La Commission européenne a présenté le 7 décembre 2011 une stratégie visant à promouvoir un meilleur accès au financement pour les petites et moyennes entreprises (PME). Cette stratégie comprend un plan d'action de l'UE qui prévoit de renforcer le soutien financier provenant du budget de l'UE et de la Banque européenne d'investissement (BEI), ainsi qu’une proposition de règlement qui établit des règles uniformes relatives à la commercialisation de fonds de capital-risque.
Cette proposition de la Commission fait partie de la série de mesures entreprises suite au réexamen financement de février 2011 de la mise en œuvre du "Small Business Act" au cours duquel la Commission avait proposé d’améliorer l’accès des PME au marché des fonds de capital-risque afin de réaligner ces mesures sur la stratégie Europe 2020.
La proposition sur le capital-risque a été transmise au Parlement européen et au Conseil et va faire l’objet de négociation pour être ensuite adoptée dans le cadre de la procédure de codécision.
Dans le contexte de la crise actuelle - marquée par une baisse de l'activité de prêt à l'économie réelle - où ces entreprises éprouvent des difficultés de plus en plus grandes à obtenir des prêts, l'accès au financement est essentiel pour améliorer la compétitivité et renforcer le potentiel de croissance des PME selon la Commission.
Outre les mesures présentées le 5 décembre 2011, dont un montant de 1,4 milliard d'euros de nouvelles garanties financières dans le cadre du programme pour la compétitivité des entreprises et PME, la Banque européenne d'investissement maintiendra son activité de prêt aux PME à un rythme soutenu, proche du niveau de 2011 qui correspond à 10 milliards d’euros.
Michel Barnier, commissaire européen chargé du marché intérieur, a déclaré qu’ "il nous faut plus de capital-risque en Europe. En aidant les entreprises à devenir plus innovantes et plus compétitives, le capital-risque donnera naissance aux entreprises du futur en Europe. Pour soutenir les "jeunes pousses" les plus prometteuses, les fonds de capital-risque doivent prendre de l'ampleur et diversifier davantage leurs investissements. Les propositions présentées ce jour contribueront à la mise en place de ce marché émergent."
Pour la Commission européenne, la réussite économique de l'Europe est largement tributaire de la capacité des petites et moyennes entreprises à réaliser pleinement leur potentiel de croissance. Les PME créent plus de la moitié de la valeur ajoutée totale dans le secteur de l’économie marchande non financière et sont à l’origine de 80 % des emplois créés en Europe au cours des cinq dernières années.
Grâce à son plan d'action, la Commission souhaite faciliter l’accès des 23 millions de PME européennes au financement et contribuer ainsi notablement à la croissance. Les mesures réglementaires et autres qui sont proposées visent à maintenir le flux de crédit en faveur des PME et à améliorer leur accès aux marchés des capitaux, en augmentant leur visibilité à l'égard des investisseurs présents sur les marchés des PME et qui prennent des participations dans les PME et en réduisant les formalités réglementaires et administratives.
Pour Antonio Tajani, vice-président de la Commission européenne en charge de l’industrie et de l’entrepreneuriat, "la priorité numéro un pour sortir de la crise est de faciliter l'accès au financement pour les PME. Notre plan d’action souligne que l’Europe fait tout ce qui est en son pouvoir pour que les PME aient un meilleur accès aux sources de financement. Nous avons pour objectif de renforcer nos instruments financiers européens destinés aux PME et d'offrir à ces dernières un meilleur accès aux marchés financiers."
Le nouveau règlement doit permettre aux fonds de capital-risque de mobiliser plus facilement des capitaux dans l'ensemble de l'Europe, au bénéfice des entreprises en phase de démarrage. L'approche est simple : dès lors qu'une série d'exigences sont satisfaites, tous les gestionnaires de fonds admissibles peuvent collecter des capitaux sous la dénomination de "fonds de capital-risque européen" dans l'ensemble de l'UE.
Selon la proposition de la Commission, les gestionnaires de fonds n'auront plus à satisfaire à des exigences complexes qui diffèrent d'un État membre à l'autre. Grâce à la mise en place de règles uniformes, les fonds de capital-risque seraient en mesure d'attirer davantage d'engagements en capital et prendront plus d'ampleur.
Le capital-risque, qui fournit des fonds aux entreprises en phase de démarrage, constitue une source importante d'investissement à long terme pour les PME jeunes et innovantes. Les fonds n'ont cependant qu'une taille réduite et ne peuvent offrir que des capitaux limités, de sorte qu'ils n'ont pas pu jouer un rôle plus important dans le financement de démarrage jusqu’à présent. Les PME continuent donc à dépendre de prêts bancaires à court terme.
Il ressort d’un rapport cité par la Commission qu'une société soutenue par des investisseurs de capital-risque à long terme réussit mieux qu'une société qui doit s'appuyer sur des financements bancaires à court terme. On en attribue généralement la cause au fait que les fonds de capital-risque procèdent à un tri rigoureux avant d'investir dans une entreprise.
Mais la taille moyenne des fonds de capital-risque européens est limitée et bien trop petite par rapport à la taille optimale nécessaire pour qu'une stratégie d'investissements diversifiés puisse véritablement fournir un apport en capital et avoir ainsi une réelle incidence. Alors que les fonds de capital-risque dans l'Union européenne tournent en moyenne autour de 60 millions d'euros, la taille moyenne de leurs équivalents américains est de 130 millions d'euros.
La Commission s’appuie sur des études économiques pour avancer que les fonds de capital-risque peuvent faire une réelle différence pour les industries dans lesquelles ils investissent dès qu'ils atteignent une taille d'environ 280 millions d'euros. Les fonds de capital-risque américains investissent en moyenne environ 4 millions d'euros dans chaque entreprise, alors que les volumes d'investissement réunis par les fonds européens ne dépassent pas une moyenne de 2 millions d'euros par entreprise. Pour ce qui est des apports en capital de démarrage, la moyenne par entreprise est de 2,2 millions d'euros aux Etats-Unis contre 400 000 euros dans l'UE.
Si les fonds de capital-risque deviennent plus grands, ils apporteraient un volume de capital plus important pour les entreprises et pourraient se spécialiser dans des secteurs déterminés comme les technologies de l'information, les biotechnologies ou les soins de santé. Cet avantage se répercuterait sur les PME, qui gagneraient en compétitivité sur le marché mondial selon la Commission.
La proposition établit des règles uniformes régissant la commercialisation des fonds sous l’appellation de "fonds de capital-risque européen". Tous les fonds qui sont gérés sous cette dénomination doivent respecter des règles et des normes de qualité uniformes (notamment des règles en matière d’information des investisseurs ainsi que des exigences opérationnelles) lorsqu'ils recueillent des capitaux dans l'ensemble de l'UE. Grâce à ces règles uniformes, les investisseurs sauront exactement ce qu'ils obtiendront en investissant dans un fonds de capital-risque européen. Le "fonds de capital-risque européen" est défini par trois exigences essentielles :
La proposition instaure une approche homogène concernant les catégories d'investisseurs qui sont admissibles pour engager des capitaux dans un fonds de capital-risque européen. Les investisseurs admissibles seront des investisseurs professionnels au sens de la directive de 2004 concernant les marchés d’instruments financiers (MiFID) et certains autres investisseurs classiques de capital-risque (tels que des particuliers fortunés ou des "business angels"). Les règles uniformes sur les investisseurs de capital-risque garantiront que la commercialisation pourra être adaptée aux besoins de ces catégories d'investisseurs.
Le règlement prévoit, pour tous les gestionnaires de fonds de capital-risque éligibles, un passeport européen donnant le droit de commercialiser ces fonds auprès des investisseurs admissibles dans l'ensemble de l'UE. Il s'agit d'une amélioration notable par rapport aux règles en vigueur dans le domaine de la gestion de patrimoine, notamment la directive sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs (AIFMD). Par ailleurs, les règles de l'AIFMD instaurent un cadre juridique visant typiquement les fonds spéculatifs et les fonds de capital-investissement et conviennent moins bien pour les fonds de capital-risque traditionnels, qui devraient bénéficier d'un régime sur mesure.