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Economie, finances et monnaie
Dans un entretien au magazine Paperjam, le président de l’ABBL pointe les coûts que génère l’Union bancaire pour le secteur financier luxembourgeois, sans se montrer inquiet toutefois quant à l’impact de sa mise en place
02-02-2015


Dans un entretien publié dans l’édition de février 2015 du mensuel Paperjam, et sur le sitABBLe Internet du magazine, le président de l’Association des banques et banquiers, Luxembourg (ABBL), Yves Maas, fait le point sur l’état de santé du secteur bancaire au Luxembourg.

"Malgré tous les défis existants, le secteur est toujours très robuste et capable de maîtriser ces défis", donne comme diagnostic le président de l’ABBL aux journalistes Véronique Poujol et Jean-Michel Gaudron. Mais il pointe d’emblée "un problème de revenus et un problème de coûts". Pour ce qui est des revenus, le président de l’ABBL met le doigt sur "les taux d’intérêt très bas sur les marchés" et "une mutation de la clientèle". Quant aux problèmes de coûts, "leur première composante réside dans le volet salarial", explique Yves Maas en indiquant que "nous avons au Luxembourg les plus hauts salaires en Europe, derrière la Suisse". A ce sujet, qui est un cheval de bataille du patronat luxembourgeois dans les discussions qui ont lieu dans le cadre du semestre européen 2015, le président de l’ABBL ajoute un autre sujet d’inquiétude partagé avec l’UEL, à savoir "la question des indexations automatiques  qui n’aident évidemment pas à faire croître la profitabilité du secteur".

Parmi les "défis existants", Yves Maas évoque par exemple "les sanctions contre la Russie". S’il juge que "l’impact direct est limité ici", il ne perd pas de vue la complexité de la situation "pour les banques privées qui ont des clients russes" et qui sont "confrontées à un important risque ‘réputationnel’".

Sur le plan économique et financier, le président de l’ABBL voit aussi dans "la situation de très faible inflation et même de risque de déflation" une source d’incertitude pour les investisseurs. Il ne perd pas non plus de vue des dossiers européens plus politique, comme "la perspective du référendum en Grande-Bretagne et l’éventualité de quitter l’Union européenne", ou encore "tous les débats autour de la Grèce et, plus généralement, une certaine faiblesse de l’économie en Europe". Autant de sujets qui rendent "les marchés financiers assez nerveux".

Yves Maas remet aussi sur la table la question des coûts "énormes" qu’implique l’évolution de la réglementation, un sujet qui revient comme un leitmotiv dans les déclarations de l’ABBL ces derniers mois. Le problème, aux yeux du président de l’ABBL, "c’est que la majorité des investissements des banques, de nos jours, est affectée à des projets réglementaires et non pas à des projets servant directement nos clients", ce qui, résume-t-il n’est "pas bon pour notre industrie". "Cela devient de plus en plus difficile pour les petites et moyennes banques de soutenir ce niveau d’investissement", explique Yves Maas qui dit que cela lui "fait plus peur, ici au Luxembourg, que les discussions sur la transparence et sur ses effets". Le président de l’ABBL cite aussi "les coûts que génère l’Union bancaire, puisqu’il faut bien financer l’augmentation des effectifs de la Banque centrale européenne et de la CSSF". Il évoque encore "la mise en place du Fonds de résolution et du système de garantie, qui va aussi être coûteuse pour les banques".

Véronique Poujol et Jean-Michel Gaudron demandent au président de l’ABBL si la mise en œuvre de l’Union bancaire risque de "remettre en cause la très grande proximité des acteurs de la Place avec la CSSF, leur instance de régulation". Yves Maas reconnaît que "par le passé, cette proximité a toujours permis de trouver des solutions dans un esprit business friendly, sans pour autant mettre en danger la protection des investisseurs ni la probité du marché". Aussi, il estime que "l’introduction de l’Union bancaire va sans doute changer les choses", mais il précise que "comme elle n’a été implémentée qu’en novembre, il faut tout de même attendre un certain temps pour que la machinerie tourne de façon adéquate et efficace". "On imagine, en effet, que certaines décisions prendront sans doute plus de temps, puisqu’il y aura une instance de plus entrant dans le processus", poursuit-il en assurant que "pour l’instant nous n’avons pas de cas concret montrant que cela puisse être préjudiciable au business luxembourgeois". Yves Maas se veut rassurant puisqu’en tout état de cause, "l'Union bancaire ou pas, nous sommes, au Luxembourg, dans une situation où les autorités politiques font en sorte de supporter le secteur financier d’une manière très positive".

Interpellé sur l’affaire LuxLeaks et son éventuel impact à long terme, Yves Maas, qui se dit "gêné" par "l’impact de réputation que toute cette affaire risque d’avoir sur le secteur financier", souligne que "la question LuxLeaks se pose pour le pays et non pas uniquement pour le secteur financier", qui "n’est en rien à l’origine de tout cela", ainsi qu’il le souligne. A ses yeux, il est toutefois "clair que puisque nous n’avons pas fait quelque chose d’illégal, nous n’avons aucune raison de nous cacher". Quant à la façon de communiquer qu’il convient d’adopter, Yves Maas est conscient que tout est question d’équilibre puisqu’il y a "d’un côté, les opinions publiques et, de l’autre, les volets politiques".