Afin de mettre en œuvre, dans la législation de l’UE, la norme mondiale de l'OCDE sur l'échange automatique d'informations (EAI) relatives aux comptes financiers en vertu de la directive révisée sur la coopération administrative (dite DAC2), les Etats membres devraient avoir la possibilité d’adopter une approche par phase, a notamment estimé le groupe d'experts de la Commission dédié à ces questions dans un rapport publié le 16 mars 2015.
Pour mémoire, la Commission avait mis en place ce groupe en octobre 2014 dans le contexte de l’accord sur l’extension du champ d’application de l’EAI entre les administrations fiscales à d’autres revenus que ceux de l’épargne qui avait été marqué au Conseil européen de mars 2014, puis confirmé en décembre 2014 par l’adoption formelle au Conseil ECOFIN de la directive révisée sur la coopération administrative.
Composé de représentants d’institutions financières – dont l’Association luxembourgeoise de l’industrie des fonds, ou ALFI –, d’associations et d’ONG, ce groupe d’experts est chargé de conseiller la Commission afin qu'elle s'assure, avec le Conseil et les États membres, que la législation de l'UE sur l’EAI soit harmonisée et pleinement compatible avec la norme mondiale de l'OCDE. Il s’agit par ailleurs de veiller "à limiter la charge administrative pesant sur les entreprises du secteur financier tout en préservant les besoins spécifiques du marché intérieur de l'UE", lit-on sur la page du site de la Commission consacrée au groupe.
Dans son rapport, le groupe d’experts formule donc plusieurs recommandations par rapport à la mise en œuvre de la directive révisée, la première portant sur le calendrier prévu pour l’application de l’EAI renforcé. Les experts invitent ainsi le Conseil et les États membres "à fournir un calendrier de mise en œuvre réalisable", le groupe suggérant d’envisager "une approche progressive" dans ce contexte. Une telle approche pourrait notamment reposer sur le report d’une année du calendrier prévu pour le début des échanges (à savoir en 2018 au lieu de 2017). Actuellement, la directive révisée prévoit le début de la collecte des renseignements dès 2016 pour de premiers échanges en 2017.
Les experts appellent par ailleurs la Commission, le Conseil et les États membres à procéder à une analyse approfondie des implications juridiques, constitutionnelles et en matière de protection des données de la DAC2 et de s’assurer que toutes les mesures ont été prises pour se conformer aux règles de protection des données. Il s’agirait en outre pour les États membres d’adopter une approche commune pour élaborer des critères objectifs permettant d'évaluer si le cadre juridique d'un pays tiers offre une protection appropriée des données transférées en vertu de l’EAI.
Les experts soulignent également que des lignes directrices d'application cohérentes doivent être élaborées en vue de parvenir à des règles équivalentes ("level playing field") notamment pour ce qui est des définitions des revenus financiers. Le groupe souligne dans ce contexte que le commentaire accompagnant la norme mondiale de l’OCDE ("common reporting standard", ou CRS) est insuffisant en termes de guidance et que des lignes directrices plus détaillées sont nécessaires. C’est notamment le cas pour certains concepts clés comme les "entités d’investissement" ou les "comptes financiers" qui demandent à être précisés.
Le groupe invite également les États membres à mettre en place le cadre juridique nécessaire et les directives d’applications liées "bien avant la date limite du 1er janvier 2016" et ils insistent encore pour que les Etats membres assurent une certaine cohérence pour ce qui est des définitions des entités et des comptes exclus de l’EAI. Il recommande par ailleurs une "période d'atterrissage en douceur" de deux ans qui limiterait le "fardeau administratif" pour les institutions financières situées dans l'UE et permettrait aux administrations fiscales et aux institutions financières de dialoguer le temps de rendre le système totalement opérationnel.
Le groupe d'experts note en outre qu'il est "dans l'intérêt de tous" que l'ensemble des juridictions participent à l'EAI renforcé, et qu'il faudrait dès lors faire en sorte d'inclure les pays en développement dans le système car "de potentielle échappatoires" pourraient se révéler "dévastatrices". Si les pays en développement feront face à "des défis importants" dans ce contexte, créer un système dans lequel ils seraient exclus comporterait "le risque de voir éclore de nouveaux paradis fiscaux", mais également priver ces pays des informations nécessaires.
Dans leur rapport, les experts de la Commission formulent encore un certain nombre d’autres recommandations plus techniques concernant notamment le traitement des juridictions non participantes, les meilleures pratiques en termes d’auto-certifications ainsi que les défis en matière technologiques de la nouvelle norme.