Le 19 septembre 2012, une étude réalisée à l’université de Caen par l‘équipe du professeur Séralini relançait à grands bruits la controverse sur les OGM. Le député Xavier Bettel (DP) s’en est fait l’écho dans une question parlementaire évoquant "les résultats alarmants quant aux risques de santé émanant de certains OGM et pesticides actuellement commercialisés" auxquels est arrivée cette étude qui "serait la première à tester ces produits sur le long terme". Le député s’enquérait donc auprès des ministres en charge de l’Agriculture et du Développement durable des répercussions éventuelles de cette étude sur la commercialisation d’OGM. Il leur demandait aussi si le gouvernement entendait mettre le sujet à l’ordre du jour du Conseil européen afin de garantir que les résultats de l'étude soient pris en compte au niveau de la politique européenne en matière d'OGM.
La réponse à cette question parlementaire a été rédigée par le ministre de la Santé au nom des trois ministres qui suivent de près le dossier des OGM, à savoir Romain Schneider, Marco Schank et Mars Di Bartolomeo.
Les ministres ont bien noté la publication par la revue scientifique Food and Chemical Toxicology d’un article signé par l'équipe du Professeur Séralini décrivant une étude d'alimentation à long terme menée chez des rats et portant sur les effets qu'exercent sur la santé le maïs NK603 génétiquement modifié pour tolérer des herbicides à base de glyphosate et/ou exposés à cet herbicide. Ils ont aussi observé que la parution de cet article a été "accompagnée d'une opération médiatique dont l'exclusivité de l'annonce a été accordée à l’hebdomadaire français Le Nouvel Observateur qui en a fait sa couverture".
"Les auteurs de l'étude ont conclu que le maïs génétiquement modifié NK603 et de faibles taux de formulations contenant de l'herbicide glyphosate à des concentrations très inférieures aux limites de sécurité officiellement fixées, provoquaient de graves effets indésirables sur la santé, tels que des tumeurs, chez les rats", résume Mars Di Bartolomeo.
Il ne lui a toutefois pas échappé que l'annonce de ces résultats a immédiatement déclenché de nombreuses réactions et critiques. "De nombreux experts ont souligné la faiblesse du protocole expérimental et de la méthodologie utilisées dans l'étude décrite dans l'article", relève le ministre qui souligne toutefois aussi que "l'originalité de cette étude réside dans le fait qu'elle constitue une étude d'alimentation à long terme chez les rongeurs, spécifiquement menée sur le maïs NK603 associé ou non à son herbicide tolérant, alors que la plupart des études de toxicité subchronique se limitent à une durée de trois mois".
"La prudence est cependant de mise puisque de nombreuses études de toxicologie menées sur différentes espèces d'animaux avec d'autres plantes génétiquement modifiées ne montrent pas d'effets délétères", observe le ministre de la Santé qui fait référence à une synthèse de la littérature scientifique publiée en janvier 2012 dans la même revue qui fait état d'une vingtaine d'études menées sur des durées inférieures à deux ans et avec un plus faible nombre de paramètres contrôlés. Plusieurs études conduites sur des durées intermédiaires de 240 à 455 jours mettant également en œuvre des populations de faible taille n'ont pu mettre en évidence des effets secondaires notables, souligne-t-il.
Le maïs NK603 dispose depuis 2004 d'une autorisation communautaire de mise sur le marché pour l'importation et la transformation industrielle, rappelle le ministre. Dans le cadre de cette procédure d'autorisation le groupe scientifique "GMO" de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait publié en 2003 un avis positif sur le maïs génétiquement modifié et un nouvel avis en 2009 pour l'importation et la transformation industrielle et la mise en culture.
A l'époque, le Luxembourg avait voté contre la mise sur le marché du NK603 sur base du principe de précaution, rappelle Mars Di Bartolomeo qui relève qu’à l'heure actuelle la mise sur le marché d'un OGM à des fins de mise en culture s'avère problématique au niveau de l’UE puisqu'un nombre élevé d'Etats membres, dont le Luxembourg, s'y opposent régulièrement.
L'EFSA a mis sur pied un groupe de travail, composé de scientifiques choisis parmi les unités "OGM", "Pesticides" et "Evaluation scientifique" en réponse à une demande urgente de la Commission européenne l'invitant à évaluer l'étude du Professeur Séralini afin de déterminer si ses résultats pourraient affecter les avis sur le maïs NK 603. Le rapport concernant l'examen initial de ce groupe d'experts se concentre sur la conception et les aspects méthodologiques utilisés dans cette étude et font état d'un certain nombre de questions, rapporte le ministre qui indique que l'EFSA a demandé aux auteurs de l'étude de clarifier certains points. Les informations obtenues contribueront à alimenter l'examen final du groupe d'experts et dont les résultats seront publiés dans les semaines à venir.
Dans tous les cas, prévient le ministre, le Luxembourg restera extrêmement vigilant en ce qui concerne ce dossier. "Le gouvernement luxembourgeois a montré dans le passé lors de nombreuses discussions au niveau européen et dans la pratique quotidienne au niveau national son respect du principe de précaution dans le domaine des organismes génétiquement modifiés", rappelle-t-il avant de conclure que "cette ligne de conduite sera maintenue à l'avenir, de concert avec nos partenaires européens partageant nos préoccupations".