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TTIP – La consultation publique de la Commission sur le règlement des différends entre investisseurs et Etats est ouverte
27-03-2014


Le 27 mars 2014, la Commission européenne a ouvert une consultation en ligne portant sur la protection des investisseurs dans le cadre du partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP), ainsi que le commissaire Karel de Gucht l’avait annoncé le 21 janvier 2014 en réponse aux inquiétudes croissantes exprimées dans la société civile.

Un enjeu majeur du débat autour du TTIP concerne en effet les règles protégeant les investissements et prévoyant un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE, ou ISDS en anglais).

Par souci de transparence, la Commission a décidé de procéder à une vaste consultation publique, allant au‑delà des parties prenantes habituelles, sur la manière d’inclure la protection des investissements et le règlement des différends entre investisseurs et États dans le TTIP.

La consultation : mode d’emploi

La question clé sur laquelle la Commission souhaite recueillir des avis porte sur les dispositions du TTIP relatives aux investissements et sur le point de savoir comment celles‑ci peuvent assurer un juste équilibre entre la protection des investisseurs et la préservation du droit de l'UE et de ses États membres de réglementer.

Toute personne intéressée par le sujet pourra répondre, en ligne, à une série de questions et télécharger des commentaires sur le site web de la direction générale du commerce de la Commission. Afin de garantir le plus haut degré de transparence, les contributions seront rendues publiques, sauf demande contraire de l'auteur.

La consultation est structurée autour des éléments suivants:

  • un avis de consultation présentant l’objectif de la consultation, son contenu et les modalités de participation;
  • une série de questions auxquelles le public est invité à répondre, sur la base d'explications et d'exemples. Chaque question est accompagnée d'une explication de l'aspect qu'elle aborde, d'une description de l'approche retenue dans la plupart des accords d'investissement, d'une présentation des objectifs et de l'approche de l'UE, ainsi que d'un texte proposé comme référence à partir de l'approche développée dans les négociations entre l'UE et le Canada et à titre de comparaison avec les dispositions figurant habituellement dans les accords d'investissement bilatéraux. Un certain nombre de questions ouvertes devraient laisser aux répondants une marge suffisante pour présenter leurs points de vue sur les aspects qui ont suscité des controverses dans le passé.

Les documents pour la consultation publique sont en ligne, en anglais, depuis le 27 mars 2014. L'avis de consultation et le questionnaire seront, par la suite, disponibles dans toutes les langues de l’UE.

La consultation publique en ligne durera  90 jours à compter de la date de mise en ligne de la traduction du "texte de consultation" dans la dernière langue officielle de l’UE.

A l’issue de la consultation, la Commission analysera les contributions en vue d'en tenir compte dans le processus de négociation. Après la consultation, la Commission examinera avec le Conseil, le Parlement européen et les parties prenantes la position de négociation de l’UE sur les investissements dans le cadre du TTIP.

Pour la Commission. le mécanisme de RDIE offre aux investisseurs "un terrain neutre et apolitique pour la résolution de différends"

Face aux craintes grandissantes concernant le RDIE adopté dans le cadre du TTIP et à l’ampleur du débat que le sujet suscite, la Commission qui estime que "les objectifs du RDIE dans le cadre des négociations relatives au TTIP ont fait l'objet d'un certain nombre de malentendus, voire parfois d'assertions inexactes", entend mieux définir l'approche de l’UE par rapport à la protection des investisseurs et au RDIE dans la négociation sur le TTIP qui est proposée, en donnant à toutes les parties intéressées la possibilité de faire part de leurs réflexions. Son mémorandum présente les grandes lignes de sa position sous forme de questions-réponses.

Ainsi, la Commission justifie-t-elle tout d’abord la nécessité d’une protection des investissements et d’un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États dans l'accord avec les États‑Unis du fait que les investisseurs peuvent rencontrer des problèmes concernant leurs investissements que les systèmes judiciaires internes de l’UE ou des Etats-Unis ne peuvent pas toujours régler efficacement.

La Commission cite pour exemple le fait que le droit américain ne prévoit pas d'interdiction explicite de la discrimination à l’encontre des étrangers, ce qui représente un des éléments clés de la protection des investissements. De même, il ne sera pas possible de faire valoir directement devant les juridictions des États‑Unis les droits accordés aux investisseurs dans le cadre du TTIP, ajoute la Commission.

De son point de vue, "le mécanisme de RDIE offre aux investisseurs un terrain neutre et apolitique pour la résolution de tels différends". La Commission estime par ailleurs que, dans la mesure où il associe les deux premières économies mondiales, "le TTIP favorisera la poursuite de la réforme de la protection des investissements et du système de RDIE, ce qui servira de modèle pour l’avenir".

La Commission estime que l’existence de dispositions sur la protection des investissements et le RDIE n'empêcherait pas en soi les États d’adopter des lois et ne les contraindrait pas non plus à en abroger

La protection des investissements et le RDIE ne constituent pas des nouveautés, ajoute encore la Commission qui rappelle que la plupart des traités d’investissement bilatéraux conclus par les États membres contiennent déjà des dispositions en la matière. Depuis la fin des années 1950, les États membres de l’UE ont signé plus de 1 400 accords de protection des investissements. "Ces accords ont, en général, été d'une aide précieuse pour les investisseurs de l’UE, lorsque ceux‑ci ont rencontré des problèmes avec les pays d’accueil", affirme la Commission qui souligne que "les investisseurs de l’UE sont les utilisateurs les plus fréquents du système de RDIE".

Aussi, à la question de savoir si un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États restreindrait indûment la capacité ou le droit des États membres de réglementer, la Commission répond que "l’existence de dispositions sur la protection des investissements et le RDIE n'empêcherait pas en soi les États d’adopter des lois et ne les contraindrait pas non plus à en abroger". "Elle peut tout au plus entraîner le paiement d’indemnisations", affirme la Commission.

Les objectifs de la Commission dans les négociations

D'une part, la Commission doit mettre en œuvre les directives de négociation arrêtées  par les États membres. Les questions portant sur la protection des investisseurs et sur le RDIE font en effet partie des directives de négociation unanimement données à la Commission européenne par les États membres de l’UE en juin 2013.

D'autre part, l’UE a pour but d'instaurer des règles modernes sur les investissements qui garantissent que les gouvernements ne discrimineront pas les entreprises étrangères. En même temps, il importe à la Commission de veiller à ce que les règles relatives aux investissements ne restreignent pas indûment le droit de l’Union européenne ou de ses États membres de réglementer, dans l’intérêt public, sur des questions telles que la santé, la sécurité, la protection des consommateurs ou l’environnement.

Les dispositions en matière d'investissements incluses dans le TTIP réaffirmeraient le droit de réglementer, en clarifiant davantage la formulation et le sens des normes traditionnelles de protection des investissements contenues généralement dans les accords d’investissement. Elles incluraient également les garanties et sauvegardes nécessaires contre la possibilité de faire un usage abusif du système. Ces dernières engloberaient l'introduction d'engagements de transparence, des règles visant à assurer l'objectivité et l'impartialité des arbitres, des mécanismes permettant aux parties (c'est‑à‑dire à l’UE et aux États‑Unis) de contrôler l’interprétation de l’accord, ainsi que la création d’un mécanisme d’appel.

Les garanties supplémentaires auxquelles songe la Commission

L’approche prévue par la Commission pour le TTIP fait d'ores et déjà apparaître certains changements importants par rapport aux accords d’investissement traditionnels qui tiennent compte de la nécessité d’apporter des améliorations. En particulier, elle:

  • comporte une définition claire du "traitement juste et équitable", fondée sur une liste exhaustive d’éléments;
  • comprend une clarification selon laquelle le "traitement juste et équitable" n'implique pas que les parties seraient privées de la possibilité de modifier une législation existante ou d'en introduire une nouvelle;
  • clarifie que les mesures prises pour atteindre des objectifs d’intérêt public, tels que la protection de la santé, des consommateurs ou de l’environnement, ne peuvent pas être considérées comme équivalant à une expropriation indirecte;
  • envisage un mécanisme d'appel pour le règlement des différends entre investisseurs et États;
  • prévoit le principe selon lequel la prise en charge des coûts suit le droit, c'est‑à‑dire que la partie qui succombe supporte tous les coûts liés au litige, afin de dissuader les recours futiles ou à visée tactique;
  • contient des dispositions contre la recherche systématique du traité le plus favorable, en précisant que les investisseurs qui procèdent à des restructurations tactiques de leurs investissements pour pouvoir entrer dans le champ d'application du TTIP (en créant une société fictive aux États‑Unis, par exemple) ne pourront pas introduire de recours dans le cadre du système de RDIE;
  • inclut un code de conduite contraignant pour les arbitres qui décrit en détail le degré d’indépendance attendu de leur part. L’objectif est d’éviter, autant que possible, les conflits d’intérêts.