une dizaine de reprises."

"4. Il est pour le moins inhabituel que des chefs d'Etats et de gouvernement prennent l'engagement de modifier les constitutions nationales en dehors de toute convention internationale en bonne et due forme. Cette pression politique des exécutifs dans un domaine de compétence traditionnel des parlements (assemblées constituantes) est difficilement acceptable."

Le président du LSAP fait par ailleurs le constat que "les règles d'or adoptées à l'heure actuelle dans certains Etats européens, sous la pression de la crise de la dette souveraine et de la folie des marchés financiers" divergent sensiblement dans leur formulation et sont souvent floues. Pour lui, "toutes ces gesticulations constitutionnelles se rapprochent plutôt de la politique-spectacle que d'un Etat de droit respectable".

Pour le Luxembourg, Alex Bodry prône l’abandon de "l'idée d'une révision constitutionnelle inutile voire dangereuse". Il préfère que le pouvoir parlementaire se concentre prioritairement sur l’adaptation aux règles nouvelles du semestre européen de "notre législation ordinaire des finances publiques", la loi du 8 juin 1999 sur le budget, la comptabilité et la trésorerie de l'Etat. Il prône également que soient optimisées les projections économiques et financières du pays.