Cinq jours avant l’ouverture de la 19e conférence annuelle des Nations unies sur le changement climatique à Varsovie, la Commission européenne a proposé, le 6 novembre 2013, la législation nécessaire, constituée de deux textes, pour ratifier officiellement la deuxième période d’engagement (2013-2020) du protocole de Kyoto sur les changements climatiques.
Le premier texte législatif est une proposition de décision du Conseil relative à la ratification de l'amendement de Doha au protocole de Kyoto, adopté en décembre 2012. Il instaure la deuxième période d'engagement, 2013-2020, et expose les modalités selon lesquelles l’Union, ses États membres et l’Islande rempliront conjointement l’engagement de réduire de 20 % leurs émissions d’ici 2020 par rapport à 1990.
En termes d’objectifs, cette ratification ne change rien et reste en ligne avec les objectifs repris dans le Paquet législatif Climat et énergie, adopté en 2009. Par contre, ce premier texte permet à un Etat membre de renforcer ses objectifs sans procédure de ratification formelle et inclut aussi une disposition assurant que les engagements pour cette seconde période ne sont pas moins ambitieux que pour la première.
Le second texte est une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les aspects techniques de la mise en œuvre de la deuxième période. Il concerne notamment une modification du fonctionnement du registre de l'Union servant à la comptabilisation exacte des transactions effectuées dans le cadre du système d'échange de quotas d'émission.
Le Parlement européen, le Conseil, les États membres et l’Islande devront désormais engager leurs procédures de ratification respectives, un processus que la commissaire européenne chargée de l’action pour le climat, Connie Hedgegaard, espère voir achevé "aussi rapidement que possible", au plus tard pour février 2015, selon un premier communiqué de presse diffusé par la Commission européenne. Ceux-ci déposeront ensuite simultanément leurs instruments d’acceptation respectifs à l’ONU, de manière que l’amendement de Doha puisse entrer en vigueur à la même date pour tous. Au niveau international, l'amendement de Doha entrera en vigueur dès qu'il aura été ratifié par les trois quarts des parties au protocole (c'est-à-dire par 144 parties sur les 192).
L’UE entend également gagner en crédibilité pour atteindre ses objectifs à la conférence de Varsovie. "La ratification de la deuxième phase du protocole de Kyoto souligne la détermination de l'Union à fonder l'action internationale en matière de changement climatique sur une approche juridiquement contraignante et basée sur le respect de règles", a estimé Connie Hedegaard. "En ratifiant officiellement la deuxième phase, l’Europe contribuera à ce que celle‑ci entre en vigueur au niveau international dans les meilleurs délais", a-t-elle dit.
À Durban en décembre 2011, "l'engagement avait été pris de maintenir en vie le Protocole de Kyoto pendant que nous négocions un nouvel accord", a déclaré, en conférence de presse, Connie Hedegaard, selon des propos rapportés par l’Agence Europe. "Il s'agit maintenant de dire à nos partenaires que l'autre partie de l'accord est tout aussi importante, que toutes les parties doivent assumer leurs responsabilités."
Parallèlement, la Commission européenne et la présidence lituanienne de l’UE ont diffusé, le 6 novembre 2013, un communiqué de presse commun, dans lequel elles détaillent leurs attentes pour la conférence de Varsovie. L’UE "souhaite voir adopter un ensemble équilibré de décisions renforçant l’action internationale pour le climat", affirment-elles. Les décisions prises devraient ainsi permettre de faire des avancées dans trois domaines majeurs.
D’abord, elles devraient permettre d’améliorer la mise en œuvre des mesures déjà convenues en matière de lutte contre le changement climatique. Elles aborderaient notamment la question de la prise en charge des pertes et dommages causés par le changement climatique dans les pays en développement particulièrement vulnérables. L’UE a pour sa part engagé 7,34 milliards d’euros à titre de financement pour les pays en voie de développement sur la période 2010-2012. Au titre de l’année 2013, les contributions volontaires s’élèveraient à un montant total de 5,5 milliards d’euros, rappelle la Commission européenne. Il s’agirait également de finaliser les règles de transparence pour les engagements souscrits jusqu’à présent ainsi que les modalités de mise en œuvre de la deuxième période d’engagement du protocole de Kyoto, qui s’étend de 2013 à 2020.
L’UE considère ensuite que des décisions devraient être prises pour faire avancer le dossier de l’accroissement des réductions des émissions mondiales de gaz à effet de serre avant 2020, les objectifs actuels n’étant "pas encore assez ambitieux pour mettre le monde sur la bonne voie afin d’éviter que le réchauffement de la planète ne dépasse le seuil des 2 °C". Elle espère en la matière un engagement au niveau ministériel. Les pays, pour ceux qui ne l’ont pas encore fait, devraient avant cela prendre des engagements en matière d’émissions pour 2020 avant le début de la conférence de Varsovie. Lors de la conférence, il serait ensuite mis en place un mécanisme pour toutes les parties, dans le cadre duquel celles-ci examineraient les moyens de renforcer leur action sur le plan des émissions pour la période allant jusqu’à 2020.
"Il existe une marge de manœuvre considérable pour réduire davantage encore les émissions, grâce, entre autres, à une action plus vigoureuse en ce qui concerne l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables, les gaz à effet de serre fluorés, la réforme des subventions accordées aux combustibles fossiles et les émissions provenant de l’aviation et du transport maritime", notent la Commission européenne et la Présidence lituanienne.
Enfin, l’UE espère que cette rencontre préparera le terrain pour l’adoption, d’ici à 2015, d’un nouvel accord mondial sur le climat formulant des objectifs pour la période post-2020. Elle souhaite que cet "accord de 2015" soit "juridiquement contraignant" et contienne des engagements en matière d’émissions de la part des 192 parties au Protocole de Kyoto. "L’Union européenne a proposé une démarche progressive, comprenant une phase d’évaluation, pour la formulation d’engagements ambitieux aux fins de l’accord de 2015, ce qui constitue une bonne base de travail pour l’adoption d’une décision à Varsovie", a rappelé le ministre lituanien de l’environnement, Valentinas Mazuronis, dont le pays préside le Conseil de l’UE au 2e semestre 2013.
Si la conférence n’aboutira pas à la conclusion des négociations sur l’accord mondial de 2015, « elle marquera néanmoins une étape très importante dans l’accomplissement des progrès nécessaires » en vue de Paris 2015, estime Connie Hedegaard. L’Union européenne souhaiterait même qu’un premier projet de texte puisse être présenté "bien avant mai 2015". Elle estime qu’il est urgent de faire des progrès sur l’élaboration, le champ d’application et la structure de cet accord mondial qui doit entrer en vigueur en 2020, au sujet desquels elle a déjà fait connaître ses positions à ses partenaires.
Elle propose un calendrier de préparation des engagements en 2014, la communication d’informations expliquant les engagements et une phase d’évaluation permettant de garantir que, collectivement, les engagements soient suffisamment ambitieux pour limiter le réchauffement planétaire à moins de 2 °C par rapport aux niveaux de l’ère préindustrielle.