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Énergie - Marché intérieur
Dans un rapport, les régulateurs européens de l’énergie font l’état des imperfections dans les marchés nationaux de l’énergie et de l’électricité
22-10-2014


ceer-rapportDans leur rapport sur la surveillance des marchés publié le 22 octobre 2014, l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER)  et le Conseil des régulateurs européens de l’énergie (CEER) ont évalué l’évolution des marchés intérieurs de gaz et d’électricité vers une plus grande libéralisation qu’ils soutiennent.

Le contexte

Instituée depuis mars 2011, l'Agence européenne de coopération des régulateurs de l'énergie (ACER) est une agence exécutive de l'Union européenne ayant son siège à Ljubljana, dont la mission est d'assister, au niveau de l'UE, les autorités nationales de régulation dans leurs activités de régulation au sein des États membres et, si nécessaire, de coordonner leurs actions.

Le Conseil des régulateurs européens de l’énergie (CEER) est une association à but non lucratif  qui réunit les régulateurs des 28 Etats membres ainsi que ceux de l’Islande et de la Norvège. Son objectif est de faciliter la coopération et l’échange de bonnes pratiques entre les régulateurs membres,  en vue de créer un marché européen de l’énergie "unique, compétitif, efficient et durable".

Le marché intérieur du gaz et de l’électricité fait partie des grands thèmes du plan d’action "une politique de l’énergie pour l’Europe". Le Conseil européen de mai 2007 a établi que, pour concrétiser le marché intérieur de l’énergie, il faut parvenir à "un marché européen de l’énergie véritablement concurrentiel, unique et interconnecté qui représenterait des avantages significatifs pour la compétitivité et pour les consommateurs de l’UE et qui renforcerait la sécurité des approvisionnements". Dans leur rapport, l’ACER et le CEER veulent analyser dans quelle mesure les marchés intérieurs du gaz et de l’énergie ont évolué vers davantage de libéralisation.

Une augmentation des prix principalement due à l’augmentation du coût de "composants indisputables"

Malgré une baisse générale des prix de gros de l’énergie due à une meilleure insertion des énergies renouvelables et à une baisse du prix du charbon, les prix au détail de l’électricité et du gaz ont continué d’augmenter en 2013, mais à un rythme moins élevé que celui des années précédentes.

Selon le rapport, la facture d’électricité des ménages a en moyenne augmenté de 4,4 % (4,6 % en 2012) et celle de gaz de 2,7 % (10 % en 2012). La facture d’électricité pour les industries a quant à elle augmenté de 2,7 % (10 % en 2012) et celle de gaz de 1,2 % (11 % en 2012).

Le rapport révèle une faible réactivité entre les prix de gros de l'électricité et celui de détail. Il signale également l'augmentation des marges (soit la différence entre la composante énergétique du prix de vente et le coût de gros de l’énergie) dans plusieurs États membres où les marchés de détail ont été entièrement libéralisés. Elle est principalement due à l’augmentation des "composants indisputables (non-contestable dans le texte, ndlr) du prix", tels que les frais de réseau, les impôts et taxes, et la TVA, par opposition à la composante énergétique. Dans tous les pays européens (à l'exception de Malte, Irlande , Chypre, la Grèce et le Royaume-Uni ) les charges non contestables constituent la partie la plus importante du prix final de l'électricité .

Par conséquent, les avantages du marché unique, tels que la baisse des prix de gros de l'électricité, ne sont toujours pas entièrement traduits en avantages pour les consommateurs finaux.

Les marchés nationaux de l’énergie sont perfectibles

Dans leur rapport, l'ACER et le CEER font le constat d’un cercle vicieux dans de nombreux Etats membres où une faible concurrence se traduit en de faibles taux de changement de fournisseur.

L’ACER et le CEER indiquent que ce faible changement est parfois évoqué pour justifier les tarifs réglementés, qui, à leur tour, peuvent constituer une entrave à la concurrence.  

Pour contrecarrer cette tendance, le directeur de l'ACER, Alberto Pototschnig, préconise la suppression des barrières à l'entrée sur les marchés de détail à travers la pleine mise en œuvre du troisième paquet de libéralisation, l'adoption de codes de réseau et l'élimination progressive des tarifs réglementés pour les clients non vulnérables.

Mais, l'ACER et le CEER soulignent dans leur rapport que des progrès ont été réalisés: en 2013, 15 États membres sur 28 pratiquaient encore des prix réglementés dans le secteur de l'électricité contre 18 en 2012, et 15 États membres sur 26 le faisaient dans le secteur du gaz (Chypre et Malte ne disposent pas de fourniture de gaz).

Malgré cela, les possibilités pour les consommateurs d'obtenir de l’énergie à un meilleur prix au en changeant de fournisseur sont réelles. Mais le taux de changement reste faible dans la plupart des États membres. Dans certains cas, cela est peut-être dû à la fidélité au fournisseur ou à l'aversion pour le risque. L'ACER et le CEER dans leur rapport pour une sensibilisation accrue sur les possibilités de commutation à travers, par exemple, le développement d'outils en ligne de comparaison de prix et des prix transparents.

Pour ce qui est des marchés de détail, l'ACER évoque que le manque de différenciation des produits et des prix n'incite guère les consommateurs domestiques à changer de fournisseur.

Plus loin, le rapport constate que pour le gaz comme pour l'électricité, l'intégration des marchés de gros continue de progresser. Ainsi, en 2013, le niveau d'efficacité dans l'utilisation des interconnexions a continué d'augmenter grâce au couplage de marché, atteignant un niveau de 77 % contre les 60 % de 2010. L’ACER et le CEER regrettent néanmoins que cela n’ait pas cela abouti à "une convergence accrue des prix". Selon le rapport, ceci s'explique principalement par une plus grande pénétration des énergies renouvelables. Il souligne que dans le futur, une plus grande part de production d'énergie renouvelable à base variable et non programmable dans le système électrique nécessitera davantage de souplesse dans la réponse de l'offre.

L’ACER et le CEER font un pronostic encourageant en ce qui concerne les émissions de CO2. Ils prévoient en effet que jusqu’en 2025, une transition vers une société à faible teneur en carbone aura lieu, où "des marchés souples" et "réactifs" altèreront la manière dont les consommateurs appréhendent l'énergie.

Le rapport souligne que cette évolution devra mieux tenir compte de la protection et les droits des consommateurs.  En s'appuyant sur les actions concrètes décrites par les régulateurs dans leur proposition Bridge to 2025 pour mieux impliquer les consommateurs dans le marché, Lord John Mogg, président du conseil d'administration de l'ACER dirigeant du CEER, attire l’attention sur le besoin d'un cadre approprié pour inclure la réponse de la demande dans le marché.

Le principal défi identifié pour le gaz, c’est la nécessité de favoriser la liquidité des échanges de gaz et de faire en sorte que toutes les capacités inutilisées peuvent être facilement remises sur le marché.  D’autres expéditeurs de gaz pouvoir les utiliser à court terme, si des opportunités commerciales se présentent.

Le Luxembourg se profile en tant que bon élève, mais reste peu concurrentiel

Au Luxembourg, la facture d’électricité pour les ménages, taxes comprises, est inférieure à la moyenne européenne de presque 5 euro cents par kWh (Kilowatt-heure). Pour ce qui est de la facture d’électricité des industries, celles-ci est de presque 7 euro cents par kWh inférieure à la moyenne européenne, taxes comprises. C’est la moins élevée de toute l’UE.

En ce qui concerne la facture de gaz, les ménages luxembourgeois payent en moyenne un cent par kWh en moins que la moyenne européenne.

Mais la facture de gaz des industries est légèrement supérieure à la moyenne européenne, taxes comprises.

D’une manière générale, sur la facture des ménages et des industriels, les taxes luxembourgeoises en matière de gaz et d’électricité sont faibles comparées aux autres pays de l’UE.

Plus loin, le rapport applaudit le fait qu’au Luxembourg, 100 % de l’offre d’électricité provient de sources d’énergie verte, et que quatre offres de gaz sur six sont vertes. Avec ces chiffres, le Luxembourg détient la première place.

De plus, au Luxembourg, en 2013, la demande de gaz naturel a diminué de 15 %, ce qui le classe en deuxième place en termes de diminutions les plus importantes.

Le rapport constate également que dans la capitale du Luxembourg, les consommateurs sont moins sensibles aux variations de prix que dans les autres capitales et changent très peu de fournisseurs.

Pour ce qui est des marchés de détail, les indicateurs de performance en matière de concurrence indiquent que la compétition sur le marché du gaz est quasiment nulle au Luxembourg, tandis que le pays se situe dans la moyenne européenne en ce qui regarde l’électricité, même si la concurrence n’y est pas élevée.

Les régulateurs expliquent cela par le fait qu’au Luxembourg, les nouvelles entrées sur le marché de l’énergie sont faibles. Bien que le Luxembourg ne régule pas ses prix et que la marge de bénéfice y est attractive, l’entrée dans le marché de l’électricité est encore faible et aucune entrée n’est à signaler sur le marché du gaz. Selon le rapport, ceci est dû à la petite taille du marché luxembourgeois. Le Luxembourg n’est pas une destination privilégiée des entreprises qui souhaitent poursuivre des économies d’échelle.

Ceci explique en partie pourquoi au Luxembourg, le taux de changement est presque nul en ce qui concerne le gaz et l’électricité.