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Politique étrangère et de défense
Suite à la prise de la ville de Debaltseve par les rebelles séparatistes dans l’est de l’Ukraine, Jean Asselborn veut encore croire en l’issue positive des accords de Minsk
19-02-2015


image d'illustration sur les sanctions imposees par l'UE à la Russie en raison de la crise ukrainienne (source: conseil de lue)Réagissant à la prise de contrôle de la ville de Debaltseve, dans l’est de l’Ukraine, par les rebelles séparatistes malgré les nouveaux accords de Minsk conclus le 12 février 2015 et prévoyant un cessez-le-feu, le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a estimé qu’il fallait être "préoccupés mais pas fatalistes" quant à l’évolution de la situation sur le terrain.

Selon le ministre, il ne s’agit pas "désormais" de mettre "l’ensemble de l’accord en question", a-t-il ainsi confié au micro de la radio luxembourgeoise RTL le 19 février 2015. "Les prochains jours et les prochaines heures montreront si l’esprit des accords de Minsk est totalement violé", a poursuivi Jean Asselborn.

Le contexte

Pour mémoire, l’intensification des combats et du nombre civils tués dans l’est de l’Ukraine au mois de janvier 2015 avait poussé à la convocation d’un Conseil Affaires étrangères (CAE) extraordinaire le 29 janvier qui avait débattu de  nouvelles sanctions en la matière. Une liste mise à jour des personnes et entités sanctionnées en lien avec la situation dans l'est de l'Ukraine avait par la suite été adoptée au CAE du 9 février, les ministres en ayant alors repoussé l’entrée en vigueur au 16 février 2015 pour laisser une chance aux initiatives de paix en cours. Le 16 février, cette liste étendue est entrée en application suite à sa publication au Journal officiel de l’UE.

C’est dans ce contexte que le nouvel accord de Minsk a été négocié dans la nuit du 11 au 12 février 2015 entre les présidents français, ukrainien et russe et la chancelière allemande. Présenté le 12 février lors du Conseil européen informel, cet accord prévoyait notamment un cessez-le-feu qui devait entrer en stricte application le 15 février à minuit.

Or, les combats se sont poursuivis depuis dans la ville de Debaltseve, nœud ferroviaire stratégique qui relie les fiefs séparatistes de Donetsk et de Lougansk, où l’armée ukrainienne était encerclée par les séparatistes. Le 18 février, face à l’avancée des rebelles, le président ukrainien, Petro Porochenko, a confirmé la prise de la ville et le retrait des troupes régulières, avant d’annoncer que son pays allait demander l'envoi d'une mission policière de l'Union européenne mandatée par l'ONU pour assurer le maintien de la paix dans la région.

De son côté, la Haute Représentante de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, a condamné dans une déclaration écrite diffusée le 18 février "une violation flagrante" du cessez-le-feu, appelant les séparatistes et la Russie à mettre "immédiatement et pleinement en œuvre les engagements convenus à Minsk".

La Russie doit montrer sa bonne volonté, selon Jean Asselborn

Interrogé sur ces derniers développements, le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn, a rappelé que les objectifs de l’accord de Minsk étaient "clairs", à savoir un cessez-le-feu immédiat et global, le retrait des armes lourdes et à moyen terme l’organisation d’une décentralisation régionale ainsi que d’élections dans la région du Donbass.

"Si je suis optimiste, voire très optimiste, je peux dire que les deux premiers objectifs sont remplis partout sauf à Debaltseve, et si je suis réaliste, je dois dire qu’il s’agit d’une très grave violation de l’accord de Minsk et de la résolution 2202 du Conseil de Sécurité de l’ONU", a-t-il ainsi confié au micro de RTL le 19 février.

Selon Jean Asselborn, la Russie est "l’acteur principal" dans la crise. "Sans la Russie, sans soutien politique, sans armes, sans formation et sans renforts, il est clair qu’il n’existerait pas de séparatistes [dans l’est de l’Ukraine]", a ainsi estimé le ministre. "Dès lors, la Russie doit montrer, en faisant pression sur les séparatistes, que le cessez-le-feu est respecté et qu’il n’y a pas de nouvelle expansion [de la zone sous contrôle séparatiste]", a-t-il poursuivi, notant qu’il n’y aura à ce sujet "aucune excuse".

En revanche, s’il devait y avoir une percée des séparatistes ("Duerchmarsch") vers Marioupol ou la Crimée, "alors nous serions confrontés à une guerre contre l’Ukraine", juge-t-il, "et je ne peux pas m’imaginer que ce soit la volonté de la Russie, ni bien sûr de l’Union européenne".

Selon Jean Asselborn, l’UE a un rôle "très important" à jouer dans ce conflit à travers une approche qui consiste à ne pas régler les problèmes avec la force militaire mais via une mise sous pression. Il s’agit de "montrer intelligemment que la Russie a besoin de  l’UE dans tous les domaines et pas seulement en matière économique" et "que nous voulons que la Russie soit un partenaire de l’UE", a-t-il ainsi indiqué. Les sanctions décrétées par l’UE dans ce contexte sont, selon le ministre, un des "moyens diplomatiques" pour atteindre cet objectif.

Quant à la mise en place d’une force internationale de maintien de la paix sous l’égide de l’ONU et de l’UE telle que réclamée la veille par le président ukrainien, Petro Porochenko, Jean Asselborn estime "que l’on peut en discuter" mais qu’il s’agirait avant tout de "se concentrer sur la mission en cours de l’OSCE". "Il y a en ce moment une organisation qui devrait être à même, si tout le monde le veut, y compris la Russie, de vérifier le respect du cessez-le-feu sur le terrain. Toute autre mission, que ce soit des casques bleus ou une mission de police de l’UE, conduirait inévitablement à un conflit gelé", a ainsi jugé Jean Asselborn. Or, cela ne serait "ni dans l’intérêt de l’Ukraine, ni dans celui de l’UE et ça ne peut pas être dans celui de la Russie".