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Economie, finances et monnaie - Emploi et politique sociale
Dans leur commentaire du Rapport Social National 2012, OGBL et LCGB s’en prennent à des idées reçues sur la pauvreté et l’allongement de l’espérance de vie et défendent, contre "les réformes européennes", un système de retraites public durable
14-05-2012


LCGB et OGBLDans un document diffusé le 14 mai 2012, mais datant du 30 avril, les deux grands syndicats OGBL et LCGB prennent position par rapport au Rapport Social National 2012 adopté le 27 avril 2012 par le gouvernement. Ce rapport social national a été élaboré pour la première fois dans le cadre du semestre européen.

Dans quelques passages, les deux syndicats s’expriment avec vigueur par rapport à des sujets fortement discutés au sein de l’UE : la croissance, la pauvreté ou les systèmes de retraite. 

Ils marquent d’emblée leur désaccord avec des chiffres macroéconomiques clé. Ils ne sont pas d’accord avec les auteurs du rapport qui prévoient dans la partie introductive une récession de l’ordre de 0,9 % en 2012. Selon l’OGBL et le LCGB, "les données relatives à 2011 ont été corrigées à la hausse, de sorte que l’on s’attend maintenant à une croissance du PIB de 1,6 % pour 2011 au lieu de 1 %. En outre, les projections très pessimistes du Comité de prévision pour 2012 ne sont partagées ni par la Banque centrale du Luxembourg, ni par la Commission européenne. » Et ils ajoutent : « Quoi qu’il en soit, une situation économique morose ne peut jamais servir d’argument en faveur d’une remise en question de prestations sociales, puisque celles-ci ont été créées dans le but de venir en aide aux personnes dont la situation budgétaire et les conditions de vie sont difficiles."

Autre sujet fortement discuté, sinon disputé au Luxembourg : le risque de pauvreté. Pour les syndicats, "le taux de risque de pauvreté a augmenté en tendance au Luxembourg pour stagner autour de 14,5 %." Ils constatent ensuite que « la création du boni pour enfant, du crédit d’impôt monoparental et du crédit d’impôt pour salariés n’ont pas entraîné une réduction du taux de risque de pauvreté des ménages avec enfants. Pire : "En 2010, le taux de risque de pauvreté d’une personne seule avec des enfants à charge a été, avec 46,4 %, le plus élevé de la zone euro." L’OGBL et le LCGB voudraient que le gouvernement fasse l’analyse de cet échec qui est survenu "en dépit de mesures monétaires ciblées sur les ménages les plus frappés par la pauvreté".

Ils constatent également "qu’en matière de pauvreté au travail, le Luxembourg réalise une performance très mauvaise" dans la zone euro avec 10,6 % de travailleurs pauvres en 2010. Dernier constat de leur part sur ce chapitre : "Le Luxembourg est également un des pays où la distribution primaire des revenus du travail est la plus inégalitaire. Avant transferts sociaux, en 2010, 45 % des personnes étaient exposées à un risque de pauvreté. Parmi les pays de la zone euro, le Luxembourg n’était dépassé que par l’Irlande où le taux correspondant était de 50 %. Donc, ce n’est que grâce aux transferts sociaux que le Luxembourg peut réduire son taux de risque de pauvreté à 14,5 %."

Reprenant un aspect déjà mis en exergue dans le panorama social de la Chambre des salariés, OGBL et LCGB rappellent "que les locataires au Luxembourg sont proportionnellement nettement plus exposés au risque de pauvreté que les propriétaires" et qu’en 2010, "seuls trois pays de l’Union européenne des 15 ont des taux de risque de pauvreté des locataires supérieurs à celui du Luxembourg". Au Luxembourg, 28,3 % des locataires sont, selon ces chiffres, exposés au risque de pauvreté, alors que la moyenne de la zone euro est de 26,1 %. Et de demander que soit introduit un quota de logements sociaux locatifs répartis uniformément sur toutes les communes du pays qui serait fixé à 14,5 %, un taux équivalent à la proportion de la population qui est exposée à un taux de risque de pauvreté.

OGBL et LCGB sont aussi très critiques  sur la manière du gouvernement de vouloir "assurer des pensions adéquates et viables" Le projet de loi sur la réforme de l’assurance pension présenté par le gouvernement "n’apparaît pas à la hauteur du défi et de l’importance que le gouvernement a voulu accorder à la question de la réforme du régime général de pension au cours des dernières années." Pour les syndicats, "derrière ce qui est présenté comme un "système de pension à la carte", se cache la principale réforme qui est la baisse des majorations proportionnelles, et donc une baisse du niveau des pensions, qui a pour conséquence la généralisation de l’allongement de la durée de la vie active".

Et ici, les syndicats mettent en doute la base même des réformes en cours partout dans l’UE : l’idée même que l’espérance de vie continue d’augmenter. "Si l’espérance de vie n’augmente pas, la reforme prévue équivaudra à une simple baisse des prestations. Or, les prévisions tablant sur une augmentation continue de l’espérance de vie ne sont pas sûres d’être confirmées par la réalité. Déjà, dans certains pays, mais aussi chez nous, il y a des indications relatives à une stagnation de l’espérance de vie." Ils demandent d’autre part que l’on fasse la distinction entre les catégories de travailleurs quand il est question d’espérance de vie, et plaident pour l’établissement de tables de mortalité pour les différentes catégories socioprofessionnelles.

D’autre part, il y a selon eux une logique dans le refus du gouvernement d’explorer d’autres sources de financement que le prolongement de fait de la durée de la vie de travail et la réduction de fait des prestations. Leur thèse : le projet du gouvernement s’inscrit dans la ligne des réformes européennes et limite la part socialisée de ces dépenses au profit de dépenses privées individualisées.  Pour l’OGBL et le LCGB, "cela n’est guère acceptable". Pour eux, les systèmes de pension adéquats et viables sont les régimes publics de retraite, qu’il s’agit de renforcer et non pas d’affaiblir "en faveur des marchés financiers". Ils veulent "une augmentation immédiate et préférentiellement neutre des recettes" et ne demandent pas un accroissement des prestations futures par des droits supplémentaires.