Le 10 octobre 2013, le Conseil des ministres européens des transports s’est réuni à Luxembourg-Kirchberg. Le Luxembourg est intervenu de manière particulièrement critique sur les questions de sécurité et de certification dans le cadre du 4e paquet ferroviaire et sur la question de la directive sur les droits des passagers aériens, où le Conseil cherche à définir sa position.
Les ministres ont eu un accord sur la position du Conseil concernant le cadre réglementaire sur la certification des aspects de sécurité ferroviaire dans le cadre du 4e paquet ferroviaire.
La Commission avait proposé que l’Agence ferroviaire européenne (AFE) devienne un "guichet unique" qui délivrerait les autorisations de véhicules au niveau de l’Union sous la forme de "passeports de véhicule" ainsi que des certificats de sécurité valables dans l’ensemble de l’Union pour les opérateurs. Elle avait par conséquent proposé de procéder à une révision du règlement instituant l’Agence ferroviaire européenne. Il s’agissait de conférer d’abord à l’AFE des compétences en matière d’autorisation de véhicules et de certification en matière de sécurité des entreprises ferroviaires, puis de renforcer son rôle en matière de supervision des règles nationales et de surveillance des autorités nationales de sécurité.
Cette approche a suscité de nombreuses critiques dans les Etats membres, au Parlement européen et de la part des syndicats et opérateurs du secteur ferroviaire.
Le Conseil s’est prononcé en faveur d’un système dual qui constitue une alternative au guichet unique proposé par la Commission européenne. Les ministres ont critiqué le coût de la certification qui pourrait découler du système de guichet unique et ont aussi opté pour une période de transition plus longue de la directive (5 ans) que ce qui avait été préconisé par la Commission (2 ans). Le système dual préconisé par le Conseil reste dans la logique de la position adoptée sur le volet interopérabilité du 4e paquet ferroviaire en juin 2013. Celle-ci prévoit que l’AFE soit compétente pour la certification du matériel roulant seulement en cas d'utilisation transfrontalière de celui-ci. Pour le matériel roulant à usage exclusivement domestique, les agences nationales pour la sécurité continueraient à être compétentes.
Claude Wiseler, ministre luxembourgeois du Développement durable et des Infrastructures, a défendu une position très tranchée. Il a estimé que tout transfert des compétences était "prématuré" à l’AFE et que l’orientation générale au Conseil était "précipitée".
"Le Luxembourg aurait préféré pouvoir effectuer un examen de la réglementation pour permettre au système de gagner en maturité et pour identifier avec acuité les ajustements nécessaires", lit-on dans un communiqué du ministre
Comme pour la proposition relative à l’interopérabilité, issue du même paquet ferroviaire et adoptée au Conseil en juin 2013, le ministre considère qu’une analyse plus approfondie des mesures en place serait indispensables afin de garantir une réforme mûrement réfléchie.
Claude Wiseler a notamment formulé des réserves de fond sur le transfert de compétences des autorités nationales à l’Agence ferroviaire européenne alors que celle-ci ne sera pas à même d’accomplir les nouvelles tâches qui lui seront attribuées par cette proposition.
Le Luxembourg regrette dans ce contexte surtout la séparation entre certification et supervision.Cette division des tâches entre Agence et autorités nationales risque de ne pas garantir le maintien du niveau de sécurité actuel. "Cette situation est inacceptable pour le Luxembourg, car la sécurité ferroviaire représente un objectif absolu et non négociable", dit Claude Wiseler.
Le Luxembourg avait soumis au cours des négociations au sein des instances préparatoires une proposition avec une approche alternative qui selon le ministre "aurait permis de remédier aux critiques adressées au système de la Commission et qui aurait été basée exclusivement sur une coopération entre autorités nationales de sécurité".
D’autres délégations (Hongrie, Allemagne, Bulgarie, Slovénie, Portugal, entre autres) ont exprimé des craintes quant aux augmentations des coûts qu’engendrera la nouvelle procédure qui est chapeautée par l’Agence ferroviaire européenne sans que cela ne constitue un obstacle à l’adoption d’un accord sur le texte de compromis.
La Présidence lituanienne avait aussi invité les ministres à débattre de la révision des droits des passagers aériens afin de fournir les orientations nécessaires à la continuation des travaux au sein des instances préparatoires.
La Commission avait été poussée à présenter cette proposition suite à la décision de la Cour de justice dans l'affaire C-549/07 (Wallentin-Herman) notamment pour recadrer la définition des circonstances extraordinaires par lesquelles les compagnies aériennes peuvent valablement s’exonérer.
Le débat s’est limité le 10 octobre 2013 à deux autres aspects de la proposition à savoir les modalités applicables au droit d’indemnisation en cas de retard sérieux et les connexions manquées.
En ce qui concerne les retards, la Commission a proposé de relever le seuil de déclenchement ouvrant le droit à une indemnisation en faisant passer la durée minimale du retard de 3 heures à 5 heures pour l'ensemble des trajets au sein de l'UE. En ce qui concerne les trajets à destination et en provenance de pays tiers, le seuil dépendra de la distance du trajet: seuil de 5 heures pour les vols hors-UE inférieurs ou égaux à 3.500 km; seuil de 9 heures pour les vols hors-UE entre 3.500 et 6.000 km ; seuil de 12 heures pour les vols hors-UE supérieurs ou égaux à 6.000 km.
Quant aux connexions manquées, la Commission préconise que les passagers ayant manqué une correspondance en raison d’un retard de leur vol précédent ont droit à une prise en charge et ont droit, dans certaines circonstances, à une indemnisation. Toutefois, ce droit ne s’appliquerait que lorsque les vols de correspondance font partie d'un contrat de transport unique.
Claude Wiseler s’est engagé pour une règlementation claire et efficace par laquelle une réelle amélioration des droits des passagers aériens. La législation actuelle est selon lui déjà confrontée à de sérieux problèmes dans son application concrète. Le ministre Wiseler est intervenu en faveur de solutions praticables et efficaces. Il a jugé que le texte en discussion était surchargé et pas plus avantageux pour les passagers que les règles existantes. Il a émis des "doutes très sérieux" quant aux nouvelles propositions sur les correspondances manquées, jugeant que les droits des passagers sont d’ores et déjà bien encadrés par les accords inter-line. Par ailleurs, la double sanction d’un même vol considéré à la fois comme vol et comme correspondance incitera les opérateurs à cesser certaines coopérations inter-line et à ne plus offrir des billets combinés. Bref, le Luxembourg demande que cette partie du texte soit retirée car elle conduirait en fait à priver de leurs droits actuels qui sont satisfaisants les passagers dans un contexte où les opérateurs font de leur mieux pour acheminer leurs passagers.
Quant au système d’indemnisation, il a repris à son compte la proposition du Parlement européen, où le député luxembourgeois Georges Bach est rapporteur, et qui vise à simplifier le système en proposant deux montants : 300 euros pour les vols à l'intérieur de l'UE (quelle que soit la distance); 300 euros pour tous les autres vols jusqu'à une distance de 3 500 km; 600 euros pour tous les autres vols de plus de 3 500 km. Claude Wiseler a par ailleurs rejeté l’idée que le prix du billet et le montant de l’indemnisation puissent être liés, car là aussi, ce serait un nouveau frein aux accords inter-line. Par ailleurs, il a souhaité que le mécanisme d’indemnisation soit basé sur la nation de vol et pas de voyage et qu’un réacheminement efficace soit considéré comme compensation.