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Migration et asile - Justice, liberté, sécurité et immigration
Dans la foulée des discussions européennes qui ont suivi le naufrage du bateau de migrants, le gouvernement et la société civile du Luxembourg s’interrogent sur l’accueil des réfugiés
21-04-2015


Briefing du Premier ministre Xavier Bettel suite aux travaux du Conseil de gouvernement du 21 avril 2015Dans la foulée du naufrage du bateau de migrants au large des côtes libyennes et des discussions qui ont suivi au niveau de l’UE, le gouvernement et la société civile luxembourgeois se posent la question de savoir de quelle manière les réfugiés pourraient être accueillis au Luxembourg une fois que les mesures de l’UE seront mises en place.

Pour rappel : Le 21 avril 2015, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a confirmé que le naufrage du bateau de migrants au large des côtes libyennes survenu le 19 avril 2015 avait fait 800 morts. Par ailleurs, les ministres des Affaires étrangères et les ministres de l'Intérieur de l'UE ont établi, à l’occasion d’une réunion conjointe du 20 avril, un plan d’action en 10 points pour lutter contre le trafic de migrants, tout en soulignant que le problème "ne concerne pas un seul Etat membre", mais que la réponse au phénomène migratoire devait être "une réponse de tous", selon les propos de Federica Mogherini, la Haute Représentante de l’UE pour les Affaires étrangères. Un Conseil européen extraordinaire a par ailleurs été convoqué pour le 24 avril 2015, pour que soient abordées au plus haut niveau les mesures immédiates que l’UE devra prendre pour affronter la situation en Méditerranée.

Le Luxembourg est "conscient" du fait qu’il doit "prendre ses responsabilités" en matière de réfugiés, indique le Premier ministre Xavier Bettel

Le Premier ministre Xavier Bettel a ainsi souligné, dans son briefing suite aux travaux du Conseil de gouvernement du 21 avril 2015, que le Luxembourg est "conscient" du fait qu’il doit "prendre ses responsabilités" en matière de réfugiés. "Je ne veux pas être le Premier ministre d’un pays qui ne sera pas prêt à prendre ses responsabilités", a-t-il signalé. Les autorités dont en train de vérifier de quelle manière il pourrait contribuer aux mesures que l’UE est sur le point d’adopter. Pour le Premier ministre, le Luxembourg doit être prêt à accueillir "une vague de demandeurs d’asile" en cours de procédure, si "la situation ne s’améliore pas". "C’est pourquoi nous avons décidé ce matin de mettre en place un groupe de travail qui réunira les ministres en charge de l’Immigration, de la Famille, de l’Intérieur et de l’Education nationale", a-t-il annoncé. Pour Xavier Bettel il est important d’ "être préparé, de planifier", afin de "savoir comment gérer une telle situation, si elle se présente".

"Si nous accueillions des personnes, il faut aussi faire en sorte qu’elles puissent vivre ici d’une manière décente", a encore souligné le Premier ministre. Selon lui, il ne s’agit pas de les accueillir en désignant des halls sportifs dans lesquels 500 réfugiés seraient installés. Il ne s’agit en outre pas d’avancer un chiffre quant au nombre de réfugiés que le pays compte accueillir "sans savoir comment les accueillir et comment les héberger et leur permettre de vivre dignement dans notre pays". "Il faut donc vérifier quelles sont les possibilités qui existent, quel est le potentiel que l’on a, et c’est pourquoi nous avons mis en place ce groupe, afin de nous y préparer", a souligné le Premier ministre.

Xavier Bettel compte sur la collaboration des communes luxembourgeoises

"Je compte aussi sur la collaboration des communes", a encore souligné le Premier ministre, avant d’appeler à ce que celles-ci fassent preuve de solidarité "vis-à-vis des obligations internationales". Ceci explique selon lui pourquoi le ministre de l’Intérieur fait partie du groupe de travail mis en place par le gouvernement, en vue de "servir en tant qu’interlocuteur des communes".

Le Premier ministre ne veut néanmoins pas contraindre les communes à accueillir des réfugiés à travers un système de quotas, car une tel système mis en place "du haut vers le bas" impliquerait qu’ "aucune commune nous offre sa collaboration volontaire en vue de trouver des solutions".

Xavier Bettel souligne l’importance du travail de prévention dans les pays d’origine et de départ vers l’Europe

Xavier Bettel a précisé que "le problème avec la Lybie consiste dans le fait que nous n’avons pas d’interlocuteur avec qui élaborer un projet et avec qui négocier". "C’est une priorité d’aider le pays à se reconstruire, mais pour ce faire, il faut un pouvoir politique stable, chose qui fait actuellement défaut en Lybie", a-t-il souligné.

Pour Xavier Bettel, fermer les frontières européennes n’est cependant pas une option. Ceux qui veulent partir réussiront selon lui toujours à se frayer un chemin. "Et s’ils risquent leur vie, nous avons une part de responsabilité si nous disons que nous sommes indifférents à la manière dont ils viennent", a souligné le Premier ministre. "C’est pourquoi les contrôles en mer sont importants en vue d’effectuer du travail de prévention" et de "voir ce qui s’y passe". "Il est important de faire du travail de prévention, et de réagir si celui-ci n’a pas d’effet", a conclu Xavier Bettel

"Il faut offrir la possibilité aux personnes concernées de pouvoir s’installer temporairement en Europe", estime la présidente de l’ASTI, Laura Zuccoli

 "Comme l’Europe ne réussit pas, dans les zones de conflit, à garantir le calme au niveau de ses frontières avec les pays concernés, il faut offrir la possibilité aux personnes concernées de pouvoir s’installer temporairement en Europe", a déclaré Laura Zuccoli, présidente de l‘Association de Soutien aux Travailleurs Immigrés (ASTI), sur les ondes de RTL. A ses yeux, ces gens devraient pouvoir recourir au statut de "réfugié politique".

Laura Zuccoli indique par ailleurs que la plupart des réfugiés ne se déplacent pas vers l’UE, mais vers les pays pauvres. Par exemple, la plupart des deux millions de réfugiés syriens se seraient déplacés vers la Turquie, la Jordanie et le Liban. "Ces pays doivent faire beaucoup plus d’efforts avec beaucoup moins de moyens que ceux dont dispose l’Europe avec ses 28 Etats membres qui se trouvent certainement dans une situation économique meilleure", a souligné la présidente de l’ASTI.

Dans un communiqué de presse diffusé  le 21 avril, l’ASTI émet les revendications qui suivent à l’égard de l’UE : "exiger de l’UNION une politique d’immigration cohérente et concertée ; partager les responsabilités dans l’accueil des réfugiés entre tous les Etats membres de l’UNION selon des critères clairs et équitables bien définis ; affirmer des valeurs humanistes de l’UNION face à la montée des partis et des groupes extrémistes ; mener une politique de développement plus généreuse dans les pays d’origine des migrants".

Selon l’association, "tant que les pays européens ne répondront pas d’une même voix à ces problématiques, ceux du Nord continueront d’accuser les pays du Sud de leur mauvaise gestion frontalière", tandis que "ces derniers diront que le manque d’argent les empêche de mener à bien une restriction effective des flux migratoires à destination des pays du Nord".

L’ASTI estime par ailleurs qu’une réponse sécuritaire aux questions migratoires "n’est pas la bonne solution".

"Sans voies légales d’immigration, l’UE ne réussira pas à freiner la traite des êtres humains", indique Marie-Christine Wirion du Conseil luxembourgeois des réfugiés

Pour Marie-Christine Wirion du Conseil luxembourgeois des réfugiés, il est important de renforcer les voies légales d’immigration, par exemple à travers des mesures de réinstallation, ou en élargissant les possibilités offertes par le regroupement familial. "Sans voies légales d’immigration, l’UE ne réussira pas à freiner la traite des êtres humains", a-t-elle souligné le 21 avril au micro de RTL. L’ouverture des voies légales d’immigration permettrait également de contourner les passeurs et de diminuer ainsi leurs activités.

Marie-Christine Wirion regrette en outre le fait que la volonté d’accueillir des réfugiés est limitée parmi les Etats et la population européenne. "Les hommes politiques devraient néanmoins saisir  leur courage", a-t-elle appelé, en rappelant que "l’UE a mis l’accent, dans ses valeurs fondamentales, sur les droits de l’Homme, la solidarité et la dignité humaine". "L’UE a en tant qu’acteur économique et politique un grand rôle à jouer" et "doit mener une politique plus généreuse que celle qu’elle a menée jusqu’à présent", a-t-elle souligné.