Si l’Union européenne a été le premier grand bloc de pays à avoir présenté sa contribution à la Conférence sur le Climat (COP21) qui se tiendra à Paris en décembre, les ONG environnementalistes ont critiqué son manque de clarté, de transparence et d’ambition. Pour rappel, les ministres de l’Environnement de l’UE ont présenté le 6 mars 2015 la contribution de l’UE qui s’engage à un objectif contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici 2030 par rapport à 1990. L’objectif de la conférence de Paris est d’adopter un accord mondial ambitieux et juridiquement contraignant pour 2020, censé remplacer le Protocole de Kyoto.
L’ONG Friends of the Earth (FOE) se félicite du fait que l’UE soit la première économie majeure à avoir abattu ses cartes, mais déplore en revanche dans un communiqué que l'offre de l'UE soit bien en deçà de la "juste part" qui revient à l'UE dans l'action requise pour éviter un changement climatique dangereux. La réduction d'au moins 40 % des émissions équivaut à l’objectif annoncé lors du Conseil européen d’octobre 2014, fait observer l’ONG, et ne représente donc pour elle aucun accroissement des efforts avant les négociations de Paris (COP 21). De plus, l'offre ne contient aucun engagement de soutien financier ou technologique envers les pays en développement qui sont pourtant les plus vulnérables au changement climatique. "Ne nous voilons pas la face, il y a un fossé énorme entre ce que la science et l’équité climatique recommandent à l'Europe de faire et l'accord du Conseil Environnement. Il est frustrant d'entendre nos gouvernements qualifier leurs engagements d'ambitieux, alors qu'ils ne tournent pas suffisamment le dos aux combustibles fossiles", a déclaré Susann Shebarth de FOE. L’ONG salue la Finlande qui vient d’adopter "l’un des objectifs de plus ambitieux" en Europe, avec une réduction d’au moins 80 % d’ici 2050.
Le réseau Carbon Market Watch (CMW) reproche à l'offre de contribution formelle de l'UE de manquer de détails et de transparence. "L'UE a confirmé qu'elle réaliserait son objectif par les seules mesures nationales (à l'exclusion des crédits internationaux). C'est une bonne chose qui laisse entrevoir la possibilité de relier le marché européen du carbone avec celui de la Suisse, mais cela devra aller de pair avec une augmentation de l'objectif européen", a estimé Femke de Jong de CMW dans un communiqué. Mais elle reproche à l’UE d’avoir échoué d’éliminer "l’écran de fumée" de 4 milliards de tonnes d’air chaud, en référence aux quotas excédentaires dans le système européen d’échange de quotas de CO2 (ETS). L’ONG critique le fait que l’UE ne précise pas si elle fera usage des quotas excédentaires, alors que le surplus pourrait atteindre entre 4 et 6,5 milliards de quotas après 2020 et ramener l'objectif affiché de 40 % à des réductions effectives de 17 % à 26 %. La directrice de CMW, Eva Filzmoser, qui avait tenu une conférence à Luxembourg sur le sujet en février 2015, estime que l’UE a gâché son capital politique pour inciter d’autres pays à être transparent dans leurs objectifs de réduction et l’appelle à rapidement proposer une réforme du système ETS. Quant à l'utilisation des terres et autres changements d'affectation des sols et des forêts (Lulucf), l’ONG déplore que l’UE reste floue sur les modalités d'inclusion du Lulucf dans l'objectif qui pourrait se voir réduit de 5 % si cette inclusion était utilisée pour compenser la pollution du secteur du transport et d'autres secteurs.
Le réseau Climate Action Network Europe (CAN), composé de 120 membres, déplore une "occasion ratée" pour fixer un objectif élevé qui servirait de référence aux autres. Les ministres européens de l’Environnement ont échoué de présenter une contribution "claire et crédible", qui n’inclut pas d’information sur le "montant concret" de réduction des émissions après 2020 et qui ne précise pas le terme "au minimum" dans son objectif pour 2030, critique l’ONG dans un communiqué. "Il est très décevant de voir que la contribution de l’UE manque de clarté sur la manière dont elle entend profiter du progrès pour arriver à une phase sans combustibles fossiles et à 100 % d’énergies renouvelables", a déclaré Wendel Trio, le directeur de CAN Europe.
La section "climat et énergie" du Fonds mondial pour la nature (WWF) a dénoncé dans un communiqué un "compromis faible et minimaliste" qui laisse des "lacunes à combler". L’ONG appelle l’UE à résoudre ses conflits internes, en référence aux différentes positions des Etats membres, afin "d’assurer le leadership dont le monde a besoin".