Les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne (UE) se sont retrouvés le 15 février 2016 à Bruxelles pour un Conseil des Affaires étrangères où la situation politique, sécuritaire et humanitaire en Syrie a été le principal point à l’ordre du jour. Dans ce contexte, les ministres ont insisté sur la nécessité de respecter le cessez-le-feu décidé à la Conférence pour la sécurité à Munich quelques jours plus tôt et ont réaffirmé le soutien humanitaire de l’UE. Le Conseil a adopté des conclusions sur le futur des sanctions à l’encontre de la Biélorussie et sur la Moldavie. Les ministres ont également discuté de la diplomatie climatique, à la suite de l'accord sur le changement climatique intervenu à Paris en 2015 et ont décidé d’un plan d’action à mettre en œuvre en 2016. Le ministre des Affaires étrangères et européennes, Jean Asselborn, y représentait le Luxembourg.
La situation politique, sécuritaire et humanitaire en Syrie a été le principal point à l’ordre du jour des ministres qui ont condamné les attaques contre les civils syriens et souligné l’importance de mesures sous l’égide de l’ONU, d’un accès humanitaire et du respect du cessez-le-feu.
Lors de la conférence de presse qui a suivi le Conseil, la Haute Représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, a rappelé la nécessité de respecter les engagements pris à la Conférence pour la sécurité qui s’est tenue à Munich du 11 au 13 février 2016 et où le Groupe international de soutien à la Syrie (ISSG) est parvenu à conclure un accord international en vue d'une "cessation des hostilités" en Syrie d'ici une semaine afin de relancer le processus de paix et de stopper l'exode de civils.
"Il n'y a pas de raison de changer de politique. Nous attendons de toutes les parties qu'elles respectent ces engagements et rendent possible, sur le terrain, la cessation des hostilités, à commencer par Alep, l'accès humanitaire et le début d'un processus politique», a-t-elle déclaré, en jugeant "inacceptable ce qui s'est produit à l'hôpital de Médecins sans frontières [bombardé dans le nord de la Syrie le 15 février 2016, ndrl]".
L'Union européenne continuera à faire pression pour le respect du droit humanitaire international et à travailler au sein de la task force de Genève, a assuré la Haute Représentante. Cette task force a été mise sur pied suite à l’accord conclu par l’ISSG et sa première réunion s’est tenue le 12 février à Genève en présence de représentants des 17 pays membres de l'ISSG. Federica Mogherini a encore indiqué qu’un bureau d'ECHO (le service d'aide humanitaire et de protection civile de la Commission) sera prochainement ouvert à Damas.
Au cours de la conférence de presse, la Haute-Représentante a encore évoqué "l’unité entre tous les Etats membres sur le fait qu’il n’y a pas de réponse militaire à la crise" mais qu’au contraire, cela doit passer par un processus politique dont les modalités sont actuellement en cours de discussion.
Les ministres ont dans ce contexte réitéré leur soutien à la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations Unies, appelant à ce qu’elle soit mise en œuvre par toutes les parties. La résolution 2254, adopté le 18 décembre 2015, plaide pour des négociations officielles sur un processus de transition politique dans ce pays. Elle vise à mettre en place, "dans les six mois", "une gouvernance crédible, inclusive et non sectaire", et arrêter un calendrier et les modalités d’une nouvelle constitution, en parallèle d’un cessez-le-feu.
A son arrivée au Conseil, le ministre Asselborn a mis la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie en garde contre le fait qu’elles ne deviennent un "groupe des dissidents" dans le contexte de la crise migratoire. En amont du Conseil le 15 février, les dirigeants du groupe de Visegrad s’étaient en effet réunis à Prague et avaient mis sur la table la nécessité d'un "plan B" pour pallier les insuffisances imputées à la Grèce dans la gestion de sa frontière et prôné une fermeture des frontières le long de la route des Balkans empruntée par ces candidats à l'asile, avec le soutien de la Macédoine et de la Bulgarie, voisins de la Grèce dont les dirigeants avaient été conviés à Prague.
Jean Asselborn a indiqué qu’il serait fatal pour l’UE d’arriver à un débat sur la solidarité avec les pays de Visegrad, les appelant à rendre la solidarité dont ils avaient eux-mêmes bénéficié par le passé. Le ministre a appelé à "faire attention" et à ne pas "jouer" avec ce qui maintient l’Union européenne.
Un échange de vues avec le ministre des Affaires étrangères du Liban, Gebran Bassil, a également eu lieu au cours d’un déjeuner de travail. Se disant pleinement conscient des immenses défis que la présence massive de réfugiés pose pour la stabilité du Liban, les ministres ont salué les efforts consentis par les autorités et la population libanaises pour accueillir, aider et protéger les réfugiés qui fuient le conflit syrien, avant de réaffirmer le soutien de l’UE, qui est le principal donateur au Liban, pour répondre aux besoins croissants de l'ensemble des communautés et des réfugiés vulnérables, indique un communiqué de presse du gouvernement luxembourgeois.
Les ministres ont adopté des conclusions sur la Biélorussie, visant à ne pas prolonger les mesures restrictives pour 170 individus, dont le président biélorusse, Alexander Loukachenko, et trois entités. La levée de ces sanctions - interdiction de visas et gel des avoirs- sera effective au 1er mars 2016.
Ces mesures avaient été suspendues le 29 octobre 2015 en raison de la libération des derniers prisonniers politiques en août 2015, d'une élection présidentielle d'octobre exempte de violence et en raison de l'état général des relations UE-Biélorussie. Les sanctions à l'encontre de quatre personnes liées à des disparitions de deux hommes politiques, d'un homme d'affaires et d'un journaliste, vont, en revanche, être prolongées pour douze mois à partir du 1er mars, tout comme l'embargo sur les armes.
Soulignant les mesures prises par Minsk au cours des deux dernières années, le Conseil reconnaît, dans ses conclusions, qu'il y a une "opportunité pour que les relations UE-Biélorussie se développent sur un ordre du jour plus positif et que des progrès dans une série de domaines puissent être mieux réalisés à travers des canaux de communication renforcés".
Mais les ministres préviennent que "des mesures concrètes prises par Minsk pour respecter les libertés fondamentales, les droits de l'homme et l'État de droit seront essentielles pour la mise en forme de la future politique de l'UE envers la Biélorussie".
Lors de la conférence de presse, Federica Mogherini a parlé d’une "tendance positive" dans le pays qu’il "convient d’encourager".
Le Conseil a adopté des conclusions sur la Moldavie, en particulier sur les réformes à mettre en œuvre dans le cadre de l’accord d’association et en vue de respecter les attentes des citoyens. Les ministres ont également appelé à mettre en place un dialogue constructif.
Dans ses conclusions, le Conseil appelle à "une mise en œuvre accélérée du programme d'association". Le nouveau gouvernement devrait, entre autres, donner la priorité aux réformes visant à remédier à la politisation des institutions de l'État et à la corruption systémique, à réformer l'administration publique et à améliorer la transparence et la responsabilité dans la gestion des finances publiques, expliquent les ministres.
Le Conseil souligne l'importance de la mise en œuvre des réformes qui garantissent l'indépendance, l'efficacité, la transparence et la responsabilisation du système judiciaire et des institutions anti-corruption. De même, le pays doit progresser dans la réforme du secteur financier.
Longtemps considéré comme un pays exemplaire du partenariat oriental, la Moldavie, qui bénéficie d'un régime sans visa et d'un accord d'association avec l'UE, est actuellement caractérisée par un environnement politique instable. Le nouveau Premier ministre Pavel Filip, le cinquième depuis début 2015, doit faire face à des manifestations de l'opposition.
Le Conseil a souligné le rôle de la diplomatie climatique européenne en encourageant à mettre en œuvre l’accord mondial sur le changement climatique intervenu à Paris en décembre 2015. Les ministres ont adopté un plan d’action pour 2016 en matière de diplomatie climatique, qui s’articule autour de trois axes :