Jean Feyder a appelé les dirigeants européens à ne pas négliger les "causes profondes" des arrivées en masse de migrants via la Méditerranée et de ne pas se consacrer uniquement aux symptômes du problème, au lendemain d’un Conseil européen extraordinaire consacré au sujet après des naufrages tragiques. Dans une tribune publiée dans le Wort du 25 avril 2015, l’ancien ambassadeur du Luxembourg auprès de l’ONU et auteur du livre "La faim tue" estime que la "politique néolibérale" de l’UE est la véritable cause. Celle-ci aurait eu "un impact désastreux sur le niveau de vie des populations africaines, sur les économies de ces pays et sur les ressources de leurs gouvernements". Les exportations de produits alimentaires à des prix dumping "détruisent sans cesse de nouveaux secteurs de leurs agricultures, des emplois, des sources de revenus" et aurait conduit à un "exode rural toujours plus massif", écrit Jean Feyder, en dénonçant le caractère "absurde et contraire à tout développement de telles politiques de libre-échange". Comme causes de départ des migrants, il nomme "la misère, la faim, la pauvreté et l'absence de perspectives dans leur pays".
L’auteur pointe du doigt les accords de partenariat économique (APE), notamment l’APE signé entre l’UE et la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao ou Ecowas) le 10 juillet 2014 et dont la ratification est prévue au cours de cette année. Jean Feyder évoque les campagnes de la société civile, tant européenne qu'africaine, contre cet APE, estimant que dire non à cet accord est "une des réponses les plus substantielles à donner à la tragédie humanitaire qui se déroule en Méditerranée".
Jean Feyder rappelle que Jean-Claude Juncker, en tant que Premier ministre luxembourgeois, avait déjà mis en garde "devant les conséquences d'une répartition aussi inéquitable des richesses entre Européens et Africains".
En conséquence, l’auteur juge qu’il "serait temps que la Commission de Jean-Claude Juncker tout comme nos ministres en charge du Commerce, de l'Agriculture et de la Coopération au développement, prennent au sérieux" ce que l’ancien Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker, aujourd’hui président de la Commission européenne, avait écrit dans un préface du livre "La faim tue" (2011) : "il est temps que nous arrivions à une politique cohérente vis-à-vis des pays en développement et que nous- sortions d'une logique perverse dans laquelle la coopération au développement ne fait que recoller les morceaux de notre propre politique économique et commerciale".
Dans sa tribune, Jean Feyder reprend d’autres propos de Jean-Claude Juncker, qui a notamment dit : "Tandis que d'un côté la politique de coopération s'efforce d'aider les plus pauvres des pauvres à trouver le chemin d'une vie meilleure, on pratique souvent, en fait régulièrement, dans une des salles de conférence d'à côté, une pure politique du pouvoir dont le souci est de défendre les intérêts économiques de grandes entreprises occidentales". Et d’ajouter : "Les conséquences d'une telle politique ont un impact infiniment plus grand pour les pays en développement. Nous devons constater toujours à nouveau que ce que nous donnons avec la main droite, nous le reprenons deux ou trois fois avec la main gauche."
Jean-Claude Juncker avait encore écrit : "Si par notre comportement nous privons ces populations de tout espoir à une vie digne et meilleure, nous ne pouvons pas nous attendre que leur désespoir reste sans conséquences pour notre vie. Même si seulement 10 % des 1,5 milliard de personnes qui habiteront en 2020 le continent africain se mettent en mouvement, l'Europe se trouve devant d'énormes défis".