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Changement climatique - Environnement
Pour Carole Dieschbourg, l’accord sur le climat adopté à Lima est "faible", mais constitue une "bonne base" pour la conférence de Paris en 2015
14-12-2014


La ministre luxembourgeoise de l’Environnement, Carole Dieschbourg, lors d'une déclaration à la conférence de Lima (Source : MDDI)La ministre luxembourgeoise de l’Environnement, Carole Dieschbourg, s’est félicitée de l’accord auquel est parvenue la conférence de l'ONU sur le climat le 14 décembre 2014 à Lima. "Il s’agit d’un accord faible et l’Union européenne s’est attendue à plus, mais il constitue pourtant une bonne base" pour la conférence de l'ONU sur le climat à Paris en décembre 2015, a-t-elle déclaré au micro de RTL. Carole Dieschbourg a présidé la délégation luxembourgeoise à la 20e Conférence des parties (COP), l'organe suprême de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui s’est réuni cette année du 1er au 14 décembre à Lima.

Les 195 pays représentés à Lima se sont accordés sur l'objectif de limiter la hausse du thermomètre de la planète à 2°C, selon un document intitulé "L’appel de Lima pour un plan d’action sur le climat". L’accord de Lima est crucial pour la conférence de Paris où un accord mondial doit être trouvé pour prendre le relais de l’accord de Kyoto, qui expire en 2020 et qui ne concernait que les pays industrialisés, à l’exception des Etats-Unis qui ne l’ont jamais ratifié.

Pour rappel, les ministres de l’UE ont insisté dans leurs conclusions du Conseil Environnement  d’octobre 2014, où ils avaient adopté leur position pour cette conférence, "sur l'urgence d'une action mondiale résolue et sur l'importance d'adopter en 2015, à Paris, un accord ambitieux, juridiquement contraignant, applicable à toutes les parties et sur l'importance des résultats de Lima".

Carole Dieschbourg s’est dite "heureuse" qu’un accord ait été trouvé, selon ses propos retransmis par la radio 100,7. "Ce n’est pas si négatif que ça, car il est difficile de trouver des accords ambitieux dans des réunions si grandes où il y a toujours des Etats qui bloquent", a-t-elle jugée. Elle est pourtant "déçue" quant au niveau d’ambition de l’accord.

La ministre s’est dite optimiste qu’un accord mondial soit conclu en 2015, puisque "tous les Etats sont concernés par le changement climatique et tous ont conscience qu’il faut agir vite". Elle a souligné l’importance de la coopération du Luxembourg, qui aura la présidence du Conseil de l’UE durant la conférence de Paris du 15 décembre 2015, avec la France, organisatrice de l’évènement.

Des contributions nationales affaiblies

Le Logo de la conférence de l'ONU sur le climat à Lima (Source : ONU)La ministre a regretté le fait que le texte ait été affaibli en ce qui concerne les "contributions nationales" de réduction ou limitation d'émissions de gaz à effet de serre (GES) qui devront être présentées en mars 2015. "Ce sont des failles dont il faut s’occuper maintenant, en amont de la conférence de Paris", a estimé Carole Dieschbourg, ajoutant que l’UE donne l’exemple avec son objectif de réduction de CO2 "progressif". L’UE s’était en effet engagée à un objectif de réduction de CO2 de 40 % pour 2030 par rapport à leur niveau de 1990 lors du Conseil européen du 23 octobre 2014, alors que l’objectif pour 2020 était de 20 %.

"Les États ambitieux ont su convaincre les autres États d’arrêter des éléments de langage empêchant le retour en arrière et évitant le nivellement vers le bas dans le contexte de la communication des contributions nationales", note un communiqué du gouvernement qui souligne une "coopération excellente" au sein de l’Union européenne qui a permis d’atteindre "un meilleur niveau d’ambition".  Le texte explique que l’accord de Paris "fixera de façon contraignante les objectifs et les moyens de mise en œuvre des mesures pour l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques pour les États, mais aussi les questions de financement, d’assistance technique et de transfert de technologies destinés  aux États en voie de développement, notamment les États africains et les petits États insulaires qui sont les plus vulnérables face aux effets du dérèglement climatique".

Carole Dieschbourg a considéré que l’aide financière aux pays en voie de développement joue "un rôle crucial", selon sa déclaration à 100,7. Sans voie clairement tracée, il sera difficile de convaincre ces pays de participer à l’effort global, estime-t-elle. Car le document adopté à Lima ne contraint pas les pays riches à apporter une aide financière aux pays en développement, comme le réclamaient ces derniers qui voulaient que la question de l'aide financière aux pays du Sud soit intégrée dans les "contributions nationales" des pays développés. Les pays du sud ont aussi réclamé, mais sans succès, des précisions sur les canaux de financement qui doivent permettre d'arriver à 100 milliards de dollars d'aide en 2020.

Faute d'avancées significatives sur ces points, les pays développés ont obtenu que le degré de précision des informations à fournir pour les contributions soit assoupli, tout comme la réaffirmation du principe de "responsabilité commune mais différenciée" dans le réchauffement entre pays industrialisés et en voie de développement. Selon le communiqué du gouvernement, une "approche différenciée" a permis de convaincre les Etats moins ambitieux, notamment en ce qui concerne les responsabilités et capacités de ces Etats vu leurs différentes circonstances nationales. Cette approche "a également permis aux États les plus vulnérables, en l’occurrence les États les moins développés et les petits États insulaires de faire référence aux responsabilités de certains États quant aux fatalités et dégâts causés par les changements climatiques", note le texte.

Pour l’Union européenne, l’accord constitue un "pas en avant"

La Commission européenne a souligné dans un communiqué que cet accord obligeait tous les pays à identifier dans les prochains mois "de manière claire, transparente et compréhensible" leurs engagements pour réduire ces émissions. L’Union européenne "salue ce résultat (...) comme un pas en avant vers un accord global sur le climat à Paris l'année prochaine", selon ce communiqué. "Cela nous permettra de quantifier nos propres contributions", ajoute le texte.

Miguel Arias Cañete, commissaire européen chargé de l'énergie et du climat, a rappelé que l'objectif de la conférence de Lima était de "poser les bases pour la négociation" qui doit avoir lieu au cours de la conférence de Paris. "Bien que l'UE ait espéré un résultat plus ambitieux à Lima, nous pensons que nous sommes sur la voie d'un accord global à Paris", a-t-il ajouté, cité par le communiqué.

Selon le gouvernement luxembourgeois, les Etats membres de l’UE ont trouvé en marge de la conférence un accord sur l’amendement de Doha, qui fixe les obligations en matière de réduction des États pour la période entre 2013 et 2020 du Protocole de Kyoto. Cet accord sera discuté lors du Conseil Environnement du 17 décembre 2014.

Réactions au Parlement européen

Le vice-président de la délégation du Parlement européen Jo Leinen (S&D) a estimé qu'"en dépit de quelques progrès à Lima, il y a encore de nombreux obstacles sur le parcours" menant à un accord à Paris. L'Union européenne aura la tâche de "jeter un pont entre les pays en développement d'une part et les pays développés d'autre part", a souligné Jo Leinen dans un communiqué. Pour créer la confiance entre les deux parties, il faudrait un calendrier pour le financement des objectifs climatiques, estime-t-il.

Le fait que les Etats doivent  présenter des contributions nationales précises qui seront "plus ambitieuses" que leurs aveux est un "signal positif", estime Kathleen Van Brempt, vice-présidente du S&D dans un communiqué. Elle met en avant l’importance d’un "esprit de Lima", selon lequel tous les Etats seraient conscients du fait qu’il faut lutter contre le changement climatique et qu’à long terme, ils œuvreraient tous pour une économie "à zéro carbone" afin de protéger l’environnement et réduire la dépendance énergétique. La députée appelle l’UE à lutter pour une économie européenne à zéro carbone pour 2050.

Pour l’eurodéputé Yannick Jadot (Verts européens), il s’agit d’une "bonne nouvelle" qu’aucun pays "n’a remis en cause la nécessité de trouver un accord global et ambitieux à Paris l’année prochaine", rapporte un communiqué du groupe des Verts. "Malgré les éternelles divisions sur les ambitions et les engagements financiers, Lima a néanmoins montré un visage nouveau. Une dynamique collective des pays a finalement prévalu", estime-t-il. Mais il a dénoncé des engagements financiers "insuffisants" de la part des plus gros pollueurs et demandé des instruments internationaux efficaces pour "accélérer, dans les pays en développement, tant le transfert des énergies fossiles vers les renouvelables que les solutions soutenables et respectueuses du climat".

Un "compromis minimal", estime Greenpeace-Luxembourg

Pour Philippe Schockweiler, directeur de communication chez Greenpeace-Luxembourg, il s’agit d’un "compromis minimal" qui reporte les décisions importantes à la conférence de Paris, selon ses propos retransmis par la radio 100,7. Il cite notamment le Fonds vert pour le climat, pour lequel il n’y pas de "feuille de route" pour son utilisation. La Commission européenne a précisé dans son communiqué que le financement de ce fonds a passé durant la conférence de lima le cap des 10 milliards de dollars, dont 50 % proviennent des Etats membres de l’UE.

Philippe Schockweiler a regretté que beaucoup de détails n’aient pas été clarifiés alors qu’il y ait eu récemment un "accord historique" entre les Etats-Unis et la Chine qui s’étaient engagés en novembre 2012 pour une réduction des émissions de CO2. Tandis que les Etats-Unis avaient annoncé une réduction de 26 à 28 % de leurs émissions d'ici à 2025 par rapport à 2005, la Chine s’était fixé l'objectif d'un pic de ses émissions de gaz à effet de serre "autour de 2030", avec l'intention "d'essayer d'y arriver plus tôt", selon la Maison blanche.