Principaux portails publics  |     | 

Agriculture, Viticulture et Développement rural
Aides agricoles de l'Union européenne : Le projet de la Commission de pousser de nouveau à la publication de données sur les bénéficiaires des fonds agricoles européens suscite l’opposition des agriculteurs luxembourgeois
02-10-2012


transparenceLa Commission a adopté le 25 septembre 2012 une proposition visant à imposer de nouvelles règles relatives à la publication d'informations sur les bénéficiaires des fonds agricoles européens.

Cette révision de la législation intervient après un arrêt de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJE) de 2010 qui avait invalidé une partie du règlement 259/2008, notamment en ce qui concerne la publication des données sur les personnes physiques bénéficiaires des Fonds agricoles.

La Commission dit que sa nouvelle proposition tient compte des contraintes juridiques liées à la protection des données personnelles en fixant certaines limites à la publication nominative et en demandant aux Etats membres de publier des informations plus détaillées, en particulier sur la nature des aides et la description des mesures pour lesquelles les fonds sont alloués.

Cette révision de la réglementation sur la transparence vise selon la Commission à concilier les impératifs de transparence et de protection des données à caractère personnel.

Après l’arrêt de la CJE du 9 novembre 2010 qui avait invalidé partiellement la réglementation sur la transparence dans le secteur agricole, la Commission avait demandé aux Etats membres de suspendre la publication des données relatives aux personnes physiques. Elle avait également adapté en avril 2011 le règlement d'application en vue de limiter la publication des données relatives aux bénéficiaires aux seules personnes morales, jusqu'à l'adoption d'un nouveau règlement. 

Les nouvelles règles qu’elle veut proposer tiennent selon la Commission compte des objections formulées par la Cour et diffèrent de celles que celle-ci avait invalidées dans la mesure où:

  • elles reposent sur une justification détaillée révisée, centrée sur la nécessité d'un contrôle public de l'utilisation des fonds agricoles européens, dans le but de protéger les intérêts financiers de l'Union;
  • elles requièrent des informations plus détaillées à apporter concernant notamment la nature des aides et la description des mesures pour lesquelles les fonds sont alloués;
  • elles comportent un seuil de minimis en-dessous duquel le nom du bénéficiaire ne sera pas publié.

L'introduction d'un seuil ne porte toutefois en rien atteinte à l'exhaustivité de l'information fournie.

Un dernier argument de la Commission - est de dire que "le dernier sondage Eurobaromètre de 2011 montre que 62 % des citoyens sont en faveur de la publication d'informations sur les bénéficiaires des paiements de la Politique Agricole Commune (PAC) alors que seulement 22 % y sont opposés." A signaler que dans le même Eurobaromètre, la Commission s'était vue accorder un taux de confiance de 36 % seulement (- 4 points par rapport au sondage précédent) contre 43 % de défiance (+ 6 points par rapport au sondage précédent). Pour la première fois dans un Eurobaromètre, la balance entre confiance et défiance à l'égard de la Commission s’était inversée, passant d’un rapport 40 % de confiance et 37 % de défiance à un rapport de 36 % de confiance à 43 % de défiance..

Les projets de la Commission mal reçus dans les milieux agricoles luxembourgeois

Cette approche ne plaît guère à la Centrale paysanne. Dans l’édition du 28 septembre du Lëtzeburger Bauer, elle rappelle qu’elle avait déjà protesté en 2009 contre ce qu’elle appelle "une violation de la sphère privée de l’exploitant agricole et une discrimination d’une certaine catégorie de citoyens".  La Centrale paysanne ajoute qu’à l’époque de la publication de ces données, elle avait fait le constat que "les données publiées avaient conduit à des abus dans leur utilisation, y compris de la part des administrations." Finalement, la Centrale dénonce le caractère peu sérieux du seuil de minimis proposé par la Commission que la plupart des agriculteurs dépassent de toute manière. D’où un appel au gouvernement luxembourgeois de se prononcer au niveau de l’UE contre l’adoption dudit règlement.

Le député DP Fernand Etgen, qui avait déjà été actif en 2009 sur la question et qui est lui-même issu du milieu agricole a de son côté immédiatement adressé une question parlementaire au ministre de l’Agriculture, et veut savoir s’il n’est pas d’avis que "cette proposition constitue une violation de la sphère privée des exploitants agricoles".  Il veut également savoir s’il envisage d’entreprendre des démarches "pour éviter la transposition de cette proposition".

Quant à l'ADR, il est d'avis, lit-on dans un communiqué, "que l'équilibre entre transparence et protection des données n'est pas respectée et exige que le gouvernement s'oppose au niveau européen contre cette mesure."