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Agriculture, Viticulture et Développement rural - Environnement
Natur & Emwelt et le Mouvement écologique appellent la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE à veiller à ce que les directives "Habitats" et "Oiseaux sauvages" ne soient pas affaiblies sous l’effet du "bilan de qualité" de la Commission
22-05-2015


Au micro: le Président de Natur & Emwelt, Roby Biwer, à l'occasion d'une conférence de presse du 22 mai 2015Le 22 mai 2015, date de la journée Mondiale de la biodiversité, les a.s.b.l. luxembourgeoises Natur & Emwelt et Mouvement écologique (Mouveco) ont convoqué la presse afin de discuter des conséquences négatives d’un éventuel affaiblissement des directives "Habitats" et "Oiseaux sauvages" – deux législations clés de l’UE pour la protection de la nature – sous l’effet du "bilan de qualité" effectué par la Commission au titre du "programme pour une réglementation affûtée et performante" (REFIT).

Pour mémoire, le 5 mai 2015, la Commission européenne a lancé une consultation publique sur l'efficacité des directives "Habitats" et "Oiseaux sauvages", deux législations clés de l’UE pour la protection de la nature. La directive "Oiseaux sauvages" a été adoptée en 1979 et vise à protéger tous les oiseaux sauvages ainsi que leurs habitats les plus importants dans l’ensemble de l’UE. La directive "Habitats", adoptée en 1992, introduit quant à elle des mesures similaires pour environ 230 types d’habitats et 1000 espèces d’animaux et de plantes sauvages, désignées collectivement en tant qu'"espèces d’intérêt communautaire". Pour mettre en œuvre ces directives, les pays membres ont mis en place un réseau de zones de protection de la nature, le réseau européen Natura 2000 qui couvre environ 18 % du territoire et plus de 4 % des mers et des océans de l'UE, selon la Commission, et comprend environ 27 000 zones protégées, dont une cinquantaine au Luxembourg.

La consultation, disponible dans toutes les langues de l’UE et en ligne pendant douze semaines, a pour objectif de recueillir des avis sur l'actuelle législation ainsi que sur sa mise en œuvre, dans le cadre du "bilan de qualité" effectué par la Commission au titre du "programme pour une réglementation affûtée et performante" (REFIT), un programme en vigueur depuis décembre 2012 visant à rendre la législation de l'UE plus simple et à réduire les coûts induits par la réglementation.

"Si on y touche, il y a un risque que certains lobbies veuillent affaiblir ces directives", a signalé Roby Biwer

 "Nous aimerions exprimer notre vive préoccupation quant à la protection de la nature", a déclaré le président de Natur & Emwelt, Roby Biwer, en guise d’introduction. "Il y a 30 ans, l’Europe constatait que la perte de la diversité des espèces était dramatique", a-t-il ajouté. "C’est pourquoi les directives ‘oiseaux sauvages’ et ‘Habitats’ ont vu le jour", a-t-il expliqué.

Selon Roby Biwer, un des bémols de ces directives est lié à leur législation complexe "qui a eu pour conséquence que les Etats ont eu besoin d’un certain délai de démarrage pour les mettre en œuvre". "Mais désormais, la mise en œuvre de celles-ci a trouvé un rythme de croisière optimal, si bien que nous avons développé le plus grand réseau mondial de protection de la nature", souligne le président de Natur & Emwelt. "Ces deux directives permettent une sécurité de planification pour les acteurs impliqués, et constituent ainsi un instrument efficace qui a des effets positifs sur la nature", a-t-il ajouté. Le bilan de ces directives est selon lui positif, notamment en ce qui concerne la réduction des émissions de CO2, la protection de l’eau potable, la promotion du tourisme et de la qualité de vie, mais aussi en ce qui concerne leur impact économique. "Sans ces directives, l’UE connaîtrait des pertes pour un montant de 450 milliards d’euros liées à la perte de biodiversité et la baisse de la qualité de vie", a signalé Roby Biwer. Quant aux bénéfices qui découlent de ces directives, ceux-ci s’élèvent selon lui à 300 milliards d’euros.

Dans ce contexte, le président de Natur & Emwelt se dit "préoccupé" quant à la volonté de la Commission de revoir les deux directives pour la protection de la nature dans le cadre du programme REFIT. A ses yeux, cette révision pourrait certes "ouvrir de nouvelles portes", mais elle pourrait tout aussi bien apporter des détériorations en matière de protection de la nature. "L’idée qui a circulé au début selon laquelle ces deux directives devraient être fusionnées nous cause beaucoup de soucis", a-t-il encore relevé. "Si on y touche, il y a un risque que certains lobbies veuillent affaiblir ces directives", a signalé Roby Biwer, avant d’ajouter que la mise en place de nouvelles directives pourrait durer jusqu’à 10 ans, brisant ainsi le rythme de croisière actuel en matière de protection de l’environnement.

Pour mémoire, la veille, plusieurs ONG européennes avaient déjà fait part d’inquiétudes similaires à l’occasion de la publication par la Commission d’un rapport sur l’état de conservation de la nature dans l’UE.

Le Mouvement écologique et Natur & Emwelt formulent des attentes à l’égard de la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE

Au micro: la Présidente du Mouvement écologique, Blanche Weber, à l'occasion d'une conférence de presse du 22 mai 2015"C’est pourquoi nous appelons les instances européennes, et surtout la Présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE, pour que ces directives soient préservées, maintenant ainsi une forte protection européenne de la nature", a déclaré Roby Biwer. "Nous espérons que le Luxembourg se chargera du dossier pendant sa Présidence du Conseil et qu’il ne le délèguera pas à la Présidence suivante", a-t-il ajouté.

"Nous espérons que la Présidence luxembourgeoise s’engagera pour une protection forte de la nature, et qu’elle clôturera ce dossier", a ajouté la Présidente du Mouveco, Blanche Weber. "Nous supporterions mal que le Luxembourg soit à l’origine d’un cimetière pour la protection de la nature", a-t-elle poursuivi, indiquant que sans ces directives, la protection de la nature serait "morte". "Un échec en la matière contribuerait à alimenter l’image d’une Europe dominée par les lobbies, et la perte de confiance dans l’UE augmenterait", a-t-elle signalé. Vu l’enjeu, "nous nous attendons aussi à ce que le président de la Commission européenne lui-même, Jean-Claude Juncker, s’engage à protéger la nature", a encore ajouté Blanche Weber.

Dans ce contexte, la présidente du Mouveco lance un appel afin que les citoyens plaident pour une protection forte de la nature dans la consultation publique réalisée dans le cadre du "bilan de qualité" de la Commission.

Selon le Mouvement écologique et Natur & Emwelt, le Luxembourg a tout intérêt à s’engager pour une protection forte de la nature

Pour ce qui du Luxembourg, Roger Schauls, vice-président du Mouveco, indique que selon les chiffres officiels, le déclin des espèces au cours les dernières années "continue d'être dramatique". Néanmoins, ce déclin aurait selon lui été pire sans les programmes qui ont pu être mis en œuvre au Luxembourg, notamment via la directive "Habitats". C’est pourquoi à ses yeux, le Luxembourg a tout intérêt à s’engager pour "une protection forte de la nature".

Pour mémoire, le 21 mai 2015, la Commission avait présenté un rapport sur l’état de la nature dans l’UE qui brossait "un tableau d'ensemble mitigé". Un rapport technique plus détaillé, élaboré par l'Agence européenne pour l'environnement (AEE), qui comprend également des données par pays, avait émis un bilan similaire en ce qui concerne la biodiversité au Luxembourg, même si sa régression est ralentie au Grand-Duché.

Patrick Lorgé, ornithologue auprès de Natur & Emwelt, est du même avis que Roger Schauls, soulignant la nécessité de maintenir des directives fortes en matière de protection de la nature. Il évoque les succès obtenus au Luxembourg grâce aux directives européennes : le retour de la cigogne noire et de la cigogne blanche, la protection du hibou grand-duc, la protection des habitats et des corridors du chat sauvage, etc. Certains programmes européens dérivés de ces directives, par exemple le programme LIFE-Nature, ont en outre permis "d’obtenir des fonds pour mener des actions concrètes sur le terrain", a-t-il ajouté. "Le Luxembourg peut se baser sur ses succès sur le terrain pour émettre des revendications concrètes à l’égard de l’UE", a conclu Patrick Lorgé.