A leur arrivée à Bruxelles le 25 février 2016 pour un Conseil Justice et Affaires intérieures (JAI) consacré à la crise migratoire, plusieurs ministres européens ont exprimé leur point de vue sur la situation.
Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères et européennes, ministre de l’Immigration, Jean Asselborn, a mis en garde contre une "anarchie" dans l’UE et contre une "multiplication et une banalisation des Conseils européens sans aucun effet". Il a déploré que l’Union n’ait "plus de ligne commune" en matière de migration et avoué que "cela m’horrifie". Au sujet de la Grèce, Jean Asselborn a dit espérer qu’on ne considère pas le pays comme un "appendice" de l’Europe et qu’on ne "concentre pas toute notre énergie sur la frontière gréco-macédonienne". Ce serait un "malheur", a dit le ministre, alors que la Macédoine a fermé quelques jours auparavant sa frontière avec la Grèce, bloquant de facto des milliers de réfugiés sur la route des Balkans. Il a appelé à "agir avant qu’il ne soit trop tard", regrettant que les 500 millions de citoyens européens remettent déjà en question la crédibilité de l’approche de l’UE en matière de migration et de Schengen. Pour lui, seule une "solution européenne" vaudra, toute approche nationale ou régionale ne faisant que compliquer les choses.
Le ministre grec de la Politique migratoire, Yannis Mouzalas, a déclaré que la Grèce n'acceptera pas de "devenir le Liban de l'Europe, un entrepôt d'âmes, même si cela devait se faire avec d'importants fonds" européens. Pour lui, les dirigeants européens sont eux-mêmes responsables de la situation actuelle. "Un grand nombre (de participants, ndlr) ici vont tenter de discuter de la façon de faire face à une crise humanitaire en Grèce qu'ils ont eux-mêmes l'intention de créer", a-t-il dit. Enfin, le ministre grec a redit que son pays "n'acceptera pas d'actions unilatérales". "La Grèce peut aussi prendre des actions unilatérales", a-t-il menacé.
De son côté, la ministre autrichienne de l’Intérieur, Johanna Mikl-Leitner, a appelé à "mettre fin le plus vite possible à la politique du laisser-passer" pour réduire à terme les flux de migrants. Elle a dit que ce sujet avait été l’objet de la réunion qu’elle avait convoquée la veille à Vienne avec les ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères des Balkans (Albanie, Bosnie, Bulgarie, Croatie, Macédoine, Monténégro, Serbie, Slovénie et Kosovo). Selon la ministre, le laisser-passer commence en Grèce et "si la Grèce n’est pas en mesure ou pas prête à protéger ses frontières extérieures, alors d’autres pays doivent s’en occuper". "C’est ce que nous avons décidé hier", a-t-elle dit, les ministres s’étant mis d’accord pour contrôler la frontière avec la gréco-macédonienne. Enfin, elle s’est demandé si la Grèce avait encore sa place dans l’espace Schengen, étant donné qu’elle n’est pas en mesure de protéger ses frontières extérieures.
Pour le commissaire européen à la Migration, aux Affaires intérieures et à la Citoyenneté, Dimitris Avramopoulos, c’est l’Union européenne et des vies humaines sont en jeu. Il a parlé d’un "moment critique" et d’une "réunion critique", insistant sur le fait qu’il fallait mettre en œuvre les décisions prises au cours des mois précédents. "Les initiatives isolées ne mènent nulle part", a –t-il dit. "C’est un moment de grande responsabilité", a-t-il conclu, soulignant qu’il ne restait plus que dix jours jusqu’à la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement avec la Turquie prévue pour le 7 mars.