Les commissions AGRI et ENVI ont adopté le 17 juin 2015 à une large majorité une proposition de directive sur l’interdiction du clonage des animaux de ferme, de leurs descendants ainsi que de produits dérivés du clonage, en renforçant les propositions de la Commission européenne. Celle-ci avait proposé en décembre 2013 deux projets de directive – une prévoyant un moratoire temporaire sur le clonage des animaux d’élevage ainsi que de la mise sur le marché d’embryons clonés et d’animaux clonés vivants et une directive prévoyant l’interdiction d’embryons clonés et d’animaux clonés vivants. Mais ces propositions ne mentionnaient pas la question de la mise sur le marché de produits issus de la progéniture d’animaux clonés ni de l’étiquetage de ces produits. En février 2014, la commission ENVI avait déjà adopté une résolution allant dans le même sens que le texte adopté le 17 juin.
Le texte des commissions de l’agriculture et du développement rural (AGRI) et de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI), a été approuvé par 82 voix avec 8 abstentions et 8 voix contre, indique un communiqué du Parlement européen. Les députés y ont étendu la portée de l'interdiction pour couvrir toutes les espèces d'animaux gardés et reproduits à des fins agricoles (au lieu des seules espèces bovine, ovine, caprine et équine, comme proposé par la Commission).
"L'interdiction de placer des animaux clonés ou leur progéniture sur le marché de l'UE est une ligne rouge pour nous", a déclaré le co-rapporteur Giulia Moi (EFDD) pour la commission AGRI, qui est la commission "sur le fond", lors d’une conférence de presse. "Nous sommes bien conscients que le clonage est autorisé dans certains pays tiers avec lesquels l'UE commerce, mais nous ne pouvons pas permettre la mise sur le marché de l'UE de ces produits. Nous voulons aussi nous assurer que le clonage des animaux ne deviendra pas une pratique courante au sein de l'UE", a-t-elle ajouté.
"Je suis très heureuse que nos propositions aient été suivies à 100 % pour établir des règles très strictes dans l'UE afin d'interdire le clonage et tous les produits dérivés, y compris ceux des descendants d'animaux clonés. Cette technique est cause d'une grande souffrance animale", a affirmé le co-rapporteur de la commission ENVI Renate Sommer (PPE). Sur sa page internet, elle qualifie le clonage de "cruauté envers les animaux", et indique que la majorité des animaux clonés souffrent de malformations et de dysfonctionnements organiques ainsi que d’un taux de mortalité extrêmement élevé, en insistant sur le fait que le clonage "ne se développe pas" et que le clonage à des fins agricoles est "rejeté par une grande majorité des consommateurs". Par conséquent, "l'interdiction ne devrait pas se limiter aux clones eux-mêmes mais aussi à leur matériel de reproduction (semence et embryons), leurs descendants et les produits dérivés, y compris les importations. C'est nécessaire si nous ne voulons pas faire la promotion du clonage dans les pays tiers", ajoute-t-elle. "Nous n'avons pas besoin du clonage pour assurer l'approvisionnement en viande de l'UE. Interdire le clonage est donc une question de valeurs et de principes européens", a-t-elle conclu.
Les députés constatent que, bien que les préoccupations en matière de bien-être animal pourraient ne pas être évidentes dans le cas de descendants d'animaux clonés, puisqu'ils sont nés par des moyens de reproduction sexuelle classiques, pour qu'il y ait un descendant, un géniteur animal cloné est cependant nécessaire, ce qui implique des préoccupations significatives en matière d'éthique et de bien-être animal. Les députés ont donc étendu l'interdiction afin d'englober les produits germinaux et les descendants de clones d'animaux ainsi que leurs produits dérivés.
Étant donné que les animaux sont déjà clonés à des fins agricoles dans certains pays tiers comme les Etats-Unis, le Canada, l’Argentine le Brésil ou la Chine, la loi rendrait illégale l'importation d'animaux en provenance de pays tiers à moins que le certificat d'importation prouve qu'ils ne sont pas des clones animaux ou un de leurs descendants. Les importations de produits germinaux d'origine animale, la nourriture et les aliments d'origine animale devraient également être certifiés comme ne provenant pas d'animaux clonés ou de leurs descendants.
L'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a déclaré dans un avis en 2008 que la santé et le bien-être d'une forte proportion de clones s'étaient trouvés affectés, souvent gravement et avec une issue fatale. Ces effets contribuent au faible taux de réussite du clonage, de 6 à 15 % pour les bovins et 6 % pour les porcins, et rendent nécessaire l'implant de clones d'embryon dans plusieurs porteurs afin d'obtenir un animal cloné. En outre, les anomalies de clones et une progéniture exceptionnellement grande aboutissent à des naissances difficiles et des décès néonataux.
Les députés citent des résultats d'enquêtes Eurobaromètre selon lesquels les citoyens de l'UE s'opposent fermement à la consommation de denrées alimentaires provenant d'animaux clonés ou de leurs descendants, et la majorité désapprouve également l'utilisation du clonage à des fins agricoles, pour des raisons éthiques ou concernant le bien-être animal.
Déjà en 2008, la Commission avait présenté une proposition visant à simplifier la procédure d’autorisation prévue dans le règlement relatif aux nouveaux aliments. Mais après trois ans de négociation, la Commission, le Conseil et le Parlement européen avaient constaté l’échec à trouver un accord. C’est notamment sur la question de l’information aux consommateurs qu’ont achoppé les pourparlers, le Parlement européen s’étant montré prêt à faire une concession majeure en proposant d’abandonner l'interdiction de mise sur le marché contre un étiquetage des produits dérivés d'animaux clonés.
La Commission a dès lors été invitée à élaborer une proposition législative relative au clonage dans la production de denrées alimentaires qui soit indépendante du règlement relatif aux nouveaux aliments.