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Parlement européen - Fiscalité
La motion de censure déposée contre la Commission européenne rejetée par une large majorité au Parlement européen
27-11-2014


La motion de censure déposée contre la Commission européenne rejetée par une large majorité au Parlement européen le 27 novembre 2014 (source: Parlement européen)Le Parlement européen a rejeté le 27 novembre 2014, une motion de censure introduite contre la Commission européenne présidée par Jean-Claude Juncker moins de quatre semaines après son entrée en fonction. Les eurodéputés se sont prononcés à une large majorité par 461 voix contre, 101 voix pour et 88 abstentions.

Le contexte

Pour mémoire, la motion avait été déposée par 76 députés, dont une majorité appartenant au groupe eurosceptique EFDD dirigé par le leader de l’Ukip britannique Nigel Farage, ainsi que plusieurs non-inscrits, notamment issus du Front national français, suite aux révélations "LuxLeaks" qui avaient poussé le président de la Commission à venir s’expliquer devant la plénière du Parlement européen le 12 novembre 2014.

Débattue le 24 novembre en plénière, cette motion n’avait déjà pas recueilli le soutien des autres groupes politiques du Parlement européen. Selon le règlement du Parlement, pour dissoudre la Commission, la motion aurait dû obtenir une double majorité, soit deux-tiers des suffrages exprimés et une majorité de l'ensemble des députés (soit 376).

Les réactions

Pour le groupe PPE au Parlement européen, son président, Manfred Weber, a salué "un vote de défiance contre les europhobes au Parlement européen" par voie de communiqué. Il a ainsi relevé que "ce n’était pas contre la Commission européenne que la motion de censure était dirigée, mais contre l’Union européenne dans son ensemble", notant qu’"une large majorité [de députés] a envoyé un signal clair: le Parlement européen soutient la Commission européenne et son programme de réformes pour l’Europe". Dès lors, "la tentative, par les eurodéputés europhobes, de déstabiliser les institutions européennes, a échoué", a-t-il estimé.

"En présentant ses initiatives pour lutter contre l’évasion fiscale, le président de la Commission a indiqué clairement dans quels domaines des actions étaient nécessaires, et il a pris les mesures adaptées en ce sens. Nous le soutenons pleinement dans cette voie. Il faut en finir avec l’injustice fiscale en Europe. La balle est dans le camp des Etats membres. Ce sont eux qui sont responsables des questions fiscales", a encore affirmé Manfred Weber.

De son côté, le socialiste belge Marc Tarabella (S&D) s’est félicité dans un communiqué d’un large rejet de la motion "présentée par l’alliance eurosceptique/extrême droite Le Pen – Farage - Salvini qui avait pour but de faire démissionner la Commission européenne et de rendre l’Europe ingouvernable". Si le député européen juge que "dénoncer les problèmes est une des tâches des eurodéputés", il souligne que "quand ils ne proposent comme solution que la destruction de l’Europe au mépris des citoyens, ils ne servent à rien ou ne servent que leurs propres intérêts !".

Les "véritables objectifs de ces députés anti-Europe" sont selon le député socialiste "de générer la méfiance et la peur, deux sentiments dont se nourrissent depuis toujours les extrémismes en tout genre" et surtout "de prouver que l’Europe est ingouvernable, ingouvernabilité qu’ils auront eux-mêmes générée afin de s’en nourrir électoralement".

Pour sa part, le président du groupe ALDE (libéraux) au Parlement européen, Guy Verhofstadt, a dénoncé le fait que Nigel Farage et la présidente du FN français Marine Le Pen "révèlent finalement leur relation cachée et le fait qu'ils suivent la même stratégie populiste", rapporte l’AFP.

Le groupe de la Gauche unie européenne (GUE/NGL), qui avait de son côté également tenté de récolter des signatures en vue de présenter une motion de censure contre la Commission Juncker tout en rejetant tout soutien des députés d’extrême-droite, a rappelé par la voix de sa présidente, Gabi Zimmer, que le groupe restait "uni dans [son] opposition à [Jean-Claude] Juncker puisque nous n’avons pas voté pour lui comme président de la Commission". "Notre critique de M. Juncker demeure. Sa réaction à ce scandale a été décevante car il n’engage pas la responsabilité de ses actes en tant qu’ancien Premier ministre du Luxembourg et membre du Conseil européen. Ce n’est tout simplement pas suffisant", souligne-t-elle, citée dans un communiqué, alors que son groupe s'est abstenu sur la motion.

"Maintenant, nous appelons à la création d'une commission d'enquête parlementaire sur la fiscalité, ainsi que d'une véritable enquête sur les décisions fiscales dans plusieurs Etats membres de l'UE. Le véritable scandale est que l'évitement de l'impôt des sociétés est en grande partie légal dans l'UE, provoquant une course à l’évasion fiscale entre les Etats membres. Cela prouve que la lutte contre [ce phénomène] doit s’attaquer directement à l'architecture bancale de l'UE", conclut-elle.

L’eurodéputé luxembourgeois Claude Turmes (Verts/ALE) a également réagi en diffusant un communiqué dans lequel il constate avec satisfaction le rejet d’une "initiative de populistes et d’extrémistes de droite sans nuances et unilatéralement dirigée contre le Luxembourg". Selon le député Vert, le fait "que ce soit précisément la droite autour de Marine Le Pen qui appelle à la démission de la Commission est une farce", ses représentants s’opposant "avec véhémence à toute forme effective d'harmonisation de la politique fiscale européenne", rappelle-t-il.

"Au lieu de ces initiatives politiques inutiles et injustes nous avons besoin d'un large débat sur l'équité fiscale en Europe. Car il n’est pas juste que des sociétés internationales telles qu’Amazon payent moins de 1 % de taxes, alors que par exemple, la boulangerie ou à la librairie du coin doivent dépenser considérablement plus", juge Claude Turmes.

En revanche, le groupe EFDD à l’origine de la motion de censure a dénoncé le fait que le "Parlement européen a ignoré le scandale fiscal de plusieurs milliards du Luxembourg afin de protéger [Jean-Claude] Juncker", par voie de communiqué.

Selon le député européen britannique Steven Woolfe "le Parlement européen a voté pour protéger le président de la Commission imbibé de scandale plutôt que de protéger leurs propres populations dont les revenus fiscaux nationaux ont été saignés par les grands stratagèmes d'évitement fiscal pour grandes entreprises de Juncker" dont la crédibilité serait "ruinée" par les révélations "Luxleaks". "Mais le scandale de ce que Juncker a fait comme ami du ‘big business’ ne va pas disparaître simplement parce qu’aujourd'hui ses collègues fédéralistes ici au Parlement ont défait la motion de censure", prévient-il