Les ministres des Finances de la zone euro se sont réunis le 14 mai 2012 pour une réunion à l’issue de laquelle ils ont réaffirmé leur volonté de mener la stratégie de consolidation qu’ils ont engagé pour faire face à la crise. Il n’y a pas de contradiction entre la consolidation menée et une politique orientée vers la croissance, a ainsi redit Jean-Claude Juncker, qui présidait la réunion. Une réunion qui a surtout été l’occasion de faire le point sur la situation des différents pays de la zone euro. Les ministres ont ainsi été informés des avancées réalisées dans la mise en œuvre des programmes irlandais et portugais, ils ont évoqué les mesures prises ou sur le point d’être prises en Slovénie, à Chypre, ou encore aux Pays-Bas. Mais ce sont essentiellement l’Espagne et la Grèce qui ont été au centre de leurs attentions.
L’Espagne a en effet annoncé le 11 mai 2012 des mesures visant à renforcer son secteur bancaire. "Une réforme rapide et profonde des banques est la pierre angulaire de la réponse de l'Espagne à la crise", avait aussitôt réagi Olli Rehn, le commissaire en charge des Affaires économiques et monétaires.
La réforme bancaire passe par une hausse des provisions exigées du secteur pour faire face à d'éventuelles pertes sur ses actifs immobiliers, qui représentera un effort de 30 milliards d'euros, en plus des 53,8 milliards déjà imposés lors d'une précédente réforme. Ce sont les entités elles-mêmes qui feront leurs provisions mais en cas de besoin, le Fonds d'aide public au secteur (Frob) pourra leur prêter de l'argent, via une prise de participation, ont indiqué les autorités espagnoles. Les ministres des Finances ont salué à leur tour ces mesures, tout en appelant les autorités espagnoles à accélérer une évaluation externe du secteur bancaire espagnol et à "mettre en place des garde-fous supplémentaires si nécessaire".
Quant à la Grèce, les ministres ont "pris note des résultats des élections législatives du 6 mai", et observent avec attention "le processus démocratique en cours". Les membres de l'Eurogroupe "espèrent la formation rapide d'un nouveau gouvernement" grec, qui dispose "d'une majorité parlementaire suffisante", a expliqué Jean-Claude Juncker.
Mais il a surtout assuré avec fermeté "l'intention inébranlable de conserver la Grèce" dans la zone euro. "La possibilité que la Grèce sorte de la zone euro n'a pas été l'objet de débat, personne n'a plaidé dans ce sens" au cours de la soirée, a-t-il insisté. Interrogé sur la possibilité que la Grèce sorte du "club" de l'euro, comme l'a évoqué récemment le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, Jean-Claude Juncker a été on ne peut plus clair : "Je m'y oppose fermement". "Nous sommes 17 Etats membres copropriétaires de notre monnaie commune, je n'envisage pas une seconde que la Grèce quitte la zone euro, c'est du non-sens, c'est absurde, c'est de la propagande", a déclaré le Premier ministre luxembourgeois.
"Nous n'avons pas à faire la leçon à la Grèce", a-t-il insisté. "Nous sommes convenus d'un programme et ce programme doit être mis en œuvre, mais je n'aime pas la façon dont certains menacent la Grèce jour après jour, ce n'est pas une manière de traiter des amis et citoyens dans l'Union européenne", a-t-il encore souligné.
"L’UE et le FMI ont beaucoup contribué à aider la Grèce" et l'ont encore fait en débloquant une tranche d'aide de 5,2 milliards d'euros la semaine dernière, a souligné Jean-Claude Juncker. Sur cette somme, 4,2 ont été versés, et le reste le sera "avant la fin du mois de juin", a-t-il précisé.
"L'Eurogroupe mesure la portée des efforts consentis par les citoyens grecs, il ne s'agit pas de relâcher ces efforts, au contraire, les réformes structurelles sont plus que jamais nécessaires", a insisté le président de l’Eurogroupe.
Quant à savoir si la mise en œuvre du plan d'austérité grec peut éventuellement être aménagé, Jean-Claude Juncker a estimé qu'il fallait "aborder les points dans l'ordre : d'abord un gouvernement grec, ensuite celui-ci doit faire savoir qu'il s'engage en faveur du programme convenu"."Et si apparaissent des circonstances extraordinaires, je n'exclus pas a priori qu'on parle d'une prolongation des délais", a-t-il dit.
"Nous sommes relativement préoccupés au sujet de la situation en Grèce, car même si un gouvernement d’experts devait venir, il serait nécessaire que le gouvernement ait d’une part une majorité au parlement et qu’il s’en tienne d’autre part aux conditions fixées par la zone euro", a rapporté pour sa part Luc Frieden, qui représentait le Luxembourg lors de cette réunion, au micro de Pierre Reyland, journaliste de RTL Radio Lëtzebuerg, au lendemain de l’Eurogroupe. "Nous voulons que la Grèce reste dans la zone euro, mais nous pensons aussi que la Grèce a intérêt à rester dans la zone euro", a précisé Luc Frieden, en ajoutant que "le nouveau gouvernement doit savoir que les conditions ne peuvent être modifiées".
L’espoir de Luc Frieden, c’est que les partis politiques grecs soient assez nombreux à comprendre qu’une sortie de la zone euro mettrait les Grecs eux-mêmes dans une situation extrêmement difficile, plus difficile pour la Grèce que pour le reste de la zone euro. Car, précise le ministre, "contrairement à deux ans auparavant, nous avons aujourd’hui les instruments pour éviter une plus forte contagion des autres pays". Mais si la Grèce devait sortir, cela aurait pour conséquence "beaucoup de chaos", craint Luc Frieden qui ne voit pas là "un bon scénario".
Comme il l’a résumé dans un entretien diffusé sur CNN le 14 mai au soir, "la priorité est pour nous de les garder dans la zone euro, pas à n’importe quel prix, mais aux conditions sur lesquelles il y a déjà eu un accord".