Le 16 septembre 2014, le Conseil a présenté devant la plénière du Parlement européen sa position sur le budget 2015 de l’UE qu’il avait adoptée formellement le 2 septembre 2014 après l’avoir adoptée de manière informelle à la mi-juillet.
Cette position prévoit les termes suivants :
Le Conseil a estimé que malgré les réductions qu’il propose par rapport à la proposition de la Commission, des réductions qui "tiennent compte de la situation budgétaire difficile dans de nombreux Etats membres" et des "capacités d’absorption réalistes" déduites de la mise en œuvre des derniers budgets, le budget 2015 dispose de marges suffisantes pour faire face à des événements imprévisibles.
Le Conseil met par ailleurs en avant que les budgets pour la recherche, l’innovation et la formation ont augmenté de 2,8 milliards d’euros, soit de 24,5 %.
Les députés européens ne l’ont pas entendu de cette oreille après l’exposé d’Enrico Zanetti, sous-secrétaire d’Etat aux Finances et à l’Economie italien, que la Présidence italienne du Conseil avait envoyé devant la plénière du Parlement européen pour exposer et défendre la position du Conseil.
"La version du Conseil du projet de budget de l'UE pour 2015 ne tient pas compte de ses propres engagements politiques à relancer la croissance économique et la création d'emplois", lit-on dans un communiqué publié par le Parlement européen qui rend compte de l’orientation générale du débat après l’exposé d’Enrico Zanetti.
Pour les députés européens, les coupes les plus sévères du Conseil concernent des programmes visant à stimuler la compétitivité de l'Europe, la croissance et la création d'emplois. Ils reprochent au Conseil d’avoir réduit de 1,3 milliard d'euros les financements destinés à la recherche et aux projets d'infrastructure de grande envergure, compliquant ainsi le lancement de certains projets.
"Nous souhaitons que l'Europe sorte de la crise et devienne compétitive en développant une économie basée sur la connaissance. Par conséquent, il est nécessaire de renforcer la recherche et le développement, ainsi que les programmes d'éducation", a affirmé Eider Gardiazábal Rubial (S&D), la députée en charge du projet de budget pour 2015.
Le Conseil a réduit de 5,2 % le budget des paiements disponible pour la politique extérieure de l'UE (soit 378 millions d'euros de moins), et en particulier les fonds destinés à gérer les crises telles qu'en Syrie ou en Palestine, et à aider les pays voisins en difficulté, comme l'Ukraine.
Par ailleurs, les ministres ont réduit le budget consacré au programme de protection environnementale LIFE de 16,9 millions d'euros. Les domaines qui n'ont pratiquement pas été touchés par les États membres sont l'agriculture et les fonds structurels (développement régional).
Horizon 2020, le plus grand programme de l'UE en faveur de l'innovation et de la recherche, est le plus durement touché par les coupes du Conseil pour 2015, malgré l'engagement qu'il a pris récemment d'investir dans les économies du futur.
Les ministres ont réduit les fonds pour les nouveaux contrats de 190 millions d'euros et le budget pour les paiements de 981 millions d'euros en 2015, malgré les difficultés déjà rencontrées cette année pour payer les factures de certains projets Horizon 2020. Ces difficultés concernent environ 600 projets collaboratifs impliquant 7000 participants, dont 1400 PME, a expliqué la commissaire Máire Georghean-Quinn lors d'un débat distinct sur Horizon 2020.
Un autre problème, ce sont les arriérés de paiement.
Le budget à long terme de l'UE (2014-2020) a débuté par un arriéré de paiements considérable, s'élevant à 23,4 milliards d'euros uniquement pour les factures liées aux dépenses régionales. Ces factures étant réglées à partir du budget annuel de 2014, la Commission a dû demander un financement supplémentaire de 4,7 milliards d'euros pour combler le fossé. Les fonds pour payer les engagements pris en politique extérieure, pour Horizon 2020, Erasmus+ pour les étudiants ainsi que COSME pour les petites et moyennes entreprises, sont insuffisants.
Tout comme pour les années précédentes, les ressources du budget des paiements sont insuffisantes pour régler les factures de 2014. Il s'agit là d'une "gestion budgétaire irresponsable", a fait remarquer le président de la commission des budgets, Jean Arthuis (ADLE), un ancien ministre français des Finances, rappelant que les traités interdisent l'UE de s'endetter. La Commission européenne est légalement tenue de payer ses engagements, mais l’attitude du Conseil entraîne selon les députés le budget de facto dans une situation de déficit.
La position du Conseil sur le budget vient renforcer ce problème, selon Jacek Dominik, le commissaire européen au Budget. "Ce que la Commission a demandé pour 2015 ne suffira que si nous respectons nos engagements pour 2014", a-t-il souligné, cité par l’Agence Europe.
Dés juillet 2014, lors du compromis informel trouvé au sein du Conseil sur le budget, le Parlement européen avait réagi immédiatement, estimant que l’UE devait cesser de transférer à l’année suivante son volume toujours plus important d’impayés. A propos de l’alarmante pénurie de fonds pour les paiements dus en 2014, les députés européens avaient mis en garde que si aucune solution n’était trouvée, des programmes tels qu’Erasmus+, des projets de recherche, d’aide humanitaire aux réfugiés syriens seront bloqués et les bénéficiaires devraient patienter pour recevoir l’argent qui leur est dû.
"L'écart [entre l'autorisation d'engagement et la réalisation des dépenses correspondantes] s'amplifie d'année en année et vient un moment où les impayés s'accumulent. (...) En ce début de législature nous devons régler cette dérive", avait déclaré Jean Arthuis. Il avait fait remarquer que " les impayés affectent des hôpitaux de campagne au Proche-Orient, des étudiants privés de bourses Erasmus, des chercheurs en panne de financements, et des collectivités locales privées de ressources." "Nos chefs d'États et de gouvernements ne peuvent plus longtemps formuler des promesses sur le dos du budget européen sans consentir les financements correspondants. (...) Halte à l'hypocrisie. L'image de l'Europe aux yeux de nos concitoyens est en cause" avait-t-il ajouté.
Suite à la présentation de la position du Conseil, le Parlement dispose de 42 jours pour se prononcer. Les amendements aux chiffres proposés par le Conseil seront votés en commission des budgets le 29 septembre 2014 et en session plénière le 22 octobre 2014. Le vote final du Parlement sur une position commune Conseil-Parlement pour le budget de 2015 est prévu le 26 novembre 2014 après la conciliation.