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Elections européennes - Politique étrangère et de défense - Traités et Affaires institutionnelles
Conseil européen – Herman Van Rompuy est mandaté pour mener des consultations en vue de la nomination du futur président de la Commission, mais aussi de l’agenda stratégique de l’UE pour les années à venir
27-05-2014


Dans la soirée du 27 mai 2014, les chefs d’Etat et de gouvernement des 28 Etats membres se sont réunis pour un sommet informel convoqué par Herman Van Rompuy dans l’objectif de discuter des résultats des élections européennes et de voir quelles leçons en tirer.

Un agenda stratégique en vue pour le Conseil européen de juin

Il s’est donc agi dans un premier temps de discuter du "message fort" envoyé par les électeurs lors du scrutin du 25 mai 2014.

Un processus visant à identifier les priorités futures de l’UE et à en établir l’agenda stratégique a par conséquent été lancé à l’occasion de ce dîner.

Certaines orientations se sont d’ores et déjà imposées lors de ces premières discussions.

Herman Van Rompuy a ainsi évoqué la croissance la compétitivité et l’emploi, mais aussi une Union économie et monétaire mieux développée tout en préservant l’intégrité de l’UE. Autre grand thème qui figurera dans les priorités de l’UE dans les années à venir, la réponse qu’il convient d’apporter aux défis posés par le changement climatique, ainsi qu’une avancée vers une Union de l’énergie visant notamment à réduire la dépendance énergétique de l’UE. En matière de justice et de sécurité, Herman Van Rompuy a souligné la nécessité de "préserver et développer les libertés tout en assurant la sécurité et en luttant contre l’immigration irrégulière, le crime et la fraude". Enfin, le renforcement de l’action extérieure de l’UE sera lui aussi dans cet agenda stratégique.

Les consultations vont se poursuivre en vue d’établir cet agenda stratégique lors du Conseil européen de juin prochain. Les Etats membres sont invités à soumettre leurs propositions d’ici là, comme l’ont déjà fait six d’entre eux, ainsi que l’a souligné Herman Van Rompuy qui va se charger de préparer une proposition qu’il soumettra aux 28 en juin.

A leur arrivée au Conseil, les chefs d’Etat et de gouvernement avaient indiqué leurs priorités respectives.Xavier Bettel à la table des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE lors du sommet informel du 27 mai 2014 (c) Le Conseil de l'UE

Xavier Bettel, Premier ministre du Luxembourg, a estimé qu'il fallait relancer l'économie en Europe. "On ne peut pas s’en tenir à un statu quo", a-t-il expliqué. "Les signaux ne sont pas négatifs mais il ne faut pas croire qu'on est sortis de la crise", a-t-il rappelé, insistant sur la nécessité de créer de l’emploi pour "offrir une perspective aux jeunes générations". "Il faut des changements aussi au niveau de l'UE et on doit les mettre en œuvre au cours des cinq prochaines années", estime-t-il en effet.

Le président français, François Hollande, dont le parti a particulièrement souffert de la montée du Front national lors de ces européennes, a dit souhaiter que l'Europe "puisse être une réponse à ces questions qui taraudent un certain nombre de peuples". "Après toutes ces années d'austérité pour beaucoup de pays, la prochaine étape c'est la croissance, c'est l'emploi, c'est l'investissement", a expliqué le président français. Il a parlé aussi de la protection des frontières dans le cadre d'une politique d'immigration globale en appelant à "des règles qui doivent être beaucoup plus claires".

David Cameron, mis en difficultés par la victoire de l’Ukip, souhaitait une réforme d’une UE "devenue trop grosse, trop autoritaire, trop intrusive", tandis que le président du Conseil italien Matteo Renzi, qui s’est pour sa part trouvé conforté par les résultats de son parti aux européennes, a aussi souligné que "celui qui veut sauver l’Europe doit changer l’Europe". Il s’est dit "beaucoup plus  intéressé à discuter de la façon de bien dépenser l’argent de l’Europe pour créer de l’emploi qu’à [se] préoccuper simplement d’une discussion concernant un poste ou une fonction".

Les chefs d’Etat et de gouvernement donnent mandat à Herman Van Rompuy pour conduire des négociations avec le Parlement européen avant de proposer un candidat au poste de président de la Commission européenne

La question de la nomination du futur président de la Commission européenne était pourtant le sujet incontournable de ce dîner informel consacré à la suite à donner aux élections, puisqu’elles marquent le début d’un processus de renouvellement des institutions.

 "J’aurais préféré qu’on arrive un peu plus loin aujourd’hui"

"Herman Van Rompuy présentant à la presse les résultats du sommet informel des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE le 27 mai 2014 (c) Le Conseil de l'UELe Conseil européen a pour responsabilité de présenter au Parlement européen un candidat au poste de président de la prochaine Commission", rappelait en effet Herman Van Rompuy à l’ouverture du sommet informel. "Nous devons le faire en tenant compte des résultats des élections et après consultations avec le Parlement européen", précisait-il en annonçant que l’objet des discussions de la soirée serait "la façon de procéder dans les jours et les semaines à venir". Herman Van Rompuy avait d’ores et déjà annoncé avant les élections qu’il serait "trop tôt" pour désigner un candidat. C’est donc sans surprise que le dîner informel s’est achevé sans qu’un nom ne soit donné.

Sur ce point, le Premier ministre luxembourgeois, qui venait avec l’espoir qu’un "message clair" serait délivré à l’issue de ce sommet informel", s’est montré un peu déçu. "J’aurais préféré qu’on arrive plus loin aujourd’hui", a reconnu Xavier Bettel devant la presse. Mais il a dans le même temps reconnu qu’il valait mieux se laisser du temps et respecter le résultat des consultations plutôt qu’une décision qui provoquerait des tensions au sein des 28.

"Le traité ne prévoit pas que le Parlement européen fasse une proposition qu’entérinerait le Conseil européen, c’est le contraire"

Si Herman Van Rompuy a bien mentionné la lettre de la conférence des présidents des groupes politiques que lui ont remis Joseph Daul et Hannes Swoboda avant le Conseil, c’est pour indiquer que les chefs d’Etat et de gouvernement en ont bien "pris note" avant de le charger de mener les consultations avec le Parlement européen. Herman Van Rompuy va donc consulter les présidents des groupes politiques dès que ces derniers auront été constitués et que leurs présidents auront été élus. Et il sera aussi question dans ces consultations de l’agenda stratégique de la future Commission. Ce qui laisse a priori peu de place aux consultations que Jean-Claude Juncker était chargé de mener par les présidents de groupes du Parlement européen.

Sur les ondes de RTL Radio Lëtzebuerg, Xavier Bettel s’est montré quelque peu critique à l’égard de la démarche du Parlement européen qui aurait selon lui dû attendre la soirée pour formuler ses propositions, de façon à ce que puisse démarrer "une double négociation Van Rompuy-Juncker" à l’issue du sommet informel. 

"Le traité ne prévoit pas que le Parlement européen fasse une proposition qu’entérinerait le Conseil européen, c’est le contraire", a rappelé le Premier ministre luxembourgeois au micro de la radio 100,7.

Le président français François Hollande a tenu lui aussi à clarifier la procédure : c’est une majorité qualifiée d’Etats membres qui doit proposer un candidat au poste de président de la Commission, et le Parlement européen doit ensuite l’approuver. "Herman Van Rompuy va vérifier que ces deux majorités existent", a-t-il résumé.

"Le résultat des élections doit être respecté"

Le Premier ministre luxembourgeois a expliqué à l’issue du dîner que, selon uneXavier Bettel au micro de RTL lors de son arrivée au Conseil européen informel du 27 mai 2014 grande majorité de ses pairs, les résultats des élections ne permettent pas de désigner un grand vainqueur et donc d’attribuer si vite le poste de président de la Commission. Contrairement à la position qu’il a défendue, les chefs d’Etat et de gouvernement se sont donc majoritairement exprimés en faveur de consultations avec les Etats membres et le Parlement européen.

Jean Asselborn, vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, était à Bruxelles pour le sommet des leaders sociaux-démocrates et s’est montré profondément déçu et critique à l’égard de la position des chefs d’Etat et de gouvernement dans un entretien qu’il a accordé à la radio Deutschlandfunk le 28 mai 2014. Pour lui, il s’est agi de "gagner du temps" et tout le laisse penser que le PPE n’est pas uni derrière son candidat.

Le Premier ministre espère en tous cas que le processus de consultations que va conduire Herman Van Rompuy "ne va pas durer des semaines ou des mois". Autrement dit, il espère que le sommet de juin permettra d’aboutir à un résultat concret. Et il entend bien défendre la position que "le résultat des élections doit être respecté" en veillant à ce que le candidat au poste de président de la Commission soit bien une des têtes de liste  désignée par les partis en lice pour les élections européennes.

"S’il y avait eu un vote aujourd’hui, je ne sais pas dans quel sens ce serait allé"

S’il a assuré que la nomination de Jean-Claude Juncker n’était pas pour autant exclue, Xavier Bettel a toutefois indiqué que "s’il y avait eu un vote aujourd’hui, [il] ne [savait] dans quel sens ce serait allé".

Or, à entendre certains de ses pairs, il n’est pas évident que ce soit le cas.

Le Premier ministre néerlandais, Mark Rutte, estime ainsi que le futur président de la Commission pourrait peut-être "être l'un des candidats mis en avant par les groupes politiques", mais "cela ne doit pas nécessairement être le cas".

Le Premier ministre suédois, Fredrik Reinfeldt, a répété sa position : "J'ai toujours dit que je n'étais pas favorable à la procédure des 'Spitzenkandidat' qui disqualifie d'autres candidats possibles pour la course".

Quant au Premier ministre hongrois Viktor Orban, qui avait déjà exprimé son opposition à la candidature de Jean-Claude Juncker, il a souligné que sa "position est qu’il n’y a pas de lien automatique entre le résultat des élections et cette nomination".

Le Premier ministre slovaque, Robert Fico, qui reconnaît pour sa part la victoire du PPE aux élections, a évoqué pour sa part au lendemain de ce sommet informel une "minorité de blocage" qui pourrait empêcher la nomination de Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission.

Si la Chancelière allemande Angela Merkel a réaffirmé son soutien à Jean-Claude Juncker, elle a aussi précisé qu’il ne constituait "pas le seul candidat valable pour la Commission". Elle n’a pas manqué de souligner qu’aucun groupe n’avait la majorité absolue requise au Parlement européen pour valider le choix du futur président de la Commission. Il faut "prendre du temps pour ce processus de désignation des personnes pour avoir un tableau complet. Il y a aussi d'autres postes à pourvoir: le président du Conseil, le président de l'Eurogroupe", a-t-elle expliqué, ce qui laisse clairement entrevoir que le Conseil européen de juin devrait porter non seulement sur le président de la Commission, mais aussi sur les autres grands postes qui vont être renouvelés.

Dans une déclaration, les chefs d’Etat et de gouvernement affichent le soutien de l’UE au nouveau président ukrainien, Petro Porochenko, et appellent toutes les parties à accepter le résultat d’un scrutin qu’ils jugent "largement conforme aux engagements internationaux"

Lors de leur dîner, les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE ont  aussi discuté de la présidentielle qui s’est tenue le 25 mai 2014 en Ukraine et qui a été remportée par l’oligarque Petro Porochenko avec près de 54 % des voix au premier tour. Les dirigeants européens ont salué la tenue de cette élection "au cours de laquelle la volonté du peuple ukrainien s'est exprimée", selon une déclaration qui appelle "toutes les parties à accepter le résultat du scrutin" et notamment la Russie à coopérer "avec le nouveau président légitimement élu" et à engager "un dialogue franc et ouvert" avec lui.

Selon le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, cité par l’Agence Europe, les leaders ont pris note du fait que le président Poutine avait respecté le choix des Ukrainiens, "ce qui était quand même une déclaration importante".

Pour le Premier ministre polonais Donald Tusk, "ce sera un premier véritable test de la bonne volonté des Russes, s'ils renoncent à ce soutien organisationnel vis-à-vis des séparatistes", selon l’Agence Europe. "Le président Poutine a dit qu'il reconnaissait le verdict des urnes. Il devra aussi reconnaître le nouveau président ukrainien et s'engager dans la désescalade", a expliqué, pour sa part, le président français, François Hollande, qui recevra le 5 juin Vladimir Poutine à l’Elysée.

Les dirigeants européens ont annoncé leur intention de "travailler en étroite coopération" avec le nouveau président ukrainien. Le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, s’est par ailleurs entretenu avec Petro Porochenko au lendemain des élections afin de lui confirmer le soutien de l’UE. Dans ce contexte, la Commission a annoncé le 27 mai 2014 avoir lancé la seconde phase de libéralisation des visas avec l’Ukraine, une "reconnaissance des importantes réformes législatives adoptées ces derniers mois", selon le président de la Commission, José Manuel Barroso.

Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE appellent par ailleurs la Russie à "poursuivre le retrait des forces armées de la frontière ukrainienne" et à "user de son influence auprès des séparatistes armés pour apaiser la situation dans l'est du pays", en demandant à Moscou  d’empêcher le passage de séparatistes et d'armes en Ukraine où la situation a dégénéré ces derniers jours. Près de 40 insurgés prorusses ont été tués lors de combats avec l'armée ukrainienne qui a affirmé le 27 mai avoir repris le contrôle de l'aéroport de Donetsk.  De plus, quatre observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sont portés disparus après avoir été arrêtés dans la soirée du 26 mai 2014 à un check-point par des séparatistes dans l'est.

Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE ont par ailleurs noté "avec inquiétude la détérioration de la situation des droits de l'Homme en Crimée depuis son annexion illégale par la Russie" en mars, tout en réaffirmant qu'ils ne reconnaîtront jamais le rattachement de la péninsule à la Russie. Ils jugent qu’il est "essentiel de parvenir à un accord sur les conditions de l'approvisionnement en gaz de l'Ukraine par la Fédération de Russie" afin de stabiliser l'économie ukrainienne.

Les dirigeants ont enfin souligné la "forte participation" à l’élection présidentielle et mis en avant "une volonté claire des autorités de procéder à ce qui a été une authentique élection". Selon eux, le scrutin a été "largement conforme aux engagements internationaux", en respectant les libertés fondamentales, en dépit "en dépit du climat de sécurité hostile qui règne dans deux régions orientales du pays". Ils appellent les autorités ukrainiennes "à s'appuyer sur la légitimité du président" pour poursuivre le dialogue avec la population, tout en demandant une "réalisation rapide des réformes dans le domaine constitutionnel et dans celui de la décentralisation".