Les ministres de l’Environnement de l’UE se sont réunis le 4 mars 2016 pour un Conseil Environnement qui a notamment été l’occasion de discuter du suivi de la conférence des Nations unies sur le changement climatique qui a eu lieu l'année dernière (COP 21), et en particulier de l'accord trouvé à Paris le 12 décembre 2015.
Les discussions s’appuyaient à la fois sur la communication rédigée par la Commission et sur un document élaboré par la présidence néerlandaise.
Au cours du débat, résument les services de presse du Conseil, les ministres ont souligné la nécessité de "soutenir l’élan de Paris" et de se concentrer sur la mise en œuvre des engagements pris, et ce notamment dans le cadre des contributions nationales. Il est aussi ressorti du débat que la mise en œuvre dans les délais du cadre européen pour le climat et l’énergie à l’horizon 2030 serait un signe important de l’engagement de l’UE au regard des objectifs de l’Accord de Paris.
Au cours du déjeuner, les ministres ont aussi discuté de la signature et de la ratification de l’accord de Paris, tous s’accordant sur l’importance d’une ratification rapide de l’accord pour lequel une cérémonie officielle de signature est prévue le 22 avril 2016 à New York.
Jugeant le débat "très fructueux", la ministre de l'Environnement des Pays-Bas, Sharon Dijksma, qui présidait le Conseil, a prévu de résumer les grandes orientations du débat dans une lettre qui sera adressée au président du Conseil européen, Donald Tusk.
Lors de son intervention, la ministre luxembourgeoise Carole Dieschbourg s’est montrée critique au sujet de la communication présentée par la Commission. "Je regrette que la communication ne reflète pas le l’élan et l’esprit de Paris", a lancé celle qui a négocié aux côtés du commissaire Miguel Arias Canete tout au long de la présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE. De son point de vue, il importe en effet de "ne pas perdre de temps et de réviser à la hausse les ambitions de l’Union européenne" en vue du premier cycle quinquennal qui va commencer en 2018. Il s’agit selon elle de "rester crédible" alors que "nous savons tous que les 189 contributions désormais connues ne suffiront pas à respecter l’objectif des 2 °". "L’UE a été l’initiateur du mécanisme de révision et devra inévitablement y participer de manière active et réviser son objectif à la hausse", a rappelé la ministre luxembourgeoise qui a souligné combien le "facilitating dialogue" sera un moment clef.
" J’invite la Commission à réviser à la hausse la feuille de route à l’horizon 2050 dans tous les secteurs pertinents, notamment les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique, le transport, le bâtiment, l’utilisation rationnelle des ressources….", a argué Carole Dieschbourg en rappelant que l’UE dispose d’un mandat clair pour aller au-delà des 40 % de réduction des émissions auxquelles elle s’est engagée jusqu’à présent. "Il faut garder notre niveau d’ambition et procéder le plus vite possible à la ratification", a exhorté la ministre avant de conclure : "Restons des leaders, restons crédibles et restons ambitieux".
Cet appel explicite à revoir à la hausse l’objectif de réduction des émissions prévu pour 2030 a aussi été lancé par l’Allemagne, l’Autriche et le Portugal, et il rejoint les critiques émises par un certain nombre d’ONG, comme Greenpeace, WWF ou Climate Action Europe au moment de la publication par la Commission de sa communication.
D’autres pays, comme l’Italie, la Pologne, la République tchèque ou la Hongrie ont au contraire affiché un net refus de toute augmentation des ambitions de l’UE pour 2030.
Quant au commissaire Miguel Arias Cañete, il avait expliqué à son arrivée au Conseil pourquoi la Commission n’envisageait pas de revoir cet objectif : l’objectif 2030 est "le plus ambitieux au monde", a-t-il rappelé et une réduction d’au moins 40 % des émissions correspond à l’objectif d’une hausse des températures de maximum 2°. Il s’agit à ses yeux d’un plafond ambitieux et contraignant et c’est par ailleurs une première étape dans la feuille de route vers une économie européenne sobre en carbone.
Les ministres ont par ailleurs adopté une déclaration au sujet de l’arrêt du Tribunal de l’UE du 16 décembre 2015 enjoignant la Commission européenne à spécifier des critères applicables aux perturbateurs endocriniens, comme elle aurait dû l’avoir fait avant décembre 2013.
Dans cette déclaration, les ministres soulignent l’importance d’une action urgente de la Commission afin de se plier au jugement et à ses obligations légales. L’enjeu est d’éviter tout retard supplémentaire dans la définition de critères scientifiques applicables à ces substances chimiques qui interfèrent avec le système hormonal.
Le commissaire européen à la Santé et à la Sécurité alimentaire, Vytenis Andriukaitis, a réaffirmé devant les ministres et la presse l’engagement qu’il avait formulé devant le Parlement européen réuni en plénière le 2 février 2016 : à savoir que la Commission s’engageait à présenter de tels critères avant l’été 2016.
Les ministres ont également tenu un premier débat sur le plan d’action présenté par la Commission en décembre 2015 dans l’objectif de faciliter la transition de l’Europe vers une économie circulaire. Les discussions des ministres de l’Environnement font suite à celle qu’avaient eue quelques jours plus tôt leurs collègues en charge de l’économie au sein du Conseil Compétitivité, l’objectif étant de préparer des conclusions qui devraient être adoptées en juin prochain.
Les ministres étaient invités par la présidence néerlandaise à identifier les actions à mettre en place en priorité dans le cadre du plan d’action, mais aussi à faire des propositions quant aux mesures que pourraient mettre en place les Etats membres seuls ou par le biais de coopérations.
Carole Dieschbourg, pour qui la transition vers une économie circulaire est "un impératif environnemental", estime qu’il importe de cibler en priorité les actions qui contribueront à la mise en œuvre conjointe des objectifs de développement durable et des objectifs climatiques. Pour la ministre luxembourgeoise, la réduction du gaspillage alimentaire et la réduction progressive des matières plastiques sont des objectifs prioritaires dans un premier temps.
Carole Dieschbourg estime par ailleurs que l’échange de bonnes pratiques est fondamental et doit servir de base à un travail de sensibilisation des publics et des parties prenantes à tous les niveaux. La ministre a plaidé pour que la création d’un marché pour les matières premières secondaires de haute qualité soit facilitée, tout en soulignant l’importance de la promotion des investissements et des financements. A ses yeux, les marchés publics sont prédestinés à jouer rôle de levier important et les Etats membres peuvent aussi coopérer pour mettre en place des normes communes, comme des labels de qualité ou des passeports de matériaux.
Les ministres étaient enfin interrogés sur le modèle de gouvernance qu’ils imaginaient pour assurer le suivi du processus de transition. Pour Carole Dieschbourg, "le semestre européen se prêterait bien à monitoring régulier de la situation".