La Commission européenne a adopté le 23 octobre 2012 un budget rectificatif qui doit lui permettre d'honorer ses obligations juridiques envers les bénéficiaires des fonds de l'UE. Ceci est selon elle conforme à la déclaration commune du Conseil et du Parlement européen faite le jour de l'adoption du budget de l'UE pour 2012, par laquelle ils engagent la Commission à demander des fonds supplémentaires "dans un budget rectificatif si les crédits inscrits dans le budget 2012 sont insuffisants pour couvrir les dépenses".
La Commission, qui dispose maintenant d'une image plus complète de l'exécution du budget en 2012, estime à 9 milliards d'euros le montant supplémentaire nécessaire pour couvrir les factures qu'elle reçoit et respecter ses obligations légales et contractuelles, principalement dans des domaines d'une importance essentielle pour la croissance et l'emploi en Europe.
D’abord le programme Erasmus. Il a besoin de 90 millions d'euros supplémentaires, faute de quoi il faudra réduire sensiblement le nombre de places offertes aux étudiants ou baisser le montant des bourses. Les étudiants les plus touchés seront ceux qui viennent de milieux défavorisés.
Les programmes de recherche ont besoin de 423 millions d'euros supplémentaires, en partie pour respecter les délais de paiement et éviter les intérêts de retard. Une autre partie de ces fonds additionnels doit permettre de couvrir le préfinancement de projets pour lesquels des conventions ont déjà été signées. "Ne pas respecter les délais impliquerait de repousser le lancement de projets essentiels à la future compétitivité de l'Europe dans le contexte de la mondialisation", signale la Commission.
Mais le montant le plus élevé, soit 8,3 milliards d'euros de paiements supplémentaires, est demandé pour les régions de l'Europe, au titre de la politique de cohésion et du développement rural. Tous ces projets contribuent à améliorer la vie des citoyens de l'UE en leur offrant des qualifications plus poussées, ou de meilleures perspectives d'emploi, ou en créant des infrastructures en matière de transports et d'énergie.
Mais, signale également la Commission, l'incidence de ce budget rectificatif sur les contributions des États membres de l'UE se verra allégée par une augmentation de recettes budgétaires de l'UE provenant d'autres sources, à savoir 3,1 milliards d'euros de rentrées additionnelles provenant essentiellement des amendes infligées au titre de la politique de concurrence et autres sanctions pécuniaires. L'effet net pour les États membres s'élève donc à 5,9 milliards d'euros.
Non, répond le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso : "Il ne s'agit pas ici pour la Commission de réclamer plus d'argent, mais bien pour les États membres d'honorer les engagements qu'ils ont pris, à savoir de maintenir les financements accordés aux étudiants dans le cadre du programme Erasmus ou aux régions défavorisées par le biais du Fonds de cohésion. Ces paiements sont essentiels pour redynamiser la croissance et créer des emplois dans toute l'Union".
"J'ai signalé à plusieurs reprises que les coupes constantes opérées dans le budget proposé finiraient par créer un gros problème",rappelle pour sa part Janusz Lewandowski, membre de la Commission chargé de la programmation financière et du budget; "ce temps est venu: notre situation ne nous permet pas d’honorer les engagements que nous avons pris. Le Conseil et le Parlement européen doivent maintenant prendre leurs responsabilités puisqu'ils ont voté un budget qui n'est pas à la hauteur des besoins. La pénurie de fonds se faisant sentir principalement dans les domaines de l'éducation, de la science et de la recherche, de l'emploi et du développement rural, je suis certain qu'ils ne contrediront pas leurs déclarations précédentes selon lesquelles l'Europe a besoin d'investir dans la croissance; au contraire, je suis convaincu que, se plaçant dans le droit fil de leur déclaration commune, ils feront en sorte d'approuver rapidement ce budget actualisé. Ce budget rectificatif n'est pas destiné aux institutions de l'UE, mais aux étudiants, scientifiques, ONG, entreprises, etc., de l'Europe, pour lesquels le budget de l'UE fait une différence au quotidien."
L’eurodéputé Alain Lamassoure (PPE), qui préside la commission des Budgets au Parlement européen, avait déjà tiré la sonnette d’alarme le 2 octobre 2012, annonçant que "le fonds social européen est en cessation de paiement depuis le début du mois et ne peut plus effectuer de remboursements aux Etats membres". "La semaine prochaine, ce sera le tour d'Erasmus, le programme pour les étudiants, et à la fin du mois, le programme pour la Recherche et l'Innovation n'aura plus d'argent", avait-t-il ajouté.
L'exécution du budget au niveau de l'UE est très différente de ce qu'elle est au niveau national parce que le budget de l'UE est essentiellement un budget opérationnel, dans lequel la part des dépenses administratives est très restreinte (5,8 %).
Les budgets annuels résultent de l'actuel cadre financier pluriannuel (2007-2013). Les programmes pluriannuels mettent plusieurs années à atteindre leur vitesse de croisière et ne sont intégralement mis en œuvre que vers la fin de la période.
Il n'est donc pas surprenant que les projets financés par l'UE dans toute l'Europe soient montés en puissance et que les contrats signés doivent maintenant faire l'objet de paiements.
Malgré cela, les derniers budgets de l'UE adoptés l'ont été à des niveaux bien inférieurs aux estimations de la Commission. Qui plus est, des demandes de paiement d'un montant de 5 milliards d'euros ont été reçues juste à la fin de l'année dernière et n'ont pas pu être prises en charge en 2011. Le règlement de cette somme a dû être reporté et représente une charge additionnelle pour un budget 2012 déjà réduit.